Jamais l'armée israélienne n'a été confrontée à une résistance telle celle opposée depuis un mois par le Hezbollah. Selon la chaîne satellitaire Al-Jazeera, onze soldats israéliens ont été tués hier dans les violents combats qui opposaient les miliciens du Hezbollah à l'armée israélienne, quatre ont été tués dans les villages frontaliers de Aïta al-Chaab et Taibé et sept autres lors d'affrontements au village de Debel, mais la chaîne qatarie n'apporte pas de précisions sur les circonstances de la mort des soldats israéliens. Le fait est que le chiffre des pertes militaires israéliennes demeure incertain du fait que l'état-major israélien maintient une censure drastique sur le déroulement des affrontements et sur les pertes dans les rangs israéliens. Selon les chiffres livrés parcimonieusement il y aurait eu, depuis le début du conflit le 12 juillet dernier, 36 civils israéliens tués et 63 militaires morts au combat non compris les soldats morts hier, montrant que le Hezbollah vise plus les militaires que les civils. Or, c'est le contraire qui est vrai au Liban où l'écrasante majorité des victimes sont des civils, près de 1100, alors qu'une soixantaine de miliciens du Hezbollah ont été tués de même que 30 gendarmes et soldats libanais -qui ne prenaient pas part au combat- tués lors de raids contre leurs casernes par l'armée israélienne. Au vu de ces chiffres, le Hezbollah combat l'armée israélienne, alors que cette dernière s'est, jusqu'ici, surtout acharnée sur des cibles civiles et sur les infrastructures du Liban, par la destruction de ponts, de routes, d'usines et de centres de production, cibles civiles, économiques et sociales, invariablement qualifiées «d'objectifs terroristes» par Israël. Cependant, malgré le déluge de feu qui tombe sur le Liban, depuis 29 jours, les Katioucha et les lance-roquettes antichar RPG des miliciens du Hezbollah ont fait des ravages et causé des dommages tant civils que militaires à l'armée la plus moderne et la plus puissante du Moyen-Orient. Israël a lancé son offensive contre le Liban le 12 juillet avec comme objectif de «li-bérer» les deux soldats israéliens capturés par le Hezbollah. Mais qui peut encore croire à cette fable au vu des destructions systématiques et délibérées du Liban? De fait, en dépit du déploiement de 10.000 soldats au Sud-Liban, Israël n'a réussi ni à retrouver les deux soldats, au nom desquels le pays du Cèdre est en train d'être détruit, ni neutraliser et encore moins démanteler le Hezbollah comme elle en avait eu l'intention. La résistance du Hezbollah, sa riposte du tac au tac a quelque peu désarçonné l'état-major israélien et ébranlé les certitudes de l'invincibilité de Tsahal. Le général Udi Adam, commandant en chef de la région militaire du nord d'Israël, rendu coupable de la tournure des événements -pour la première fois depuis des décennies, l'armée israélienne est tenue en échec par des miliciens qui ne disposent pas du millième de la puissance de feu de Tsahal- semble devoir payer l'addition, en étant remplacé par son adjoint, le général Kaplinski. Un limogeage qui en dit long sur les doutes qui travaillent l'état-major israélien. Mais, Israël n'a tiré aucune leçon des précédents de l'occupation de longue durée, voulant toujours instaurer une «zone de sécurité» au long de la ligne bleue -frontière internationale entre le Liban et Israël- et jusqu'à la rivière Litani, jusqu'à la «relève» de l'armée israélienne par une force multinationale qui, dans l'esprit des politiques et des militaires israéliens, doit servir de cordon sanitaire et de force d'appoint supplétive à l'armée israélienne. De fait, les responsables israéliens ne cessaient de répéter qu'une évacuation ne «sera possible que lorsque nos objectifs seront réalisés», référence au désarmement du Hezbollah, par l'application complète de la résolution 1559 (de septembre 2004) du Conseil de sécurité, ou par la défaite de l'organisation chiite et sa neutralisation par l'armée israélienne. Mais la donne militaire et stratégique semble avoir, sinon changé, du moins, a évolué contraignant Israël à revoir ses plans. De fait, malgré la puissance de feu de son armée, Israël n'a plus la marge de recul nécessaire pour faire plier les gens et les évènements à son diktat. Face aux difficultés éprouvées à rester maîtres du terrain, les Israéliens ont décidé d'étendre le champ des combats. C'est ainsi que le cabinet de sécurité israélien, élargi à de hauts responsables de l'armée, a donné hier son feu vert à l'extension des opérations terrestres au Liban-Sud. Cette décision a été annoncée par le ministre du Commerce, Eli Yichaï, qui a déclaré à la radio publique israélienne que «les plans en vue de l'extension des opérations au Liban du ministère de la Défense et du chef d'état-major ont été approuvés par le cabinet de sécurité». Israël qui veut imposer «sa paix» aux Libanais, menace dès lors la région de nouveaux carnages et de fleuves de sang, en perspective, remettant en cause, les efforts fournis, par ailleurs, pour parvenir à un cessez-le-feu.