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«Ma vie aurait été fade sans mon écriture»
Youcef merahi (Ecrivain-poÈte)
Publié dans L'Expression le 29 - 08 - 2021

L'Expression: A quand remonte exactement votre coup de foudre pour la littérature et quel en a été le déclic?
Youcef Merahi: Je ne peux pas dater exactement mon «coup de foudre pour la littérature», comme vous dites. C'est au primaire,, que tout a démarré, me semble-t-il. J'ai eu des instituteurs qui m'ont initié à la lecture, sachant qu'à l'époque, il n'y avait ni télé ni tous ces bidules avec lesquels nos enfants passent le temps. J'ai eu d'abord Monsieur Hocine Si Ammour qui nous faisait lire des livres de contes; ce moment était pour moi tout simplement magique. Puis, il y eut Monsieur Hocine Terzi. Enfin, il y eut Monsieur Aït Iftene; c'est avec cet instit (à l'époque, on disait Maître) que j'ai rencontré un texte du regretté Mouloud Feraoun, texte tiré du Le fils du pauvre. J'ai compris que les mots pouvaient créer une histoire, un peu à l'image des contes de nos grands-mères. La matière «rédaction» était un premier pas, naïf certes, mais salutaire pour l'amour que je commençais à porter à la lecture, puis à l'écriture. L'un ne va pas sans l'autre, naturellement. Depuis le primaire, je n'ai jamais cessé de lire et d'écrire.
Quelles ont été vos toutes premières lectures et les premiers auteurs algériens ou étrangers à vous avoir emballé?
Sincèrement, je crois que le tout premier auteur fut sans conteste Mouloud Feraoun. Puis j'ai été amené à lire Alain Bombard, un médecin aventurier, Naufragé solitaire (ou volontaire) en Atlantique. Je lisais ce genre de romans. Je précise qu'à l'époque, il n'y avait pas d'autres passe-temps. Avec le temps, j'ai pu préciser mes choix. Et lire les auteurs algériens, mais aussi étrangers.
Et le passage à l'acte (d'écrire), il s'est effectué quand, comment?
Je ne saurais le dire. Au lycée, nous avions une matière de rédaction; je soignais beaucoup mes textes; je travaillais bien le français, enfin la langue. J'étais fort, comme on dit, dans cette matière. J'avais toujours eu de bons rapports avec mes profs de français, à la différence des maths par exemple. Je crois qu'à cette époque, un peu avant peut-être, j'ai commencé à faire des pastiches, des «hugolatrises» comme le dit si bien Sénac. Je lisais mes petits poèmes à mes potes, à qui ça ne disait rien. Ils m'écoutaient par complaisance. Il faut dire que l'écriture est un acte hautement solitaire. Aussi, je me suis volontairement mis à écrire pour moi-même. Je rêvais de voir paraitre mes textes. J'ai tenté les revues, les journaux. Et c'est parti comme ça. Puis j'ai rencontré d'autres apprentis poètes comme moi, et c'est parti comme ça.
Vous avez d'abord été pour ne pas dire vous êtes d'abord né, poète, pourquoi la poésie a-t-elle pris toute cette place chez vous alors que vous avez toujours été un grand lecteur de romans aussi et de tous les autres genres?
Parce que j'aimais ce type d'écriture. J'aimais la poésie. J'aimais, j'aime toujours, la musique qui s'en dégage, l'absolu dans le verbe, la sonorité et le voyage qu'elle propose. C'est un peu comme une drogue. C'est ce qui fait dire qu'elle est marginalisée en ce moment. Il y a cet aspect ésotérique, fermé, absolu, déraisonnable et solitaire. Parallèlement, j'étais un lecteur vorace. Je lisais tout, comme disait le regretté Hamid Nacer Khodja. Je lisais tout. J'avais toujours un livre à portée d'yeux. Lors de mes études supérieures à Alger, dès que je terminais mes révisions, je prenais un roman (ou autres) et je me mettais à lire. Malgré cela, je suis resté fidèle à la poésie. C'est ma drogue. Le poète Abdelmadjid Kaouah parle de «militance poétique». Je partage son avis. Je le ressens ainsi. Dans mes moments de grande solitude ou d'angoisse, un recueil de poésie m'apaise et me repose.
Vous vous identifiez beaucoup à certains poètes algériens, on citera, notamment Djamel Amrani. Pouvez-vous nous en parler?
Identification? Oui, c'est une appréciation que j'accepte. Parce que je me vois comme eux; ou je les vois comme moi. Je viens de te dire que lire de la poésie, donc rencontrer un poète, me fait oublier un moment de détresse. Il n'y a pas que Djamel Amrani. Il y en a d'autres. Mais Djamel avait ceci de caractéristique, il vivait sa poésie comme un sacerdoce. Il avait une telle fringale poétique que le poème lui collait à la peau. Il était d'une telle sensibilité qu'on ne pouvait pas rester indifférent à cet homme. Bien que l'environnement social le rejetait. Il est mort, seul, de cela. D'une overdose de solitude. C'est mon ressenti, du moins. D'un autre côté, il y avait Djaout, Nacer Khodja, Tibouchi, et d'autres; je ne peux tous les citer. En chacun des poètes, j'arrive à trouver une fêlure, une blessure, un choc de la vie, qu'ils tentent de falsifier par ce moyen dérisoire, mais ô combien salutaire. Hamid Tibouchi, poète et peintre, en parlant de l'acte poétique, disait être atteint de «poétose», comme s'il s'agissait d'une maladie. Et si c'était le cas?
Vous avez aussi côtoyé le regretté Hamid Nacer Khodja, pouvez-vous le présenter à nos lecteurs de votre point de vue?
Pour Hamid, il faut un livre pour le dire. C'est un intellectuel pluriel. Une encyclopédie à lui seul. Le spécialiste de Sénac, son ami aussi. Il figure dans le testament de celui-ci; mais il a été le seul à lui être resté fidèle; ainsi il a perpétué le message du poète assassiné. Hamid est un poète, écrivain qui a mis son oeuvre personnelle de côté pour garder vivante la mémoire de Sénac. C'est dire la richesse et la complexité de cet homme. Perdre Hamid, c'est perdre un puits de science. Un ami fidèle. Un recours précieux pour quelques infos que ce soit en matière de littérature. Perso, à chaque fois que j'avais besoin de préciser un élément, c'était à lui que je faisais appel. J'ai toujours eu une réponse favorable de sa part. Il donne l'info par téléphone et envoie le lendemain par mail le document. C'était un grand monsieur, humble, sans prétention, caché de grosses lunettes en écaille, et la tête perdue dans les étoiles. Qu'il repose en paix!
C'est quoi la poésie pour vous?
Vaste question cher ami; si je le savais, je te le dirais. Mais je ne le sais pas. Cette question a tenu en haleine la totalité des poètes du monde. Ces derniers ne le savent pas eux-mêmes. Chacun a sa propre interprétation; il n'y a pas une définition précise, sauf technique. Comment définir le poète Si Mohand, Rimbaud, Baudelaire, et tous les autres. Aragon. Eluard. Dib. Je suis incapable de répondre à cette question. Je sais simplement que la poésie (je dis souvent le mot) m'habite. Comment? Je ne sais pas. Pourquoi? Je ne sais pas. Pourquoi moi? Je ne le sais pas, non plus. Le poète est un être à part, non pas de
lui-même, mais par la curiosité d'autrui. Je le ressens ainsi; je ne suis pas le seul. Djamel Amrani me disait: «Je suis en marge de la marginalité.» C'est dire toute la complexité de la situation du poète, surtout de nos jours. Puis, le poète se conjugue désormais au futur antérieur; et la poésie se transforme graduellement en objet de recherche archéologique. Toutefois, il reste encore des gens, comme moi, à tenter l'aventure poétique, sans assurance d'aboutir sur un rivage accueillant.
Si vous ne deviez ne prendre avec vous qu'un seul livre pour un long séjour en solitaire, lequel serait-il? Pourquoi?
C'est simple et complexe à la fois. Un recueil de poésie. Parce qu'un roman, une fois lu, je le mets de côté. Mais la poésie ne se périme pas; elle est intemporelle; elle garde sa vigueur pour des années. Il m'arrive de relire, souvent, bon nombre de poètes d'ici ou d'ailleurs.
Après un long chemin dans les sentiers de la poésie, et plusieurs recueils de poésie édités, vous avez bifurqué pour un autre genre: le roman. Pouvez-vous nous parler de vos romans édités et pourquoi cette reconversion?
Je suis fondamentalement poète. J'ai à mon actif plusieurs recueils de poésie. Pour la petite anecdote, le regretté Mouloud Achour et Anouar Benmalek m'ont dit un jour: «Fais- nous un peu de prose.» C'est aussi simple que cela. Je ne sais pas ce qui m'a pris. Je me suis mis à monter un roman. De fil en aiguille, j'ai édité Je brûlerai la mer et trois autres romans chez Casbah Editions. Disons que je me suis pris au jeu. Les thèmes traités relèvent de la vie en Algérie après l'indépendance. Sauf que j'ai écrit un roman épistolaire, post-scriptum. Je crois être le seul à avoir traité ce thème de l'amour platonique, à base d'échange de lettres. Pour le reste, je suis mal placé pour parler de ma production. Maintenant, je suis revenu à la poésie; je me suis acoquiné avec elle, à la vie à la mort.
Votre vie se confond allègrement avec la littérature, les livres, la littérature, est-ce un choix et imaginez-vous votre vie sans cet univers qui vous subjugue tant?
Oui, c'est un choix. Je suis tombé dedans en étant jeune. Sincèrement, c'est toute ma vie. Je ne me vois pas faire autre chose. Je vis de littérature, pratiquement. C'est juste une image. Comme tu dis, c'est mon univers. Je ne me vois pas dans une autre gestuelle. Ça coule dans mes veines. C'est ma respiration.
Pourquoi n'avez-vous pas écrit votre autobiographie, vous qui avez été témoin et acteur de tant d'événements historiques et qui avez côtoyé énormément de personnalités, notamment du monde culturel?
Pourquoi faire? Ca n'intéresse personne. C'est du moins mon point de vue. Mon autobiographie se trouve dans mes textes, notamment dans ma poésie; il suffit de décrypter. Cela dit, je n'ai rien contre ceux qui versent dans ce style.
Si votre vie était à refaire, auriez-vous refait le même choix, les livres, la poésie, la littérature?
Oui, dix fois oui! Je ne sais rien faire d'autre. Je le dis en toute modestie. J'ai fait ce que j'ai pu. J'ai écrit ce que j'ai cru utile. Ma vie aurait été fade sans mon écriture.


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