Jeudi 24 février: la Russie intervient militairement en Ukraine. C'est l'étincelle que le marché pétrolier attendait pour s'enflammer. Le prix du baril de Brent, référence du pétrole algérien, s'est aussitôt envolé pour atteindre les 105 dollars avant de se replier, hier, vers 11h30 pour s'installer au seuil de la barre symbolique des 100 dollars à 99,17 dollars. «L'attaque de la Russie contre l'Ukraine se poursuit sans relâche. Pourtant, les prix de l'énergie se sont calmés étonnamment vite après avoir connu une hausse spectaculaire» jeudi, se questionnait Carsten Fritsch, analyste du second groupe bancaire allemand, Commerzbank. Il semblerait que les sanctions économiques décidées par les Etats-Unis et l'Union européenne auraient concouru à réduire cette poussée de fièvre du baril. Ces représailles économiques et financières «dépassent tout ce qui n'a jamais été fait», a soutenu le président américain, Joe Biden lors d'une allocution télévisée depuis la Maison-Blanche. Il s'agit de tarir à court terme les flux de financement de la Russie et de compromettre à long terme son développement technologique et militaire, tout en bousculant les richissimes oligarques russes. Les dix plus grandes institutions financières russes se retrouvent visées par les sanctions occidentales, ce qui compromet leur accès aux marchés financiers internationaux et aux transactions en dollars, la devise reine de la mondialisation. L'Union européenne a également approuvé, jeudi soir, des sanctions «massives». Il s'agit, notamment de limiter drastiquement l'accès de la Russie aux marchés de capitaux européens, entravant la capacité de Moscou d'y refinancer sa dette. L'UE va aussi réduire l'accès de la Russie à des «technologies cruciales», en la privant de composants électroniques et de logiciels, de façon à «pénaliser gravement tous les pans de l'économie russe», a précisé la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen sans lui interdire toutefois l'accès au système bancaire Swift pour l'isoler financièrement du reste du monde, comme ce fût le cas de l'Iran fin 2019. L'Occident, l'Europe en particulier, oscille entre un conflit armé aux conséquences humaines dramatiques et des sanctions économiques qui ne feront vraisemblablement pas reculer à court et à moyen terme les desseins du maître du Kremlin. Si regards étaient rivés dans un premier temps sur la flambée des prix du pétrole et du gaz, celle qui a touché les prix des céréales aura été tout aussi spectaculaire. Le prix du blé a atteint son plus haut niveau depuis juillet 2012 à Chicago, la référence internationale avec un pic totalement inédit pour le blé à 344 euros la tonne sur Euronext. Les cours du blé et du maïs, dont l'Ukraine est le quatrième exportateur mondial, se sont envolés dès l'ouverture, quelques heures seulement après le début de son invasion. Le précédent record pour le blé remonte au 24 novembre 2021, qui avait atteint 313,5 euros la tonne en séance sur l'échéance de décembre (et au 23 novembre pour le cours à la clôture à 311,5 euros), a indiqué Edward de Saint-Denis, de la société de courtage Plantureux et Associés. «Aujourd'hui on a dépassé ce niveau, le cours a atteint au plus haut 344 euros», a-t-il souligné. Le maïs a aussi vu son cours flamber, grimpant jusqu'à 304 euros la tonne (280 euros à l'ouverture). Sur le marché européen, le précédent record pour le maïs remonte au 4 août dernier: le cours avait atteint les 320 euros en clôture, a rappelé l'analyste. Les places boursières européennes ont également pâti de la tournure prise par la crise en Ukraine. Elles ont connu leur pire séance depuis mars 2020. La Bourse de Paris plongeait de 5,02?% vers la mi-journée de jeudi, la Bourse de Francfort chutait 5,17?%, celle de Milan reculait de 5,10?%. La Bourse de Moscou a cédé de son côté plus de 30?%. La monnaie russe, le rouble, réalisant un plongeon historique face à la devise américaine. Une situation qui semblait vouloir se rétablir hierr, alors que l'Ukraine est encore loin de panser ses blessures...Les prix du pétrole, des matières premières, des céréales... pourraient encore flamber.