La fièvre de la flambée généralisée des prix, qui s'est emparée des produits de large consommation n'a pas épargné celui du pain. Subventionné, il est le symbole de la justice sociale qui détermine le caractère social de l'Etat. Il porte, par conséquent un «sceau sacré» qui tend à être transgressé. S'il renferme une grande variété, la préférence des Algériens se porte, dans leur majorité, sur la baguette de pain blanc. Une particularité de la table algérienne. Vu à partir de son aspect socioculturel, le partage du pain a une forte charge symbolique: il scelle les liens d'amitié et de fraternité, et représente un élément fondamental sur le plan religieux, de la vie et du don. Son prix, accessible pour tous, renforce donc la place prépondérante qu'il occupe autant sur le plan social que celui nutritionnel. Des aspects qui sont occultés, supplantés pour des considérations économiques et financières par ceux qui en sont les artisans: les boulangers. Ces derniers sont montés au créneau pour revendiquer l'augmentation du prix de la baguette de pain à 15 dinars au lieu de 10 dinars. Une initiative justifiée par la hausse des prix de tous les intrants qui interviennent dans la préparation du pain la (levure, la main-d'oeuvre, l'électricité, le gaz...). L'Union générale des commerçants et des artisans algériens s'est d'ores et déjà positionnée dans ce qui s'annonce comme un bras de fer. L'Ugcaa s'oppose fermement à l'augmentation du prix de ce produit de consommation de base. Le coût du pain est réglementé, d'autant que c'est un produit subventionné dont le prix ne peut être augmenté que par les parties concernées, appelant les boulangers au niveau national à ne pas augmenter le prix du pain subventionné et à continuer à appliquer le prix habituel, indique-t-elle dans un communiqué daté d'hier, se disant «surprise» par les déclarations de Youcef Khalafat, président de la Fédération nationale des boulangers (FNB), qui relève de l'union, relayées par les réseaux sociaux et certains médias, faisant état d'une augmentation du prix subventionné du pain à 15 DA à partir de jeudi prochain. Des agissements qualifiés d'«irresponsables», rejetés par l'Ugcaa qui annonce qu'elle prendra, à cet effet, les mesures juridiques et administratives en vigueur. Les pouvoirs publics ne devraient pas rester en marge de ce qui s'apparente à un passage en force de cette revendication des boulangers, d'autant plus que les récentes mesures prises par le président de la République annonçaient un effort substantiel, encore jamais entrepris depuis que le problème du prix du pain a vu le jour, il y a de cela plus d'une décennie. Fraut-il rappeler, à ce propos, que sur plus d'une décennie, les pouvoirs publics contournaient le problème, en faisant des promesses intenables. Face à ce qu'on pourrait qualifier de fuite en avant des politiques de l'époque, les boulangers sont montés plusieurs fois au créneau. L'initiative du président Tebboune devait constituer l'épilogue de la protesta, au sens où les boulangers honnêtes, qui paient leur impôts ont été soulagés. Il reste que la réalité du terrain fait ressortir une vérité qui devrait s'estomper grâce aux abattements fiscaux décidés par le chef de l'Etat. Actuellement, la baguette de pain se vend à 15 dinars voire plus. Où en est-on? «Le dossier du pain et leurs revendications légitimes sont soulevés au plus haut niveau de l'Etat, la porte du dialogue est ouverte, sachant qu'il y a une série de réunions qui se tiennent au siège du ministère du Commerce et de la Promotion des exportations, en présence de représentants des boulangers de toutes les régions du pays, sous la bannière de l'Ugcaa», indique le document de l'union, qui s'était démarquée des appels à augmenter le prix du pain subventionné à 15 dinars, affirmant que ce comportement exposera le boulanger aux sanctions en vigueur, dans une précédente déclaration faite le 1er janvier. Il faut rappeler aussi que les boulangers avaient déclenché une grève, le 23 janvier, qui avait été massivement suivie à Tizi Ouzou. Un mouvement de protestation qui a duré trois semaines lequel a contraint les citoyens de la région d'acheter la baguette de pain à 15 DA. Un imbroglio qui risque de déboucher sur un dialogue de sourds et une augmentation, de facto, du prix du pain. Un pavé dans la mare pour la République...