Les déficits que traînent les hôtels gérés par le groupe français Accor, le Sofitel et le Mercure, mettent en doute les capacités de ce groupe à garantir ses investissements en Algérie. Reçu en grande pompe par le chef du gouvernement, Ali Benflis, le co-directeur fondateur du groupe Accor, Gérard Pelisson, a fait miroiter des investissements importants dans le secteur du tourisme. Or, il semble que les gestionnaires algériens du secteur n'ont pas suffisamment et convenablement informé le Chef du gouvernement sur les dix années d'activité de ce groupe en Algérie et sur ses «performances». Si la politique touristique de l'Algérie doit marquer «la volonté d'ouverture de notre pays sur le monde», il convient de poser la question: qu'a apporté ce groupe (Accor) à l'hôtellerie et au tourisme en Algérie dans sa gestion des deux hôtels Sofitel et Mercure? Selon nos sources, l'acquisition de cet hôtel par Accor et qui a coûté au Trésor, environ 30 millions de dollars, a été scellée dans un contrat sur mesure, et sans que le groupe investisse le moindre centime. En effet, selon ces sources, le contrat offrait tous les avantages à Accor, notamment la sélection du personnel et les salaires payés sur le chiffre d'affaires - à titre d'indication, le directeur de cette filiale «toucherait une mensualité avoisinant les 800.000 DA!». En dix ans d'activité, sur un site offert clés en main, ne souffrant d'aucun problème de parking et d'aucune concurrence (durant les années 90), la filiale Sofitel récolte un découvert bancaire de dizaines de milliards de dinars. Evidemment, le groupe n'est nullement concerné par ce déficit. Spécialisé dans le management et le savoir-faire en hôtellerie, ce groupe a ramené le risque de ses pertes au degré zéro. A ce propos, dans l'une des clauses du contrat d'acquisition de Sofitel, «il a été stipulé que même les indemnités de licenciement seront prises en charge par la société mère, à savoir l'EGT-Centre». Des spécialistes dans l'hôtellerie indiquent que le management n'apportera rien sans l'apport d'un investissement serein et conséquent telles l'augmentation de la capacité de lits et la formation du personnel. L'on croit savoir également qu'aucune extension n'a été faite au Sofitel. Pour la formation du personnel, une seule équipe aurait géré la structure pendant une décennie, pourtant nos sources rapportent qu'à travers les milliers d'hôtels dont dispose ce groupe à travers le monde, les gestionnaires n'ont jamais dépassé cinq ans. Cette «anomalie» a amené nos interlocuteurs à s'interroger si «le fait de garder le même staff dirigeant pendant dix ans n'est pas motivé par le souci de camoufler l'énorme déficit» et ce, au détriment de la clause du contrat stipulant la formation, le recyclage et la préparation des cadres algériens qui devraient assurer la gestion de l'hôtel cinq ans après. Soit en 1995, cinq années après son ouverture officielle. L'épisode de l'hôtel Mercure est presque le même, sauf que dans ce cas, les Chinois en ont payé les frais. Il semblerait que l'idée de la construction de cet hôtel remonte à l'époque Mao-Boumediene. Le projet, relancé à la fin des années 80, a été totalement pris en charge par les Chinois. Le site leur serait imposé (bidonvilles, cimetière de la RSTA, décharge de Oued S'mar...). Après avoir sacrifié deux de leurs éléments (attentats terroristes), plusieurs véhicules (volés) et déboursé des millions de dollars pour le drainage et l'assèchement du site, ils ont dû abandonner les travaux pendant deux ans, à cause d'une rumeur faisant état de sa privatisation. C'est après la visite de l'ex-chef d'Etat Liamine Zeroual, à Pékin que le projet a été relancé. Zeroual aurait rassuré les Chinois que l'hôtel ne serait pas privatisé. Quelques années plus tard, l'Algérie offre le Quatre étoiles haut standing au même groupe (Accor ndlr), avec les mêmes clauses du contrat que celle de la filiale Sofitel. Une question se pose alors: pourquoi l'EGT-Centre a-t-elle choisi le même groupe? Si c'est dans le souci de promouvoir l'hôtellerie et le tourisme, que sont devenues les structures de Hammam-Melouane, Tikjda, Tamgout (Yakourène)... sans parler du sort des travailleurs de ces malheureuses structures. On croit savoir également qu'un accord de principe serait établi entre l'EGT-Centre et ce même groupe à propos de l'hôtel Albert-1er, et il serait même question de supprimer le restaurant. Cela intervient après les différents échecs du groupe Accor pour acquérir l'hôtel Es-Safir, très convoité par sa position hautement stratégique (entre les deux Chambres parlementaires, au coeur d'Alger) et par son passé prestigieux. Ainsi, le partenariat qui se dessine avec Accor doit, pour une fois, respecter des clauses plus strictes en termes de privatisations d'hôtels qui ne se feraient pas sur le compte du Trésor algérien. Cela pose également le problème de la diversification des partenaires dans le tourisme lorsqu'on sait que le prince saoudien Khaled Ibn Tallal, cinquième fortune mondiale, avait eu son offre imbattable sur l'hôtel Mercure écartée au profit des «investisseurs» français.