De quoi et de qui a-t-on peur, afin d'appliquer les lois de la République? Béjaïa est l'une des rares wilayas où l'impunité permet tous les dépassements. Sinon, comment expliquer l'hésitation des autorités locales à passer à l'action, à l'instar des autres wilayas d'Algérie où des opérations de démolition des constructions illicites sont effectuées sans la moindre hésitation? Qu'on se le dise, à Béjaïa, les constructions illicites sont loin d'être une denrée rare! Le territoire de Yemma Gouraya compte des dizaines, voire des centaines de permis de démolition mais qui échappent, curieusement, à cette décision des hautes autorités du pays, visant à mettre fin à l'anarchie qui gangrène le secteur de l'habitat et de l'urbanisme. Il n'est pas exagéré d'affirmer que Béjaïa est l'une des wilayas les plus touchées par cette gangrène du squat du foncier, relevant aussi bien du domaine public que du domaine privé de l'Etat. En témoigne la dénaturation totale de toute la côte ouest de la commune du chef-lieu, ainsi que du littoral des deux communes limitrophes, Toudja et Beni Ksila. Des dizaines de constructions sont érigées au vu et au su des autorités locales chargées de lutter contre le squat du foncier. De qui a-t-on peur? Pour désigner cette faune, la vox populi, à Béjaïa, use du terme: «les intouchables». Un qualificatif approprié puisque la mafia du foncier, connue de tous, agit à visage découvert. Elle défie tout le monde, sans exception les autorités judiciaires, les différents services de sécurité, les autorités locales et les instances élues. Autrement dit, elle agit en toute impunité. Les procédés de cette mafia sont simples. Elle sorti les parcelles de terrain des domaines forestiers, puis entame le défrichement, qui passe inéluctablement par des incendies provoqués pour arriver à la prochaine étape relative au lancement de la procédure administrative en vue de l'obtention d'un certificat de possession au niveau de la commune territorialement compétente. Ce qui explique, en somme, les départs de feu simultanés en zones urbaines, sur les côtes ouest et est de la wilaya à une période bien précise. Il est tout à fait démontré, prouvé et même enregistré, que les incendies de forêt de ces dernières années, sont l'oeuvre d'une entreprise criminelle... dont fait partie cette mafia du foncier. En dépit des efforts inlassables de la Conservation des forêts, des Domaines largement appuyés par les services de sécurité pour mettre fin à cette situation d'impunité, la réalité du terrain est tout autre. Tous les efforts de ces structures sont malheureusement anéantis par les pratiques de cette mafia qui gangrène les rouages de l'administration. Elle s'attaque, sans retenue, aux massifs forestiers, au domaine maritime, aux différents parcs nationaux, même aux espaces verts du domaine urbain, sans aucun respect pour l'état et pour la communauté. À l'exemple des autres wilayas, notamment les wilayas côtières, de grandes superficies de terrains du domaine public et privé de l'Etat ont été détournés pour être revendus à des particuliers. La côte ouest de Béjaïa (Tazeboujte, Boulimat et Saket) est un exemple illustrant la gravité de la situation. Pourtant, des centaines de permis de démolition ont été établis par les autorités locales, mais rien n'a été fait. Sans cesse, des constructions illégales poussent comme des champignons. On a érigé des bidonvilles en béton sur l'une des meilleures côtes d'Algérie. Où allons-nous avec ces comportements? Cette camarilla est-elle à ce point intouchable au point d'imposer son diktat et défier l'Etat? Qui la protège? Qui sont les commanditaires? À quand la fin de cette impunité? Béjaïa n'est pas au-dessus de la loi. Elle ne sera pas. Il appartient aux autorités de l'appliquer, et dans toute sa rigueur...