Dans les Territoires palestiniens, la population n'attend plus la relance du processus de paix avec Israël mais uniquement une aide économique de la visite prévue cette semaine de Joe Biden, la première sur place depuis cinq ans d'un président américain. À Ramallah, siège de l'Autorité palestinienne du président Mahmoud Abbas, contrairement aux préparatifs observés à Tel-Aviv ou à El Qods occupée, aucun employé ne balaye les rues, déroule de tapis rouge, ou décore les grandes artères de drapeaux avant la visite de Joe Biden en Cisjordanie, territoire illégalement occupé par l'entité sioniste depuis 1967. Le président américain doit atterrir, ce soir, dans l'Etat hébreu, passer la journée de jeudi à El Qods occupée et se rendre brièvement demain à Bethléem (sud) où il doit rencontrer Mahmoud Abbas. La semaine dernière, à l'occasion de la visite en France du nouveau Premier ministre sioniste Yaïr Lapid, Emmanuel Macron a affirmé qu'il n'y avait pas «d'alternative à une reprise du dialogue politique entre les Israéliens et les Palestiniens». Le président français a aussi fait part de «sa disponibilité à contribuer à la reprise» du processus de paix, au point mort depuis 2014, et «à mobiliser la communauté internationale en sa faveur». Dans la foulée, de hauts responsables sionistes ont indiqué que Lapid était «ouvert» à rencontrer Abbas, mais «pas à se lancer dans un nouveau processus de paix». Le maître-mot des dirigeants sionistes est désormais de «réduire» l'intensité du conflit, en dépit des attentats et des opérations menées depuis le mois de mars, en «se focalisant sur l'amélioration des conditions économiques des Palestiniens». L'administration Biden a en parallèle repris son dialogue et son aide aux Palestiniens, coupée sous la présidence de Donald Trump, et pourrait annoncer de nouveaux engagements en ce sens cette semaine. L'un des enjeux clés est l'accès à la 4G. À l'heure actuelle, les quelque trois millions de Palestiniens de Cisjordanie occupée doivent se résigner à un Internet à faible débit avec la 3G, ou acheter des cartes SIM israéliennes utilisées sur place par les plus de 475 000 colons. La 4G ne règlera pas le conflit, mais pourrait bénéficier à l'économie palestinienne, note Mohammed Mostafa, ancien vice-Premier ministre et ex-patron de PalTel, le plus grand opérateur de télécoms dans les Territoires palestiniens. «Les opérateurs israéliens détiennent une part importante du marché des télécoms palestiniens. Cela (la 4G) serait une bonne façon de renforcer les compagnies palestiniennes», voire de créer des emplois sur place, explique-t-il. Dans un entretien récent avec la presse israélienne, le nouvel ambassadeur américain, Tom Nides, a déclaré vouloir oeuvrer à ce que tous les Palestiniens puissent avoir «la 4G ou la 5G sur leurs portables». «Ce serait bien d'avoir la 4G, mais ça n'est clairement pas un substitut au règlement de plus grands dossiers comme le statut d'El Qods, la souveraineté et la liberté des Palestiniens», estime Mohammed Mostafa. Les Palestiniens veulent faire de la partie orientale de Jérusalem, occupée depuis 1967 par l'entité sioniste, la capitale de leur Etat. «Les Israéliens se disent: ''Nous allons vous donner la 4G et vous allez rester tranquilles sur le reste.'' Nous sommes intéressés par la 4G, mais nous voulons aussi le reste», ajoute M. Mostafa. Pour Sam Bahour, un influent homme d'affaires de Cisjordanie occupée, «l'administration Biden est tombée dans le piège israélien qui est de minorer les droits fondamentaux des Palestiniens, pour ensuite les utiliser comme un atout comme s'ils faisaient des concessions». «Pour être vraiment honnête, nous n'avons pas vraiment besoin de la 4G. Ce dont nous avons besoin, c'est qu'une quatrième génération de Palestiniens ne vive pas sous occupation militaire», dit-il. Le gouvernement israélien a augmenté au cours de la dernière année le nombre de permis de travail en Israël délivrés aux Palestiniens, pour passer à un total de 150000, dont 14000 dans la bande de Ghaza. Cette enclave palestinienne de 2,3 millions d'habitants, sous blocus israélien, est contrôlée par le Hamas, considéré comme une organisation terroriste par Washington. Les permis de travail, doublés de salaires plus avantageux dans l'Etat hébreu, sont une bouffée d'oxygène pour l'économie de Ghaza, territoire paupérisé plombé par un chômage avoisinant les 50% et qui se relève d'une guerre meurtrière en mai 2021 avec l'Etat hébreu. Qu'est-ce que le Hamas attend lui de la visite de Joe Biden? «Rien», répond Basem Naïm, un haut responsable du mouvement.