Donc, le ministre d'Etat, Boudjerra Soltani, conduit la délégation algérienne qui prendra part aux travaux de la 33e session des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI) qui s'ouvre aujourd'hui même à Bakou, en Azerbaïdjan, et durera jusqu'au 21 du mois courant. L'objet de cette rencontre ministérielle, placée sous le slogan «Harmonie dans les droits, les libertés et la justice», est d'inventorier les moyens à mobiliser pour la concrétisation du programme d'action décennal voté par le 3e sommet extraordinaire des chefs d'Etat du monde islamique, tenu à La Mecque, l'an dernier, et dont les résolutions ambitionnent de relever les défis qui s'imposent aux peuples musulmans à l'aube du XXIe siècle. Récemment, nous nous interrogions dans ces mêmes colonnes sur la métamorphose de la diplomatie algérienne, au lendemain de la nomination de Abdelaziz Belkhadem à la tête du gouvernement. Constatant l'omniprésence de celui-ci, durant les dernières années, sur le terrain arabo-africain et islamique, et prenant en compte le satisfecit exprimé par la Ligue arabe quant aux résultats de la mandature algérienne qui a présidé à sa mutation qualitative au cours de l'année écoulée, nous nous étions inquiétés de savoir qui allait hériter de ces lourds dossiers et ferait face aux enjeux et aux exigences de ce volet primordial de la diplomatie du pays. La réponse, apparemment, n'a pas beaucoup tardé car il faut croire que Boudjerra Soltani, ministre d'Etat sans attribution particulière, devient de facto le missi dominici dans les affaires relevant de ce volet. Successeur tacite de Belkhadem, il en présente le geste et le faire. Reste la problématique du savoir, et là, il faut bien reconnaître que l'homme n'est pas connu pour être un grand spécialiste des questions diplomatiques. Or, la diplomatie n'est pas a priori un travail politique, elle est, d'abord et surtout, un métier dans lequel n'excellent, tous les grands diplomates vous le diront, que ceux qui pratiquent la culture du silence et du sourire énigmatique. Boudjerra Soltani va devoir faire un apprentissage mais, du fait qu'il a déjà effectué un certain nombre de missions similaires en Afrique et dans le monde arabe, il n'aura pas besoin de beaucoup de temps pour cela. D'autant qu'il sera conforté par la présence de diplomates attitrés, en charge de chaque dossier, dont il aura à assumer une synthèse particulièrement fine. Logiquement, on peut penser que la question de la succession de Abdelaziz Belkhadem, telle qu'elle se posait voici quelques jours sur le terrain de l' axe arabo-musulman du triptyque de la diplomatie algérienne, est résolue. Surtout que la mission délicate de l'émissaire algérien, en cette circonstance particulière, va au-delà de «l'élaboration d'une vision à long terme de la coopération» des nations islamiques en «matière de développement social, de croissance économique, de lutte contre la pauvreté, le chômage, les maladies chroniques et les pandémies, ainsi que toutes les formes de marginalisation», autant de voeux pieux dont nul ne sait ni quand ni comment ils prendront forme. Plus prosaïquement, il s'agira pour le ministre d'Etat et la délégation qui l'accompagne d'évoquer les questions habituelles concernant «les foyers de tension dans le monde musulman» -heureuse formule s'il en est -, tels que l'Irak, le Liban, la Syrie et le Soudan. Principalement, les Algériens auront à réitérer le «soutien inconditionnel de l'Algérie à l'Autorité palestinienne et à ses institutions» ainsi que «son entière solidarité à l'égard de la cause palestinienne». Mais, et c'est là que Boudjerra Soltani aura à démontrer son savoir-faire, il sera également question de présenter aux délégations de l'OCI «l'expérience ( algérienne ) en matière de paix et de réconciliation nationale», tout en plaidant pour «l'adoption d'une convention internationale globale sur la lutte contre le terrorisme international», l'Algérie voulant faire établir une claire «distinction entre le terrorisme et le droit légitime des peuples de lutter pour la liberté et l'indépendance».