Présente à tous les niveaux de l'administration en tant que mode de fonctionnement imposé et adopté par les gouvernances passées, la corruption a eu tout le temps et l'impunité nécessaire pour miner toutes les chances de voir l'Algérie se diriger vers un renouveau social et économique. D'où la difficulté, aujourd'hui, d'installer de nouveaux paradigmes de gestion, dans la mesure où la toile tissée par la «issaba» a pris tellement d'ampleur que son éradication nécessite, désormais, en plus du temps, un engagement sans faille des nouvelles équipes à faire respecter l'application des nouvelles dispositions de loi visant à inverser l'ordre établi par les appétits voraces de l'oligarchie. À cet effet, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Abderrachid Tabi, n'a pas manqué l'occasion de la rencontre du gouvernement avec les walis, pour annoncer que «dans le souci de renforcer les valeurs d'intégrité et de transparence dans la gestion du ser-vice public et les mécanismes de lutte contre la corruption et la moralisation de la vie publique, il sera procédé à la révision de la loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption, et au renforcement de notre système juridique par un code d'éthique de l'agent public». Une orientation qui tombe à point nommé, après le constat amer d'une résistance tenace de certains responsables, à maintenir l'anarchie administrative et juridique, qui a servi durant des décennies à nourrir et renforcer le pouvoir de l'argent sale et son extension à tous les paliers et les sphères de décision. Résultat des courses: au demeurant, l'administration algérienne croule sous le poids d'un volume insurmontable de contentieux issus des méandres de la spéculation, des méthodes d'attribution des marchés publics, des infractions enregistrés dans le domaine de l'investissement, dans les secteurs stratégiques et les dysfonctionnements orchestrés pour exercer un diktat qui ne dit pas son nom sur tous les leviers économiques susceptibles d'accélérer le processus de relance. C'est précisément à cette dure réalité que s'est heurtée la volonté de l'Etat à opérer le changement tant attendu. Force est d'admettre que face à la complexité de cette situation, seul le glaive de la justice et le renforcement de ses outils pourront lutter efficacement contre ce phénomène, et permettront d'engager une restructuration de la vie publique. À ce sujet le ministre de la Justice affirme que «le principe de moralisation de la vie publique, s'il exige une série de mesures permettant au citoyen d'exercer le droit de prendre connaissance des modalités de gestion des affaires publiques, à travers les mécanismes prévus par la Constitution, la justice administrative joue, toutefois, un''rôle axial'' pour asseoir le contrôle sur les affaires de l'administration à travers des actions de résiliation ou des demandes d'indemnisation». Cela étant, la révision de la loi sur la lutte contre la corruption et le renforcement de l'appareil judiciaire, devrait s'accompagner selon Tabi par «la modification de certaines dispositions du Code du commerce et du Code pénal, en vue de dépénaliser l'acte de gestion». Une instruction qui ne manquera pas d'impacter positivement l'administration, notamment dans le domaine économique, dans la mesure où elle contribuera à libérer les initiatives et à créer une relation de confiance entre les opérateurs économiques et l'administration. Cependant, il est impératif que cette libération des prérogatives, doive se doter de mesures d'accompagnement essentiellement orientées vers le principe de la protection du responsable local. Dans ce sillage, Abderrachid Tabi annonce « l'élaboration, en cours, d'un projet de loi régissant la relation de l'administration avec l'opérateur économique et la création de tribunaux administratifs d'appel, en consécration du principe de double degré de juridiction qui permettra à l'administration de faire appel des jugements administratifs prononcés à son encontre».