L'armée et les paramilitaires en guerre au Soudan se sont «accordés» sur un cessez-le-feu de 24 heures négocié par les médiateurs américain et saoudien, a annoncé hier la diplomatie de la monarchie du Golfe où se tiennent les pourparlers. Cette annonce intervient alors que les précédentes trêves n'ont quasiment jamais été respectées depuis que le conflit a éclaté le 15 avril entre les troupes du général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo.»Les représentants des forces armées soudanaises et les FSR se sont accordés sur un cessez-le-feu dans tout le pays à partir de (samedi) 10 juin à 6 heures, heure de Khartoum», (04H00 GMT), ont annoncé l'Arabie saoudite et les Etats-Unis. Par ailleurs, le gouvernement du Soudan a déclaré jeudi persona non grata l'émissaire de l'ONU dans le pays, l'Allemand Volker Perthes, qu'il accuse depuis plusieurs semaines d'être responsable de la guerre en cours.»Le gouvernement de la République du Soudan a notifié au secrétaire général des Nations unies qu'il a déclaré Volker Perthes (...) persona non grata à compter d'aujourd'hui», a indiqué le ministère soudanais des AE. Perthes se trouvait jeudi à Addis Abeba, en Ethiopie, pour une série d'entretiens diplomatiques. Le général Abdel Fattah al-Burhane, avait réclamé le limogeage du haut diplomate, l'accusant d'être responsable de la guerre. Dans une lettre adressée à l'ONU, il avait notamment accusé Perthes d'avoir «dissimulé» dans ses rapports la situation explosive à Khartoum avant le déclenchement des hostilités. Sans ces «mensonges», le général «Daglo n'aurait pas lancé ses opérations militaires», a-t-il soutenu. Les combats ont éclaté le jour où les deux généraux rivaux devaient se retrouver pour des négociations visant à intégrer les FSR à l'armée régulière, comme le réclamait l'ONU depuis des semaines. Alors que de nombreux observateurs prédisaient un échec de ces discussions, Perthes proclamait son «optimisme». Il a aussi admis avoir été «pris par surprise» le jour où a éclaté la guerre. Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres avait affirmé «son entière confiance» à l'égard de son émissaire. Mais début juin, le Conseil de sécurité n'avait prolongé que pour six mois la Mission intégrée des Nations unies pour l'assistance à la transition au Soudan (Minuats), dont Perthes est le chef. Créée en juin 2020 pour soutenir la transition démocratique au Soudan après la chute d'Omar el-Béchir, la Minuats avait depuis été renouvelée chaque année pour un an. Depuis plusieurs mois, des milliers de personnes soutenant l'armée et les islamistes avaient manifesté contre Perthes et les «ingérences» étrangères supposées. De longue date, les pro-démocratie accusent le général Burhane d'être instrumentalisé par les islamistes du régime d'Omar el-Béchir (1989-2019). Le général Daglo joue d'ailleurs de cette rhétorique: il répète à l'envi combattre «les islamistes» et les «vestiges de l'ancien régime» et se fait le chantre de «la démocratie» et des «droits humains», alors même que ses milliers d'hommes sont accusés d'avoir commis des atrocités pour le compte de Béchir lors de la guerre du Darfour (ouest), dans les années 2000. La guerre au Soudan a fait plus de 1.800 morts, selon l'organisation ACLED. Près de deux millions de personnes ont quitté leurs foyers, selon l'ONU qui estime que 25 des 45 millions d'habitants du pays, l'un des plus pauvres du monde, avait besoin d'aide humanitaire. Les hôpitaux situés dans les zones de combats ne fonctionnent plus que partiellement, quand ils ne sont pas fermés. Et la crise devrait s'aggraver avec l'approche de la saison des pluies, synonyme de recrudescence du paludisme, d'insécurité alimentaire et de malnutrition infantile.