La révélation n'est pas passée inaperçue, d'autant que le représentant du Front Polisario en France, Mohamed Sidati, sait parfaitement de quoi il parle. Les récentes révélations autour du Marocgate qui ont secoué le Parlement européen où des réseaux de corruption au profit du Makhzen ont été démantelés par la justice belge ne sont que «la partie émergée de l'iceberg», affirme-t-il. Le vaste complot marocain inclut, en effet, un certain nombre d'autres eurodéputés ainsi que des institutions européennes dont on n'a pas encore entendu parler. Dans un entretien avec l'APS, Sidati souligne que le scandale a permis au Makhzen d'imposer «une sorte de statu quo sur la question du Sahara occidental» et, principalement, sur les accords illégaux entre l'UE et le royaume du Maroc portant sur les exportations de produits détournés et le pillage systématique des ressources du territoire sahraoui. Il est clair que l'instrumentalisation des eurodéputés corrompus, faciles à manipuler, a permis au Makhzen de voir tous ses stratagèmes pour défendre l'indéfendable aboutir sans trop de vagues. L'activisme des obligés du royaume marocain aura été tel qu'il a également porté un préjudice grave à la cause sahraouie et, notamment aux militantes et militants du Front Polisario, confrontés à une répression féroce au mépris des droits de l'homme les plus élémentaires. Et c'est surtout dans ce registre que leur zèle aura été le plus profitable puisque le Parlement européen, contrairement à son discours, en apparence intransigeant sur le respect des droits humains, aura pudiquement fermé les yeux, des années durant, sur les abus et les méfaits du Makhzen, fort d'un silence en définitive complice et donc convaincu de pouvoir user de tous les dépassements. Pourtant, une grande partie des eurodéputés reste attachée à la défense des droits légitimes du peuple sahraoui, mais encore faut-il qu'ils puissent outrepasser le mur de la honte érigé par les mercenaires du Makhzen jusque dans les allées de Strasbourg et de Bruxelles. Consciemment ou inconsciemment, leur position, dira Sidati, a été « déviée» et il cite, à titre d'exemple, l'implication des Commissions des Affaires étrangères, des droits de l'homme, de la pêche et de l'agriculture dont on sait qu'elles constituent l'épine dorsale du colonialisme marocain au Sahara occidental. Le travail méritoire des enquêteurs et de la justice belge viendra-t-il à bout de l'hydre marocaine, la question est entière et elle mérite d'être posée. Car elle suppose que soit examinée en profondeur toute la mécanique du Parlement européen et des autres institutions de Bruxelles afin d'en discerner les tenants et les aboutissants. En visite à Rabat, Josep Borrell a dit au MAE Bourita que l'instance européenne prône une «tolérance zéro» en matière de corruption. La vraie réponse viendra, sans doute, des changements attendus en ce qui concerne la légitime revendication du peuple sahraoui de son droit à l'autodétermination, ainsi que le stipulent les résolutions de l'ONU et les dispositions acceptées par le Makhzen en 1991, lors de l'accord de cessez-le-feu.