Le procureur du Haut tribunal pénal irakien a requis hier la mort contre Saddam, Barzani et Ramadan. Lors de la trentième audience du procès de l'ex-président Saddam Hussein et de ses sept co-accusés, le procureur général du Haut tribunal pénal irakien (Htpi), Jaafar Al-Moussaoui a requis la peine de mort dans l'affaire de Doujail - en jugement depuis le 19 octobre dernier - après un réquisitoire fleuve lors duquel il évoqua la responsabilité directe, selon lui, du président irakien déchu et de deux de ses collaborateurs dans les massacres de 148 villageois chiites en 1982. «Nous demandons les peines maximales et les plus dures contre Saddam Hussein, Barzan Al-Tikriti et Taha Yassine Ramadan qui ont répandu le malheur sur terre et sont responsables de tous les crimes commis à Doujail», a affirmé le procureur général, Jaafar Al-Moussaoui. Cette même peine (de mort) a été demandée peu auparavant par l'avocat des victimes de Doujail. La séance d'hier, qui a été consacrée exclusivement aux plaidoiries de l'accusation, a été ensuite levée par le président du tribunal, le juge kurde Raouf Rachid Abdel Rahmane, qui a fixé la prochaine audience au 10 juillet lors de laquelle les avocats de la défense plaideront la cause des anciens responsables du régime baathiste déchu. Le procureur général du Htpi a, en revanche, été clément pour trois autres accusés en requérant des peines plus modérées contre eux et l'abandon des poursuites contre le huitième, mais ne se prononce pas sur le cas du juge qui a officié dans l'affaire de Doujail en 1982. Stoïque durant tout le temps où le procureur lisait son réquisitoire, le président déchu, Saddam Hussein, écoutait impassible esquissant même un léger sourire. Jaafar Al-Moussaoui a retenu, contre Saddam Hussein et ses co-accusés, quatre chefs d'inculpation : meurtre avec préméditation, emprisonnement et graves privations, tortures et exil forcé des victimes. Estimant que trois des accusés -Abdallah Roueïd, son fils Mezhar Abdallah Roueïd et Ali Daeh-n'ont fait qu'«exécuter les ordres» il demanda contre eux des peines relatives. Pour le cas du juge Awad Al-Bandar, ancien président des tribunaux d'exception irakiens -qui a condamné à mort des villageois de Doujail- le procureur général du Htpi a laissé au tribunal de se prononcer, estimant cependant que celui-ci mérite la mort. A son propos M.Moussaoui a indiqué qu'«Il (Awad Al-Bandar) a soutenu les actes criminels (des anciens dirigeants) et nousdemandons au tribunal de le condamner et de déterminer la nature de sa peine». En revanche, faute de preuves, le procureur général du Htpi abandonna les poursuites contre le huitième accusé Mohammed Azzaoui, ancien responsable du Baath. Dans son réquisitoire, le procureur général Jaafar Al-Moussaoui a estimé que ce qui s'est passé à Doujail au début des années 80 ressort des crimes contre l'humanité affirmant: «Ce sont des crimes contre l'humanité étant donné qu'ils ont eu lieu dans le cadre d'une campagne organisée et ordonnée par les autorités contre un groupe de civils». M.Moussaoui soutient d'autre part qu'il n'y a pas eu «d'enquête» préalable dans l'affaire de Doujail -tirs sur le convoi du président Saddam au début des années 80 qui ontdéclenché une répression féroce contre la population- mais qu'il y a eu lieu, selon lui «une violente campagne contre les habitants qui ont subi meurtres, destructions de biens et ont été forcés à l'exil intérieur» affirmant par ailleurs que les tortures pendant les interrogatoires ont coûté la vie à 46 personnes dont les noms, souligne-t-il, ont été ajoutés ensuite aux 148, déjà répertoriés, de la liste des condamnés à mort qui ont été exécutés. Dans son argumentaire, le procureur général du Htpi soutint également qu'«au même moment, 399 personnes, des vieux, des femmes et des enfants ont été parqués dans un camp proche des frontières avec l'Arabie Saoudite où ils sont restés jusqu'en 1986» abandonnés à eux-mêmes et vivant dans des conditions très difficiles. Se faisant, Jaafar Al-Moussaoui, emphatique, lancera à l'assistance: «On se demande si ces mesures étaient légales et proportionnées avec le simple incident qu'ont été les tirs» contre le convoi de Saddam Hussein. «A l'examen de ces mesures, on peut les qualifier de véritable opérationmilitaire impliquant les services de renseignement, des services de sécurité etl'armée populaire (un corps paramilitaire lié au parti Baath alors au pouvoir)» a encore soutenu M.Moussaoui qui affirma que «les accusés étaient conscients de ce qu'ils faisaient et leurs opérations ont eu un caractère systématique». L'audience du 10 juillet s'annonce décisive lors de laquelle la défense de Saddam Hussein aura renversé le réquisitoire du procureur général du Htpi pour tenter de sauver la tête de leur illustre client et celles de ses co-accusés..