Avec la disparition du Fdatic, d'aucuns crient à «la mort du cinéma ». Ironie du sort, dans son bilan, l'ancienne ministre de la Culture sortante s'était targuée, en faisant état de sa satisfaction, de la clôture avec succès du dossier portant sur la «loi sur le cinéma». Or, les principaux concernés, interrogés, affirment souvent leur ignorance quant à ces changements... Tous dénoncent l'opacité qui entoure ce volet, et beaucoup de cinéastes et de producteurs ne savent plus ce qui se passe. Pis encore, largués dans le flou le plus total, ils ont décidé de sortir à leur tour de leur silence en envoyant au mois de février dernier une lettre à M. le Président Abdelmadjid Tebboune. Une lettre en attendant des actions, nous dit -on...Expliquant cette démarche, le producteur Bouelam Ziani nous confie: « Si la lettre attire l'attention du président de la République, tout particulièrement sur les conséquences désastreuses engendrées par la disparition du seul soutien public à la création cinématographique, à savoir le Fonds national pour le développement de l'art, de la technique et de l'industrie cinématographique et de la promotion des arts et des lettres (Fndaticpal), ce courrier se veut aussi comme une alerte face à la dégradation continue de l'ensemble du secteur de la production cinématographique nationale.». Et de souligner: «En effet, ce courrier exprime le profond malaise que vit la profession, notamment à travers la disparition des ressources financières à même d'inciter la création cinématographique, mais aussi à travers la mise en place d'une future loi du cinéma qui va à l'encontre de toute politique favorisant le développement du septième art dans notre pays.»Et de conclure en rappelant la «situation critique que vit la profession aux abois». Environnement défavorable Dans cette lettre envoyée au président de la République, les professionnels du secteur rappellent en préambule: « Le 1er Janvier 2022, nous avons eu confirmation de la dissolution de la seule aide publique à l'activité cinématographique. Le Fdatic a, en effet, définitivement cessé d'exister, sans qu'aucun mécanisme de remplacement n'ait été mis en place. En dépit d'un environnement défavorable et de l'absence d'un marché pour nos films, notre secteur n'est parvenu à se maintenir en activité que grâce à cette précieuse aide publique et à l'engagement de fragiles opérateurs privés, qui risquent aujourd'hui de disparaitre définitivement. Nous avions, pourtant, pris acte de votre désir de prioriser l'activité cinématographique en Algérie, puisque vous aviez fait part de la volonté de votre gouvernement d'en faire une véritable industrie cinématographique créatrice de richesses et d'emplois.». Evoquant le rôle de l'Association des producteurs algériens de cinéma, la lettre explique que l'association « n'a cessé d'oeuvrer pour apporter sa contribution à ce projet et cela en participant depuis plusieurs années et de façon très active, à toutes les actions entreprises, d'une part, par le secrétariat d'Etat à l'Industrie cinématographique, et d'autre part, par le ministère de la Culture, pour la réforme de ce secteur d'activité». Aucune réponse de la tutelle Et d'indiquer: « Au moment où nous nous attendions à la diversification et à la multiplication des aides publiques au cinéma, à travers la création de nouveaux fonds d'aide à des échelles régionales, à une incitation à l'investissement privé dans ce secteur (à travers des mesures fiscales et parafiscales motivantes) ou à l'élaboration de nouveaux cahiers des charges pour les chaînes de télévision étatiques et privées, leurs faisant obligation de contribuer à la production cinématographique, nous assistons malheureusement à la dissolution du seul fonds d'aide publique existant. Sans stratégie clairement définie, (en termes de formation, de production, de distribution, de promotion, etc....), le cinéma national a peu de chances d'atteindre les objectifs que vous lui avez assignés. Monsieur le Président, notre inquiétude est grande. À ce jour, nous n'avons reçu aucune réponse rassurante de la part de notre tutelle quant à la garantie de la continuité de la production cinématographique.». Dans un ultime cri de détresse, les membres de l'Association des producteurs algériens du cinéma soulignent: «Nous nous adressons à vous personnellement, Monsieur le président de la République, non seulement en tant que plus haute autorité de l'EEtat, mais aussi en tant que défenseur du cinéma national, puisque vous avez souvent appelé, dans vos discours, à son développement. Sans soutien étatique à la production cinématographique, sans mise en place urgente de formation et de remise à niveau des professionnels du cinéma, sans mise en place de mesures réglementant la diffusion de nos films (chaînes de télévision privées et publiques, plates-formes, salles de cinéma et autres), notre secteur risque de se fragiliser davantage, voire de disparaître du paysage culturel algérien.» Apres toutes les lettres et plates-formes de revendications, envoyées ces dernières années au ministère de la Culture, sans aucune réponse, la présente, envoyée aux instances les plus importantes du pays, sera-t-elle enfin entendue? Wait and see...