Le président du Sénat a ouvert une nouvelle piste dans le dossier mémoriel qui rythme les relations entre l'Algérie et la France. Dans son allocution à l'inauguration de la session parlementaire ordinaire pour l'exercice 2022-2023, Salah Goudjil a plaidé pour «la constitution d'une commission nationale pour l'écriture de l'Histoire», affirmant que personne ne pourra dicter à l'Algérie son Histoire. Le président du Sénat envisage cette commission «sous forme d'instance officielle» en mesure de tracer «un programme pédagogique unifié» pour tous les cycles d'enseignement, du fondamental à l'enseignement supérieur. De ce point de vue, il s'agira d'un très grand chantier de la mémoire que propose d'ouvrir Salah Goudjil. Sensible et stratégique, un pareil projet appelle à une réflexion très approfondie qui impliquera aussi bien des historiens de renommée, que des universitaires, des académiciens, d'anciens maquisards et des pédagogues puisque la finalité est d'aboutir à la révision des programmes scolaires et universitaires en matière d'enseignement de l'histoire. «Il y a des choses qui circulent qui ne sont pas vraies», a lâché le président du Sénat, sans plus de détails. C'est dans ce sens qu'il a également évoqué le cas de trente-trois associations, activant dans un secteur donné, qui tentent, dit-il, «d'influencer le programme». Qui sont ces associations? Qui les dirige? Dans quels secteurs et dans quelles régions du pays activent-elles? Le président du Sénat ne le dit pas, mais il est certain que les parties concernées par ce dossier auront les détails qu'il faut auprès du deuxième homme de l'Etat. L'Algérie demande depuis longtemps un travail de mémoire sur les pages sombres des 132 années de colonisation française, et pas seulement sur les sept dernières années de la guerre d'indépendance. L'annonce du président du Sénat coïncide avec une autre idée, toujours sur la question mémorielle, lancée par les deux présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron: une commission d'historiens qui sera mise en place dans les prochains jours entre l'Algérie et la France. « Cette commission aura à traiter la question liée à la mémoire «sous l'angle historique et non politique», a indiqué le président Tebboune, dans un point de presse improvisé lors de la visite du président Macron, le 25 août dernier. «Nous nous sommes mis d'accord pour la mise en place d'une commission d'historiens dépolitisée. Je pense qu'elle pourrait être installée dans les quinze ou vingt jours qui suivent. Elle aura à traiter la question de la mémoire sous l'angle de l'histoire et non de la politique», a déclaré le président de la République dans un point de presse conjoint avec son homologue français, Emmanuel Macron, à l'issue de la cérémonie de signature de «la Déclaration d'Alger pour un partenariat renouvelé» et cinq accords de coopération bilatérale dans divers domaines. S'agissant du temps imparti aux spécialistes pour mener leur travail, le président Tebboune a indiqué avoir évoqué avec son homologue français «un délai d'une année ou moins, si le travail est finalisé avant». «Mais s'ils (les spécialistes) prennent encore plus de temps, tant mieux car les bonnes choses prennent du temps», a-t-il ajouté. Pour sa part, le président Macron a révélé que la commission se penchera sur les «premiers temps de la colonisation avec leur dureté, avec la brutalité de ces événements», mais aussi sur les «disparus». Cette commission sera composée de cinq à six historiens de chaque côté, avec «peut-être de premiers travaux d'ici un an, que nous jalonnerons ensuite avec des gestes communs», a esquissé Emmanuel Macron. «On va leur ouvrir la totalité des archives (..) Le président algérien m'a dit: j'ouvre aussi les miennes», a-t-il indiqué. Le président français a aussi insisté sur l'importance de ce travail de mémoire pour permettre aux deux pays d'avancer. «La France ne peut pas avancer sans avancer sur ce sujet, l'Algérie non plus», a-t-il dit.