Des heurts ont opposé des groupes de jeunes et les forces de sécurité guinéennes jeudi dans la banlieue de Conakry où l'opposition appelait à manifester malgré l'interdiction de tout rassemblement par l'autorité de transition au pouvoir, ont rapporté les médias locaux et internationaux. Plusieurs quartiers situés le long de la route Le Prince qui traverse la banlieue ont été le théâtre de confrontations répétées entre des groupes mobiles lançant des pierres et dressant des barricades sur la route, et des gendarmes et des policiers tâchant de les disperser à coups de lacrymogènes. Des coups de feu ont été entendus. Le Front national de défense de la Constitution (FNDC), collectif de défense des droits qui avait appelé à manifester, «déplore une trentaine de personnes blessées, dont certaines par des tirs à balles réelles, et dénombre aussi de nombreuses arrestations», a-t-il dit dans un communiqué jeudi après-midi. Les autorités n'ont pas communiqué publiquement sur ces incidents. Plusieurs journalistes et témoins ont rapporté la présence de soldats dans l'important dispositif sécuritaire, accréditant les informations sur les réseaux sociaux selon lesquelles les autorités avaient fait appel à l'armée. Le recours à l'armée est «une situation préoccupante pour nous dans la mesure où nous ne comprenons pas ce qui peut justifier une telle décision», a dit le porte-parole de l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'homme (OGDH), Alseny Sall. Le FNDC avait appelé à une marche pour réclamer la libération de trois de ses responsables et de tous les autres prisonniers détenus pour des raisons selon lui politiques, ainsi qu'un retour rapide des civils au pouvoir. Les principaux partis, quasiment réduits à l'inaction, avaient appelé à la mobilisation. La Guinée est dirigée depuis septembre 2021 par une autorité de transition qui a pris le pouvoir le 5 septembre 2021, à la faveur d'un des putschs qu'a connus l'Afrique de l'Ouest depuis août 2020. Les dirigeants ont interdit toute manifestation depuis 2022. Ils ont également prononcé la dissolution du FNDC. Les nouvelles autorités conduites par le colonel Mamady Doumbouya se sont engagés à céder la place à des civils élus au terme d'une période au cours de laquelle elles disent vouloir mener de profondes réformes. Elles ont consenti sous la pression de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) à limiter cette période transitoire à deux ans à partir de janvier 2023. L'opposition accuse l'autorité de transition de confisquer le pouvoir et de faire taire toute voix discordante à coup d'arrestations de leaders politiques ou de la société civile, et d'enquêtes judiciaires. Les grands partis refusent le dialogue avec elle sur le contenu de la période dite de transition dans les conditions fixées par les autorités.