Belkhadem reconnaît les pesanteurs que subit l'application des textes de la réconciliation nationale. «Les résultats de la réconciliation ont tardé à venir». C´est le premier bilan établi par le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, lors de son passage, avant-hier, devant le micro de l´émission «Tahawoulat», de la Chaine1. Pour ce qui est de la mise en oeuvre de la charte pour la paix et la réconciliation, Belkhadem, qui préside également la commission nationale chargée de veiller à l´application de ces textes, reconnaît l´existence de lenteur dans la mesure où «les fruits escomptés ont tardé à venir». Cependant, il promet tout de même de communiquer, "au moment opportun", tout ce qui a été réalisé depuis la promulgation de ces textes d´application dont les délais expireront le 30 août prochain. Ce bilan mitigé, reconnu publiquement, intervient à un moment où certaines wilayas du centre du pays connaissent une subite poussée des actes liés au terrorisme. Il y a moins de quatre jours, trois membres d´un GLD, ont été tués et trois blessés dimanche par l´explosion d´une bombe artisanale dans la région de Tizi Ouzou. Alors deux jours plus tôt, cinq militaires ont été assassinés à Mont-Korno, au sud de Médéa, et trois militaires ont été interceptés et tués à l´ouest de Tipaza. Au moins 20 personnes ont été tuées dans ces violences depuis début juin, pendant que rapt, suivis de demandes de rançon, attentats à la bombe, rackets et faux barrages suivent une courbe ascendante inquiétante à l´est de la capitale, notamment à Tizi Ouzou et Boumerdès. Le plus grand chantier politico- sécuritaire du président de la République semble marquer, on l´aura remarqué, un temps d´arrêt. Depuis la mi-mars et la libération des derniers détenus islamistes des prisons, on n´a pas vu la réconciliation nationale avancer d´un empan. Près d´un mois après son installation par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, à la tête du gouvernement, Belkhadem, qui suscite l´engouement des islamistes et des partisans de la réconciliation nationale, aura à sa charge de donner un coup d´accélérateur à un plan de paix qui marque la pas. Selon un premier bilan du ministère de l´Intérieur, et qui date d´un mois, «ils» ont été cent cinq repentis, la plupart faisant partie du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), à avoir choisi de déposer les armes et de se rendre aux autorités dans le cadre des mesures d´extinction des poursuites judiciaires mises en avant par la charte pour la paix et la réconciliation nationale. Le chiffre est totalement dérisoire, et à côté du «millier» d´hommes encore en armes, selon les statistiques les plus fiables, il y a encore à se faire du souci. D´autant plus que le délai de grâce donné aux groupes armés, et qui est de six mois, va expirer dans un peu plus d´un mois. Evidement, il sera rallongé à ses extrêmes limites, mais il y a à s´interroger sur l´efficacité du procédé. Pourtant, les mesures de la réconciliation ont de quoi séduire: extinction définitive des poursuites, réintégration dans les postes de travail, éventualité de dédommagement, etc. C´est-à-dire toute la panoplie juridique d´un retour «la tête haute». Cependant, la direction du Gspc reste fidèle à ses «trois non»: non à la trêve, non à la réconciliation, non au dialogue, credo largement en usage depuis une dizaine d´années. C´est dans ce contexte précis que peuvent intervenir Ali Benhadj et Abdelhak Layaîda, deux chefs charismatiques de la jeunesse islamiste radicale, récemment libérés, et auxquels les chefs militaires eux-mêmes reconnaissent une certaine autorité sur la nébuleuse radicale. Les deux hommes disent être prêts à contribuer à pousser la réconciliation vers ses extrêmes limites, pour peu que les autorités lèvent les restrictions et les interdits qui pèsent sur eux et les impliquent à fond dans un processus dans lequel il garde tout leur crédit et toute leur influence auprès des islamistes. Les prises de position de Layaîda en faveur de la paix, après avoir été un des chefs insurgés de l´islamisme, ont certainement beaucoup joué en sa faveur, lors de sa libération de la prison de Serkadji, le 12 mars dernier, en plus de la volonté des autorités de rendre sa liberté au chef historique des groupes armés et de lancer, par ce biais, une nouvelle offre de paix aux derniers irréductibles encore en armes. Dans un communiqué datant du 22 septembre 2005, c´est-à-dire en pleine campagne pour le projet de paix et de réconciliation nationale, initié par le président de la République, le chef historique du GIA, Abdelhak Layaîda, évoquait par la voix de son fils Adlane, les grandes lignes de la réconciliation nationale qu´il qualifiait de "choix inéluctable".