Les pourparlers en Arabie saoudite entre les généraux soudanais en guerre n'ont pas débouché sur des «progrès majeurs» pour l'instant, a affirmé hier un diplomate saoudien, refroidissant les espoirs d'une trêve après trois semaines de combats meurtriers. Le chef de l'armée soudanaise, Abdel Fattah al-Burhan, et son rival Mohamed Hamdan Daglo, à la tête des forces paramilitaires de soutien rapide (RSF), ont dépêché samedi leurs représentants à Jeddah, ville saoudienne aux bords de la mer Rouge, pour des négociations qualifiées de préliminaires par Washington et Riyadh. L'objectif est de parvenir à «un arrêt effectif à court terme» des hostilités, de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, de rétablir les services essentiels, et d'établir «un calendrier de négociations élargies» visant à mettre fin au conflit de façon permanente, a affirmé lundi le ministère saoudien des Affaires étrangères dans un communiqué. Les deux parties ont commencé à «discuter des mesures de sécurité à prendre pour faciliter l'accès urgent à l'aide humanitaire et restaurer les services essentiels», a-t-il ajouté. Le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths, est arrivé dimanche à Djeddah pour aborder «les questions humanitaires liées au Soudan», selon son porte-parole. Il a «demandé à participer aux négociations», mais sa demande n'a pas encore abouti, a affirmé un autre fonctionnaire de l'ONU, lui aussi requérant l'anonymat. Plusieurs «cessez-le-feu» ont été violés dans les minutes suivant leur annonce depuis le début le 15 avril des hostilités au Soudan qui ont déjà fait environ 700 morts, selon une ONG. L'ONU parle de son côté de 335 000 déplacés et 117 000 réfugiés. L'Arabie saoudite a joué un rôle de premier plan dans les opérations d'évacuation du pays, transportant des milliers de civils depuis la ville côtière soudanaise de Port-Soudan vers Djeddah. Dimanche, le roi Salmane d'Arabie saoudite et le prince héritier Mohammed ben Salmane ont débloqué 100 millions de dollars (90,5 millions d'euros) pour fournir une aide médicale et soutenir les déplacés au Soudan, a rapporté l'agence de presse officielle saoudienne SPA. Lors d'une rencontre dimanche à Djeddah, le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a remercié le prince Mohammed, dirigeant de facto du royaume, «pour le soutien apporté par l'Arabie saoudite aux citoyens américains pendant l'évacuation du Soudan», selon un communiqué de la Maison-Blanche. Les combats font toujours rage et à Khartoum, cinq millions d'habitants vivent pour la quatrième semaine consécutive barricadés chez eux, par peur des balles perdues. Sans eau ni électricité, avec des stocks de nourriture quasiment à sec et de moins en moins d'argent en poche, ils survivent sous une chaleur écrasante grâce à des réseaux de solidarité entre voisins et proches. Les «pré-discussions» sont uniquement «techniques», préviennent depuis plusieurs jours les négociateurs soudanais et internationaux. Elles ne concernent aucun volet politique dans un pays en plein marasme depuis le putsch des deux généraux en 2021. Elles se limiteront, assurent les experts, à dégager des corridors sécurisés pour l'aide humanitaire qui arrive sur la côte est, à Port-Soudan, afin de nourrir et de soigner les civils pris au piège à Khartoum et au Darfour, dans l'ouest frontalier du Tchad. Washington et Riyadh semblent avoir pris l'ascendant puisque les deux généraux ont envoyé des proches négocier à Jeddah. Mais dans les deux camps, les émissaires choisis sont connus de longue date pour leur hostilité notoire à l'autre partie. En parallèle, l'Union africaine -qui a suspendu le Soudan en 2021 et n'a donc plus de grands leviers de pression- et l'Igad, le bloc régional d'Afrique de l'Est dont fait partie le pays, tentent de revenir à un format de discussions sous l'égide du président du Soudan du Sud, Salva Kiir. La Ligue arabe, elle, a dû se contenter dimanche d'un consensus a minima, ses pays membres appelant à préserver la «souveraineté» du pays et à cesser les hostilités. Car ses poids lourds ne sont pas sur la même ligne: l'Egypte soutient l'armée tandis que les Emirats arabes unis appuient le général Daglo. L'Arabie saoudite, elle, soutient de longue date les deux, rappellent les experts. À Djeddah, Riyadh plaide donc pour «un arrêt effectif à court terme» des hostilités, la facilitation de l'acheminement de l'aide humanitaire et le rétablissement des services essentiels, selon le ministère saoudien des Affaires étrangères. Le royaume saoudien espère également «un calendrier de négociations élargies» visant à mettre fin au conflit de façon permanente. Jusqu'ici, les nombreux cessez-le-feu promis ont été violés dans les minutes suivant leur annonce. L'ONG ACLED dénombre déjà plus de 750 morts, les autorités soudanaises 5 000 blessés et l'ONU 335 000 déplacés et 117 000 réfugiés. En pleine crise économique, l'Egypte a déjà accueilli plus de 60 000 réfugiés soudanais. Elle a dépêché lundi son chef de la diplomatie chez d'autres voisins du Soudan, le Tchad et le Soudan du Sud, qui ont aussi reçu plus de 57 000 personnes fuyant la guerre, selon l'ONU.U.