L'Association nationale des commerçants et artisans (Anca) a démenti toute pénurie de farine, appelant les boulangers à s'adresser à l'Office algérien interprofessionnel des céréales pour s'approvisionner. Dans une récente déclaration à L'Expression, Hadj Tahar Boulenouar, le président de l'Anca, a affirmé: «Nous sommes en contact avec l'Oaic et les minoteries. Je peux assurer que les stocks de farine suffisent au besoin national, pour encore 3 mois». L'association a également dénoncé les pratiques «frauduleuses» de certains boulangers qui discréditent la profession tout en portant atteinte aux droits des consommateurs. Aussi, met-elle en garde les «fraudeurs» et «spéculateurs» contre les sanctions qu'ils peuvent encourir. Dans ce sens, il appuie ses propos par le fait «que les boulangers produisent du pain amélioré, les croissants et d'autres produits à base de farine», précisant que «la marge bénéficiaire du boulanger sur le pain normal est minime et est derrière la fermeture de plusieurs boulangeries». À cet égard, il a révélé que la question du pain et le cahier revendicatif des boulangers se trouvent au niveau du gouvernement. En attendant une issue à cette question, les boulangers sont sur le sentier de guerre. Ils ne veulent pas perdre de temps et comptent même entamer des négociations pour une éventuelle révision du prix du pain. Cette demande des boulangers ne date pas d'hier, mais les précédents gouvernements ont toujours fait un peu la sourde oreille. Paradoxalement, si beaucoup s'accordent à dire que les révisions des prix de certains produits, dont le pétrole, qui sont influencés par le cours mondial sont inévitables, la révision du prix du pain, elle, suscite des avis divers. L'argument déployé en substance par les professionnels de la boulangerie pour convaincre le gouvernement de la nécessité d'une révision du prix de la baguette a trait aux coûts de production (eau, électricité, levure, salaires...) qui ont, eux, subi une augmentation. Nombre de boulangeries qui ne fabriquent que du pain, ayant du mal à rentrer dans leurs frais, ont mis la clé sous le paillasson. «Les boulangers ne peuvent pas baser leur activité sur le pain normal uniquement, sinon ils seront contraints de fermer, et beaucoup l'ont fait, parce qu'ils n'arrivaient plus à couvrir leurs dépenses», a révélé Hadj Tahar Boulenouar. Ce qui représente un drame social. Or, les pouvoirs publics ne l'entendent pas de cette oreille, qui ont apparemment peur de donner satisfaction aux boulangers au risque d'allumer les feux de la contestation sociale. Les émeutes de Tunisie dans les années 1983-1984 (27.12.1983 au 6 janvier 1984) ont justement éclaté après que le gouvernement avait annoncé l'augmentation des prix du pain et des produits céréaliers comme la semoule, à la suite d'une demande du Fonds monétaire international de stabiliser l'économie tunisienne. Après trois jours des violences ayant coûté, officiellement, la vie à 70 personnes, le président Habib Bourguiba annonçait que «toutes les augmentations sont annulées». Ce qui est un non-sens économique justifié au yeux de ces derniers par le coût politique supposé ou réel du pain. Mais personne ne s'interroge sur la subvention accordée à travers l'Oaic. Or, une certaine opacité, dénoncée à plusieurs reprises, continue à entourer l'usage de cette manne colossale qui, en l'absence d'un système de contrôle rigoureux des quantités de blé tendre mises sur le marché, profite moins au consommateur qu'aux minoteries industrielles.