Djamel Bensmaïl, Jimmy l'artiste pour les intimes, a été tué. Il a été tabassé, poignardé avant que son corps ne soit brûlé. Cruel, horrible et barbare. Justice doit être rendue et les assassins de Bensmaïl doivent répondre de leurs actes. Ils doivent expliquer à l'opinion publique, choquée par les vidéos du meurtre, filmées et diffusées sur les réseaux sociaux, leurs motivations et les raisons du déferlement d'une aussi grande haine envers un citoyen sans défense. Car, même si Bensmaïl a été désigné juste avant le crime - malheureusement à tort et pour des raisons que seule l'enquête révèlera- comme étant le pyromane dont le feu a détruit la vie de milliers de villageois, il avait droit à un procès équitable. Il avait droit à la parole et droit de se défendre. Certes, la violence appelle à la violence et l'effet «foule» peut expliquer certaines brutalités et comportements excessifs, mais pas la sauvagerie. Ce qu'il s'est passé, le 11 août dernier à Larbaâ Nath Irathen, est l'innommable. Mais ce n'est pas là un acte de vengeance des enfants de ce village meurtri, endeuillé par la mort d'au moins une vingtaine de ses habitants. Ni celui d'une quelconque région d'où sont originaires les assassins de Djamel. Ce meurtre est l'oeuvre de ceux qui l'ont commis et ceux qui l'ont commandité, si la justice vient à confirmer qu'il s'agit bien d'un acte prémédité. Les Algériens qui demandent justice ne cherchent pas à travers ce drame, à faire le procès d'une région, mais juste à faire respecter les lois de la République pour éviter que l'Algérie ne se transforme en jungle. Ceux qui ont prôné des discours de haine et de discrimination dans le but de casser l'union des Algériens et son élan de solidarité, doivent, eux aussi, être mis au banc des accusés. Et cela même si leur propos venimeux et malveillant n'a eu aucun écho sur le terrain comme l'ont montré les caravanes de solidarité qui continuent encore à affluer de toutes les régions du pays vers Tizi Ouzou, la wilaya la plus touchée par les gigantesques incendies qui ont fait plus de 90 victimes. C'est là l'Algérie unie dans sa diversité. Une Algérie qui s'honore d'avoir enfanté le père de Bensmaïl dont le courage et la sagesse impose le respect. Ce père endolori a su surmonter sa douleur en appelant à l'union «nous ne voulons pas de ''fitna'' (discorde). Les Kabyles sont nos frères».Il refuse que l'assassinat de son fils soit instrumentalisé, mais cela ne signifie nullement qu'il renonce à son droit à obtenir justice pour son fils. Lui, la petite famille du défunt Djamel tout autant que sa grande famille, l'Algérie, cherchent à connaître la vérité sur cet assassinat. Elles demandent à ce que toute la lumière soit faite et que les auteurs et les commanditaires de cet acte abject expliquent leurs motifs et expriment au moins du regret ou de la compassion. Les meurtriers de Djamel sont arrêtés parmi les 90 personnes mises en cause dans ce meurtre. Leurs révélations sont très attendues. Tout autant que celles des présumés «pyromanes» interpellés. Si la justice apporte les preuves de leur implication dans les derniers incendies qui ont ravagé le pays, ces derniers aussi doivent rendre des comptes car les victimes des feux criminels attendent également que justice leur soit rendue. C'est à ce prix seulement que les esprits vont se calmer et que les tensions vont baisser. C'est à ce prix-là que le rêve de Djamel de voir s'édifier un Etat de droit se réalisera. Et cet Etat ne peut se construire sans vérité et justice.