Après un après-midi de la première journée consacrée à la question géopolitique dans ses volets relatifs à la «communication en temps de crise géopolitique animée par Hmida Layachi, suivi de l'intervention du Dr Smail Oulebsir sur «l'intelligence artificielle, maître ou serviteur» et «les aspects géopolitiques du phénomène de drogue» présenté par Djamel Boukrine, la deuxième journée du colloque de Béjaïa autour de la thématique «crises et conflits asymétriques en Afrique, quel rôle pour l'Algérie?», s'est penchée sur la question identitaire dans son volet linguistique. En l'absence du conférencier libyen, ce sont le Tunisien Fathi Benmamer et l'Algérien Brahim Tazaghart qui ont traité respectivement de «tamazight en Tunisie: une richesse qui renforce la culture nationale» et «tamazight, facteur de stabilité et d'intégration nord-africaine» sous la modération de Malika Matoub. Le Tunisien Fathi Benmamer a retracé le parcours de tamazight en Tunisie dont l'ouverture est née après la révolution du jasmin en 2011, tout en déclinant quelques tentatives plus ou moins isolées sous l'ère Bourguiba au milieu des années 1970. Quant au deuxième conférencier, Brahim Tazaghart en l'occurrence, il a inscrit sa thématique plutôt dans l'intégration nord-africaine comme étant un ciment d'union. Pour Brahim Tazaghart afin de bien gérer nos différences, nos richesses culturelles, cultuelles, il est urgent d'inscrire la question linguistique dans un cadre unitaire, démocratique et rassembleur. C'est une condition sine qua non afin de déjouer les perspectives machiavéliques des puissances impérialistes dans leur logique de construction d'Etat ethnique en Afrique, notamment afin de maintenir le continent en éternelle situation conflictuelle. Pour élucider ses propos, Brahim Tazaghart rappelle qu'il existe quelque 7 000 langues à travers le monde pour 195 Etats y compris la Palestine et le Vatican. Le complot ourdi de l'impérialisme occidental s'inscrit dans la perspective de crises ethniques. Leur finalité, c'est la création d'Etat plutôt ethnique. Ils ont plus intérêt à affaiblir l'Inde, à titre d'exemple, qui est une puissance économique montante en la divisant en plusieurs Etats ethniques étant donné qu'il existe quelque 1 200 langues en Inde. Les attaques envers l'Afrique pour la maintenir dans sa désunion et déstabilisation ne s'estompent pas. Mieux, l'incursion de l'entité sioniste sur le continent africain, et notamment son installation sur le territoire marocain est une menace sérieuse sur la stabilité de l'Afrique. À cet effet, les puissances émergentes africaines ont un rôle majeur à jouer dans cette situation afin de déjouer toutes les politiques et tentatives de déstabilisation. «Tamazight doit s'inscrire dans le contexte des crises asymétriques, elle doit être cernée dans le contexte politique africaine des langues. Nous devons réfléchir l'avenir autrement... nous sommes en mesure de regarder le monde avec notre propre regard...», avait-il asséné avant d'ajouter: «Les crises sont certes politiques, économiques...mais elles sont aussi ethniques. Il faut récuser ce concept d'ethnicisme et d'autochtonie qui sont plutôt des facteurs de désunion et de division. On doit faire face tous ensemble à la politique de l'instrumentalisation des conflits internes de nos pays africains dans le but d'alimenter les conflits.... afin de maintenir l'instabilité... puisque la stabilité de l'Afrique avec une prise de conscience de sa jeunesse et de son élite est une menace sérieuse pour les puissances occidentales, notamment la France. Le conférencier citera à titre d'exemple le plan machiavélique mené par le trio Maroc -Sarkozy-Kadafi. Ce dernier qui se prenait pour le roi des rois africains a reçu les membres du congrès mondial amazigh en 2005 dans la perspective du projet de l'autodétermination du peuple touareg. Un plan qui aurait coûté la dislocation voire même la disparition des pays du Sahel sans la vigilance des Etats nations en place. «L'arrière-pensée du soutien à l'autodétermination du peuple touareg était de maintenir l'Afrique sous la botte du colonialisme...», a expliqué Brahim Tazaghart. Pour ce dernier, tamazight ne doit jamais être un instrument pour déstabiliser, mais plutôt un facteur d'union. Cette rencontre a été clôturée par la mise en place d'ateliers avec les étudiants des pays subsahariens sous le thème «L'université, un espace de construction des solidarités africaines.» Un auditoire offert aux étudiants africains pour exprimer leurs visions sur l'avenir du continent et leurs rôles à jouer en qualité de futurs responsables dans leurs pays respectifs. Et un autre atelier qui s'est penché sur la rédaction des recommandations issues des travaux des deux journées. Ainsi, il faut dire que ce premier colloque de Béjaïa sur les crises asymétriques en Afrique, a atteint son but recherché, selon les organisateurs, à savoir «discuter et débattre des problèmes du continent africain».