Ni le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, encore moins celui de la Culture, n'ont daigné adresser un message de condoléances à la communauté universitaire, au monde de la culture et à la famille du défunt Noureddine Toualbi-Thaâlibî, décédé il y a une semaine dans un total anonymat. Un silence blessant à la limite du mépris qu renseigne sur le peu de cas que nos responsables font de la science et de la culture. Intellectuel de valeur, le défunt a usé ses neurones en menant une guerre contre l'ignorance. Ses innombrables ouvrages légués aux futures générations témoignent de cet effort sans relâche d'un patriote aux idées modernistes assumées. Il n'a jamais renoncé au combat contre l'obscurantisme sous toutes ses formes, même au péril de sa vie quand l'hydre terroriste fauchait sans pitié les hommes de lettres et de culture algériens. Noureddine Toualbi-Thaâlibî est issu d'une famille algérienne noble. Professeur d'université où il a enseigné l'anthropologie psychanalytique et la psychologie de l'interculturel. Docteur en psychologie et docteur d'Etat es-lettres et sciences humaines de la Sorbonne,il a été recteur de l'université d'Alger, ancien directeur de cabinet au ministère des Droits de l'homme, sous la direction de Ali Haroune. Représentant l'Algérie à l'Unesco, à l'Alecso, Noureddine Toualbi-Thaâlibi a été également récipiendaire en 2014 de la Médaille d'or de l'Organisation arabe pour l'Education, la Culture et la Science (Alecso). Auteur de nombreux ouvrages et études d'un apport important à la théorie du changement social au Maghreb, ses recherches ont touché à des thématiques sociales très sensibles, mais restées en jachère pendant longtemps. Elles portaient plus particulièrement sur les manifestations de la «crise culturelle» au Maghreb saisie à travers une variété d'opérations psychoculturelles dont l'auteur s'attache à décrire rigoureusement les mécanismes et les pannes des «stratégies identitaires». Il faut toute une génération et au prix de nombreux sacrifices pour que la société puisse secréter un autre intellectuel de la même épaisseur que Noureddine Toualbi-Thaâlibi. Avec un palmarès scientifique enviable, il a hissé, haut, le drapeau algérien dans les tribunes scientifiques. Pour autant, il n'a pas eu droit à une seule ligne d'un hommage de la part de nos responsables. Pas une seule ligne! Cette attitude est inacceptable. Le défunt mérite des hommages à la mesure de son combat pour l'émancipation intellectuelle et en reconnaissance à son patriotisme. Quelle image renvoyons-nous à nos intellectuels avec ces comportements méprisants? Ce n'est pas avec ces attitudes que nous allons convaincre nos élites de revenir au pays? Sous d'autres cieux, on aurait assisté à des hommages dignes de la stature de l'Homme, sans compter l'organisation de colloques, de conférences et de rencontres scientifiques pour souligner l'apport de cet Homme à la société et rendre de la sorte hommage à la science et au savoir. On pensait que l'ignorance est le plus dangereux des fléaux qui menacent une société. On s'est rendu compte qu'il y a pire: c'est lorsque d'incultes responsables méprisent les intellectuels. «Nous devons rendre hommage à ces météores qui nous attirent vers le haut par leur savoir. À tous ces hommes illustres, ces Gardiens du Temple du savoir, du savoir-être, la patrie devrait être reconnaissante», a écrit le professeur Chitour dans un brillant hommage qu'il a rendu à cet intellectuel émérite.