C'est une Louisa Hanoune en colère qui a animé, hier, un point de presse pour dénoncer «la grave dérive des autorités de police et de justice de la ville d'Aïn Témouchent, représentées à travers le procureur général et le commissaire de la localité d'El Maleh, qui ont maltraité le représentant du Parti des travailleurs dans les locaux de la police», alors qu'il ne faisait que son travail de militant d'un parti légal. Ce que le PT considère comme une atteinte au multipartisme. Récit des faits. Samedi dernier, M. Bekhit Noureddine, représentant du PT à Aïn Témouchent et médecin de son état, est interpellé par la police et mené dans ses locaux pour interrogatoire alors qu'il récoltait des signatures de citoyens pour une pétition, à adresser au président, demandant la convocation d'un référendum populaire au sujet de loi du 20 mars 2005 qui «dénationalise les hydrocarbures et rétablit le système des concessions» et celle portant sur «l'introduction du système des concessions dans la gestion de l'eau». Un fait banal qui a pris des proportions insoupçonnées puisque l'interpellé aurait été «brutalisé par les services de police qui l'ont jeté par terre et confisqué son téléphone portable» tout en lui faisant subir «un long interrogatoire portant sur les activités du parti, son fonctionnement et l'objet de cette pétition adressée au président de la République», ignorant, comme l'a signalé Hanoune, qu'il s'agissait d'un parti légal. L'incident ne s'arrête pas là. Au deuxième jour, la direction du parti alerte le ministère de l'Intérieur sur ces dépassements et reçoit «des promesses de la part de son secrétaire général de tout faire pour mettre fin à l'incident tout en annonçant qu'il a donné des instructions dans ce sens aux autorités locales». Alors qu'au même moment, note Louisa Hanoune, «son militant est tabassé dans les locaux de la police». Au troisième jour la tension est montée d'un cran. La police encercle la maison du militant et pénètre dans les lieux avec un mandat de perquisition signé par le procureur de la République et confisque la liste de pétitions signée par les citoyens. L'épouse résiste et traite les intrus de «Hagarine». Comme son mari, elle est aussi militante du parti. La tournure que prend l'incident nécessite le déplacement de l'état-major du PT sur place pour interpeller le procureur général sur les dépassement enregistrés. Surprise. Le premier magistrat de la ville dit «qu'il assume la responsabilité des faits» et «ignore son monde» allant jusqu'à «refuser d'enregistrer la plainte du militant». Plainte qui sera déposée à Sidi Bel Abbès et dans laquelle le parti se constitue partie civile. L'analyse des faits par la direction politique du parti est tranchante. Il s'agit d'après Hanoune «d'une opération de provocation orchestrée par des centres d'intérêts occultes» tout en refusant de mettre «cette dérive sur le dos des institutions des corps constitués» car tient-elle à signaler «les policiers mis en cause ont déclaré qu'ils n'ont pas d'ordre à recevoir du ministère de l'Intérieur mais du procureur général». Louisa Hanoune se demande «si ce procureur se prend pour le président de la République ou se croit-il alors à Guantanamo». C'est-à-dire un territoire de non-droit. N'hésitant pas à faire le parallèle avec l'affaire de la bavure de l'assassinat de Massinissa qui a mis le feu en Kabylie, elle met en garde «les centres occultes qui traversent les institutions et qui ont des comptes à régler ou des intérêts étrangers à défendre» et annonce détenir «des noms sur des visages de gens qui roulent dans des voitures de luxe à Bouira et qui sont derrière ces troubles». La figure de proue du PT, que l'Entv a encensée dernièrement avec la diffusion d'un reportage très positif sur sa vie et parcours de militante, signale que «ces pratiques ne la surprennent pas dans la mesure ou elles sont signalées à l'approche de chaque consultation populaire». Pour elle c'est la démocratie politique qui est menacée car «l'engrenage est facile et le feu peut prendre à tout moment» et cite les exemples de l'Irak, de l'ex-Yougoslavie et du Rwanda où l'on a entamé la mise à mort de ces pays en «détruisant leurs structures syndicales et politiques rendant ainsi le tissu social très vulnérable». Ce qui est «un prélude à la désintégration des pays». Louisa Hanoune annonce qu'elle a reçu des promesses de la part du chef du gouvernement pour mettre fin à ce genre de dépassement et dit avoir interpellé le chef de l'Etat car «la situation est grave» et s'interroge «pourquoi ces centres occultes agissent maintenant» en évoquant la mésaventure que vient de connaître le parti de Djaballah avec la surprenante sentence de la justice qui a déjà mis la deuxième force politique au Parlement hors-jeu en prévision des prochaines consultations législatives. Est-on entré dans une nouvelle phase de normalisation politique?