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Pourquoi faire?
UNE ORGANISATION DES PAYS EXPORTATEURS DE GAZ NATUREL
Publié dans L'Expression le 17 - 08 - 2006

«En politique, rien n'arrive par hasard. Chaque fois qu'un évènement survient, on peut être certain qu'il avait été prévu pour se dérouler ainsi». Franklin D. Roosevelt ( Président des Etats-Unis 1933-1945).
Un thème récurrent depuis plusieurs années est la possibilité de mettre en place, à l'instar de l'Opep, une organisation des pays exportateurs de gaz naturel Opegn. Il faut raison garder pour plusieurs raisons: l'Algérie est un petit producteur, à peine 2% de la consommation mondiale de gaz naturel. Elle a, à l'échelle des géants du gaz, des réserves très modestes: 4000 milliards de m3 (7e place) sur un total de réserve évalué à 160.000 milliards de m3 soit à peine 2,5% (sixième réserve mondiale). Elle est donc de loin un petit producteur. Quatrième dans le monde pour ses exportations, derrière la Russie, le Canada et la Norvège, avec 60 milliards de mètres cubes par an. L'Europe importe près de 60 milliards de m3 en provenance de l'Algérie, 50 milliards de la Norvège et près de 130 milliards de m3 de la Russie.
Les besoins en énergie de l'Europe
Les politiques des Etats européens peinent à se fédérer. La Commission européenne a lancé le débat sur une future politique européenne commune dans le domaine de l'énergie en publiant un «Livre vert» en mars 2006. Elle suggère, entre autres, d'achever l'ouverture des marchés européens du gaz et de l'électricité, d'intensifier les relations avec les principaux fournisseurs d'énergie comme la Russie et l'OPEP, ainsi que l'utilisation des énergies renouvelables, l'efficacité énergétique et la recherche sur les technologies pauvres en carbone. Cependant, les Etats membres de l'UE ont déjà clairement fait savoir qu'ils ne tolèreraient aucune atteinte à leur souveraineté nationale, notamment en ce qui concerne des choix politiques délicats comme celui de l'énergie nucléaire.(1).
La hausse des prix du pétrole et du gaz, la dépendance accrue de l'Europe vis-à-vis de certains fournisseurs étrangers (essentiellement la Russie et l'OPEP) et l'urgence du réchauffement climatique ont relancé le débat sur la nécessité d'une politique énergétique européenne. Le conflit entre la Russie et l'Ukraine sur le gaz en janvier 2006 a souligné la dépendance de l'Europe à l'égard des importations énergétiques et la difficulté de maintenir 25 politiques distinctes faisant appel à des fournisseurs étrangers dans ce domaine. Le 8 mars 2006, la Commission a publié un ‘‘Livre vert'' exposant les options permettant de rendre l'approvisionnement énergétique dans l'UE «sûr, compétitif et durable». Le livre énumère six domaines prioritaires dont, notamment, une politique extérieure commune en matière d'énergie afin de coordonner les relations avec les fournisseurs étrangers comme la Russie et les pays de l'OPEP. Plusieurs pays ont confirmé leur position selon laquelle l'UE ne doit pas empiéter sur leur souveraineté nationale, notamment en ce qui concerne le choix du bouquet énergétique. Le sommet de Hampton Court a été l'occasion de prendre des mesures sur les points suivants: La diversification des sources énergétiques -tant externes qu'«indigènes» comme le nucléaire- et les itinéraires de transport, dont des investissements dans de nouveaux terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL); Une approche commune pour gérer les situations de crise «dans un esprit de solidarité». Le développement des marchés régionaux de l'électricité et du gaz au sein de l'UE. Le développement d'interconnexions électriques afin d'atteindre l'objectif «d'au moins 10% de la capacité de production des Etats membres». «Envisager d'accroître, d'ici à 2015, la part des énergies renouvelables» à 15%...
Dans sa tentative de diversifier ses sources d'approvisionnement et de réduire la dépendance énergétique de l'UE à l'égard de la Russie, l'Europe a financé un gazoduc, le projet Nabucco à partir de la région caspienne. Ainsi le lundi 26 juin 2006, le commissaire européen à l'Energie, Andris Piebalgs, a signé un accord commun avec les ministres des pays de transit, la Turquie, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et l'Autriche. Ce nouveau gazoduc de 3400 kilomètres traverse le sud-est de l'Europe. Il permettrait, à partir de 2012, de transporter du gaz en provenance de l'Iran, l'Azerbaïdjan et le Turkménistan.
La Russie dispose de 27% des réserves mondiales en gaz, ainsi que d'énormes champs de pétrole. Elle est le principal fournisseur de l'UE des 25 en hydrocarbures (la moitié des importations de l'UE en gaz et un tiers des importations en pétrole viennent de Russie). Le bras armé du Kremlin : le groupe Gazprom, détient 25% des réserves mondiales en gaz et produit 94% du gaz russe et 16% de la production mondiale, approvisionnant un quart du marché européen par le biais de l'Ukraine et de la Biélorussie. Les réserves sont un peu inférieures à celles de l'Arabie Saoudite et de l'Iran mais supérieures à celles de l'Irak et du Koweït. La production de Gazprom équivaut à 10,3 millions de barils/j de pétrole. La Russie exporte l7 millions de barils/j. 85% de ces exportations est à destination de l'UE.
L'UE est le principal partenaire économique de la Russie. La vente de ses matériaux bruts à l'UE représente des investissements étrangers de plus de 40% du budget fédéral. Le commerce bilatéral a représenté 96,55 milliards d'euros en 2004. Plus de 60% des recettes à l'exportation de la Russie proviennent de l'énergie, la plupart sous forme d'exportations vers l'UE. La Russie est donc aussi dépendante de l'UE que l'UE de la Russie. La dépendance énergétique de l'Europe doit augmenter dans les années à venir en raison de la baisse de production de la mer du Nord. Selon les prévisions officielles, l'UE importera plus de 70% de son énergie d'ici 2030. Lancé lors du Sommet de l'UE avec la Russie à Paris en octobre 2000, le dialogue énergétique bilatéral avait pour objectif de sécuriser l'accès de l'Europe aux importantes réserves en gaz et en pétrole de la Russie. Pour l'UE, la Russie est le principal fournisseur extérieur en gaz naturel et pétrole. Malgré les cinq ans de coopération fructueuse dans le cadre du dialogue, l'Europe selon les experts, est toujours dans l'attente d'une véritable avancée. Les relations entre l'UE et la Russie dans le domaine de l'énergie restent très liées aux négociations plus générales entre l'UE et la Russie sur les «quatre espaces» (économie, juridique, sécurité et recherche) pour lesquels les progrès sont lents. Entre-temps, on constate davantage des relations bilatérales entre la Russie et les Etats membres de l'UE qu'une approche européenne précise.(2).
L'alliance de deux de ses principaux fournisseurs de gaz, les compagnies russe Gazprom et algérienne Sonatrach, préoccupe une Europe consciente de sa dépendance énergétique, mais les experts estiment que ses contours demeurent flous et le risque de cartel lointain. Le président du groupe ENI, Paolo Scaroni, l'a qualifié de «jonction préoccupante». La puissance de Gazprom est fréquemment perçue comme une menace dans une Europe de plus en plus dépendante de l'extérieur. Ce qui a le plus attiré l'attention en Europe, c'est le mot commercialisation, c'est-à-dire le risque de cartel. Rien n'indique pour l'instant que les deux pays étudient la création d'une «Opep du gaz», à rapprocher de l'Opep
Parmi les indices relevés par les experts, la visite que le président Poutine a effectuée en mars 2006 à Alger -En dépit de sa brièveté- s'est avérée très fructueuse. Des ententes concrètes sur la coopération dans le secteur énergétique ont été énoncées. La visite du président russe a matérialisé les ententes intervenues en janvier 2006. Plus le gaz naturel devient un objet du commerce mondial et plus son rôle grandit en tant que facteur de développement durable. Le poids de la Russie ne cesse de croître. Sur le plan pratique, il est parfaitement possible que le Forum international des pays exportateurs de gaz, fondé en 2001 et dont le rôle est encore consultatif, pourrait bientôt se transformer en «OPEP du gaz», à la tête de laquelle on trouverait assurément la Russie. Les experts sont arrivés à l'idée d'une OPEP du gaz probablement après que la Russie ait examiné avec le Kazakhstan et le Turkménistan divers aspects de la politique gazière. «Les prix du gaz sur le futur marché intégré seront fixés par la Russie», estiment les auteurs d'un rapport préparé conjointement en 2005 par les universités de Stanford et de Houston. A la mi-novembre 2005, le Kazakhstan et la Russie ont conclu un accord concernant le transit du gaz turkmène et ouzbek. Ce qui signifie de facto que les ressources des trois républiques sont contrôlées par Gazprom.
Une Opep bis?
L'Italie et la France craignent que la Russie et l'Algérie constituent un cartel des producteurs de gaz. Les deux pays en appellent à la «vigilance» de l'Europe. «Une entente entre Gazprom et Sonatrach, qui va de la fixation des prix et des quantités à livrer jusqu'à l'exploration et l'exploitation de nouveaux gisements, ne peut que susciter la préoccupation», a expliqué Alessandro Ortis, le président de l'Autorité pour l'énergie dans un entretien au quotidien Sole 24 Ore. La France partage aussi la même inquiétude. Les experts pensent qu'il s'agit d'une étape importante, pour eux et malgré ses démentis, la Russie cherche à créer une OPEP Bis ou une Mega OPEP dont l'objectif est de contrôler les routes de transit des hydrocarbures vers l'Europe. La Turquie est activement courtisée par la Russie, et si elle rejoint le bloc Russe, l'Europe se trouvera alors piégée et devra composer avec les pays membres de cette Alliance ou connaître un revers économique sans précédent lié à un choc énergétique inimaginable décidé par la Russie, l'Iran, l'Algérie, le Venezuela. En s'alliant à l'Iran, la Russie a mis un veto à la construction d'un pipeline subaquatique dans la Caspienne afin d'empêcher une liaison directe entre le Kazakhstan et la Turquie via l'Azerbaïdjan. A l'heure où le Kremlin décide l'entrée à la City de Londres de 49% de Rosneft (un Gazprom version pétrole), où les Européens se rendent compte de leur dépendance au gaz russe et que les déclarations de Dick Cheney et de Vladimir Poutine rappellent le temps de la Guerre froide, un petit cadrage s'impose concernant la stratégie de Gazprom, bras armé du renouveau géopolitique et géoéconomique russe. La Chine, devenue en 2004 le second pays consommateur d'énergie après les Etats-Unis, s'est vue, elle, promettre une place de choix dans les projets à long terme de la Russie. Gazprom s'intéresse aussi aux réseaux de distribution d'Europe occidentale. Il est actionnaire à 35% de la société allemande de distribution de gaz Wingaz. Gazprom a également annoncé vouloir assurer 10% de la distribution du gaz en France et une partie du capital de British Gaz. Les divergences entre Etats restent profondes sur la manière de dialoguer avec Moscou. Le gouvernement polonais de Lech Kaczynski a d'ailleurs proposé l'idée d'«un Otan de l'énergie» face à la Russie. (3).
En dépit de son expérience, la Sonatrach n'a ni la capacité technologique ni les moyens financiers des sociétés pétrolières multinationales: son seul avantage comparatif actuel est qu'elle est l'intermédiaire obligatoire entre l'Etat algérien et ces sociétés. La loi de 2005, qui heureusement a été amendée, ferait grimper la participation de toute entreprise pétrolière étrangère, à 70%, 80%, voire 100%. C'est dire si nous revenons de loin. Pour la petite histoire, les mêmes laudateurs pour la loi à l'époque se retrouvent maintenant les premiers à vanter les vertus de la loi remaniée. Quand la compétence est indexée sur l'allégeance. Sous toutes les latitudes, sous tous les régimes, le pétrole et le gaz sont considérés comme vecteurs stratégiques, vitaux que l'Etat doit préserver et contrôler. Le moment est venu pour que les grandes décisions qui engagent le pays soient sous-tendues par des études fines bien documentées pesant le pour et le contre, constamment actualisées pour éviter les décisions insuffisamment mûries, s'agissant à titre d'exemple de notre politique pétrolière, manque de visibilité. Avec leur meilleure compétence, et leur expérience, ceux qui ont en charge le destin technologique, scientifique et économique du pays ne peuvent faire l'économie de Centres de Recherches Stratégiques. Nous appelons de nos voeux la mise en place d'un centre de recherche sur l'énergie, il aura notamment à faire le point du poids réel du pays dans le domaine de l'énergie à l'échelle internationale. C'est de notre point de vue une vue de l'esprit, car les membres éventuels de cette Opegn ont des ambitions, voire des stratégies aux antipodes l'une de l'autre. Il n'y a aucune analogie entre l'Opep fondée en septembre 1960 par cinq pays ayant en commun leur sous-développement rejoints par la suite par des pays au sortir de la colonisation. Des pays détenteurs de réserves de gaz naturel, exception faite des pays du Golfe arabique dont on peut penser que leur stratégie se ramène globalement à s'aligner sur les Etats-Unis, deux pays ont une réelle vision de leur futur énergétique, il s'agit de la Russie de Poutine qui ambitionne un destin planétaire et de l'Iran qui veut s'imposer comme un partenaire incontournable dans le Moyen-Orient. De ce fait c'est une profonde erreur, le pensons-nous, de croire que la création d'une Organisation des pays exportateurs du gaz naturel puisse être d'une quelconque aide à la «politique énergétique de l'Algérie» si ce n'est de servir la vision hégémonique du nouveau tsar du Kremlin qui rêve de faire retrouver à la grande Russie le lustre de l'Union Soviétique, c'est pour lui un moyen de pression pour revenir dans la cour des grands, il a réussi à faire partie du G8 qui se dénommait G7+1. La façon brutale dont il fait montre envers les anciennes républiques, démontre le peu de cas qu'il fait du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ; le meilleur exemple est la Tchéchénie qui se bat depuis deux siècles pour son indépendance-Tolstoï en parlait déjà à son époque- Nul doute que l'Algérie aurait tout à perdre si elle faisait partie de ce club asiatique avec la Russie, l'Iran, le Qatar? Le destin de l'Algérie est méditerranéen et maghrébin avant tout. A elle de renégocier d'une façon juste l'accord avec l'Union européenne. Nul doute qu'une entente des pays du Maghreb serait bénéfique à tous. A nous d'inventer l'avenir des enfants du Maghreb au Maghreb et non pas dans une émigration vers une forteresse gardée par des Ministres de l'intérieur plus féroces les uns que les autres.
1.U.E.: Livre vert sur l'énergie: Quelle politique énergétique pour l'Europe? EuroActiv 18 Juillet 2006.
2.Le dialogue énergétique entre l'UE et la Russie, lundi 19 décembre 2005 ; EuroActiv, lundi 17 juillet 2006.
3.Gazprom, entrisme et contournement, le 20/05/06 http://www.infoguerre.com/


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