Pierre Mourlevat nous livre son point de vue sur les relations économiques entre la France et l'Algérie. Dans cet entretien, le chef de la mission économique à l'ambassade de France en Algérie, Pierre Mourlevat, nous livre aimablement son point de vue -très optimiste- sur les relations économiques entre la France et l'Algérie, leurs perspectives et le dynamisme qui les caractérise depuis ces deux dernières années. L'Expression: La 39e édition de la Foire internationale d'Alger a pris fin jeudi. La participation de votre pays à cette manifestation économique a été remarquable. Quel premier bilan en tirez-vous? Pierre Mourlevat: Il est trop tôt pour faire un bilan. Ce qu'on peut dire en revanche, c'est que la majorité des entreprises sont satisfaites de cette participation pour les deux catégories d'entreprises ayant pris part à cette manifestation. Il y a les entreprises qui, comme chaque année, font de cette foire une vitrine. Elle ont alors renforcé leur image. Il y a la deuxième catégorie, celle des PME qui participent pour la première fois. Au fait, elles sont plus nombreuses à participer à cette foire puisqu'elles représentent 55% du nombre total. Elles ont eu beaucoup de contacts ce qui leur a permis de mieux comprendre les opportunités qu'offre le marché algérien. Je peux donc affirmer que les entreprises vont tirer un bilan positif de leur participation à cette 39e FIA. Les entreprises françaises ont-elles signé des contrats ou eu des promesses de contrats? Il est assez rare de signer un contrat dans une foire. Cela dit, il y a eu beaucoup de contacts et de rapprochements entre les différents partenaires. Ce que je peux affirmer c'est que la foire a été un point positif pour les entreprises françaises. A l'inauguration de cette foire, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a entamé sa visite par le stand français. Comment avez-vous apprécié ce geste? Nous avons été très favorablement impressionnés par ce geste qui a consisté non seulement à visiter en premier le stand français mais à consacrer le temps le plus long, plus de vingt minutes à ma connaissance, aux entreprises françaises. Le président a, en effet, pris le temps nécessaire pour discuter et écouter les chefs d'entreprise. Nous avons vu dans ce geste une symbolique, une marque d'attention remarquable et un signe d'encouragement destiné aux entreprises françaises pour qu'elles viennent investir en Algérie. Peut-on dire alors que dans le cadre des relations algéro-françaises, c'est le business qui prime? En d'autres termes, c'est l'économique qui draine le politique. Non, ce n'est pas l'économique qui entraîne le politique mais la qualité des relations économiques crée une dynamique favorable pour l'épanouissement des relations politiques. Tout le travail qu'on peut faire dans le cadre économique comme la formation, le partenariat, le transfert de technologie...etc., crée un climat positif dans le cadre des relations entre les deux pays. Ce rôle s'exprime non seulement au niveau des PME mais aussi lors des rencontres économiques internationales. Je cite entre autres, le rôle joué par la France auprès du Club de Paris pour le remboursement anticipée de la dette algérienne. La France a été le premier pays à signer ce remboursement anticipé, et cela a provoqué un effet d'entraînement chez les autres pays. Voilà un exemple qui crée une dynamique dans les relations entre les deux pays. C'est dire que les relations économiques créent les conditions de ce rapprochement global entre les deux pays. On a remarqué que depuis le début du «froid politique» entre les deux pays, qui a commencé en février 2005, les entreprises françaises ont pris quand même de grandes parts dans les marchés en Algérie. Les entreprises françaises ont fait des efforts considérables pour venir travailler en Algérie. Les investissements français en Algérie ont augmenté pratiquement de 74% par rapport à l'année 2004. en 2005 en effet, ces investissements ont atteint le chiffre de 140 millions de dollars. C'est un chiffre record jamais atteint dans l'histoire des relations économiques entre les deux pays. A cela, il faut ajouter un potentiel d'investissement supplémentaire qui atteindra plus de 800 millions de dollars durant la période qui s'étale entre 2006 et 2008. Comment entrevoyez-vous les lendemains des relations entre les deux pays? Ces relations sont maintenant sur une pente de croissance très forte. On a quitté la période des doutes où on nous reprochait la frilosité. Il y a maintenant un travail concret qui se fait sur le terrain. Il y a par exemple l'accord entre le groupe Mehri et Accord pour la construction de 36 hôtels, le plan stratégique de Carrefour, le réseau banque, Cetelem qui a commencé ses activités (crédits à la consommation) à Alger depuis le mois de mars, Carlyon vient d'avoir l'autorisation du Conseil de la monnaie et du crédit afin qu'elle puisse activer, Il y a la Coface qui ouvrira un bureau à Alger en septembre prochain et d'autres exemples encore. Mon message est qu'il existe réellement une maturité de plus en plus forte des entreprises françaises qui ne viennent pas seulement à Alger pour faire du commerce. Elles ont compris qu'il y a un projet global qui doit inclure le savoir-faire, la formation, le suivi, la maintenance et une présence sur le long terme. C'est dans cet esprit que les PME agissent aujourd'hui.