Par le Dr Mourad Goumiri, pr�sident de l�ASNA (*) [email protected] (2e partie et fin) Dans le V qui dessine nos fronti�res d�extr�me-sud, trois pays ind�pendants (Mauritanie, Mali et Niger) et un annex� (la RASD, ex- Sahara occidental), constituent notre profondeur strat�gique. Le dossier du Sahara occidental m�rite une �tude sp�cifique, qui sort du contexte de cet article mais que nous aurons certainement � mener prochainement, du fait des derniers d�veloppements en Libye. En effet, trop de non-dits et de contrev�rit�s ont �t� distill�s sur ce dossier sans qu�une analyse objective des faits historiques ne vienne alimenter un d�bat s�rieux sur cette question qui empoisonne le Maghreb depuis trente-cinq ans. La Mauritanie, creuset des mondes arabo-berb�re (Maures) et n�gro-africain (39), constitue le maillon faible des pays membres de l�Union du Maghreb arabe. En effet, de Da��t el-Khadra � Che�kria s��tendent quelque 400 km de fronti�res avec l�Alg�rie, avec laquelle elle a v�cu une longue �lune de miel�, suivie d�un �divorce�, consid�r� comme une trahison (40), apr�s la signature des accords de Madrid de 1975, de partage du Sahara occidental avec le Maroc. Devenant la cible privil�gi�e des assauts du Front Polisario, depuis la fronti�re de l�Alg�rie et du Sahara occidental, la Mauritanie va subir une s�rie d��checs militaires qui vont la d�stabiliser jusqu�� son retrait de la partie du territoire qu�elle occupait au Sahara occidental. De coup d�Etat en coup d�Etat, ce pays va se remettre difficilement de cette situation. Si son retrait de la Cedeao en 1999 et la poursuite de son int�gration au sein de l�UMA montrent la volont� du pouvoir de privil�gier l�ancrage arabo-berb�re, elle reste n�anmoins membre d�organisations sp�cifiques comme l�Organisation pour la mise en valeur du fleuve S�n�gal et le Comit� inter-Etats de lutte contre la s�cheresse dans le Sahel. Le gel de ses relations avec Isra�l, en janvier 2009, apr�s plusieurs ann�es de coop�ration, marque son retour dans le concert des nations de la r�gion. Elle tente actuellement de mener une politique d���quilibrisme� entre l�Alg�rie et le Maroc, tout en privil�giant des relations denses avec la France. Le pr�sident mauritanien Abdel Aziz, sous pression, s'est engag�, tout r�cemment, � lutter contre Al-Qa�da (41), par la constitution de forces sp�ciales et la cr�ation d�agences de s�curit�. Il faut cependant noter que les r�gimes pr�c�dents successifs, � l'exception de celui d'Ould-Taya, ont tous �pactis� avec Al-Qa�da, pour �viter tout affrontement direct avec elle et tirer certains avantages personnels. Le Mali occupe une place importante dans cette r�gion, avec la fronti�re la plus longue de 1 100 km et attenant � un espace constitu� de 140 000 km2 de zone rocheuse (Adrar des Iforas), difficile d�acc�s et de contr�le. Cette r�gion est travers�e par des troubles ethniques ancestraux entre Touaregs au Nord (42) et populations noires africaines au Sud, la rendant particuli�rement vuln�rable. Malgr� plusieurs accords sign�s et les bons offices de l�Alg�rie, pour ramener les bellig�rants � la table de n�gociation plut�t qu�� la confrontation, force est de constater que ces efforts sont remis en cause, � chaque fois, ce qui signifie que d�autres int�r�ts s�appliquent � les saborder. Le Mali se pr�sente comme le maillon faible dans cette r�gion subsaharienne (43) qui fait l�objet de toutes les convoitises, luttant � la fois contre le terrorisme de l�AQMI mais �galement contre les �rebelles Touaregs du Nord�. D�s lors, il va, d�une part, tenter de mettre en �uvre une politique d�assistance aux populations frapp�es par la s�cheresse, de satisfaire ses besoins de premi�re n�cessit� et d�acc�s durable aux services sociaux, par la cr�ation d�activit�s g�n�ratrices de revenus, soutenues par l�UE. D�autre part, il renforce le syst�me de la micro-finance, d�veloppe le commerce et les foires hebdomadaires, tente de couvrir les besoins en eau potable par la r�alisation de forages et construit des centres de sant� communautaires ainsi que des �coles. En m�me temps, le Mali essaie de r�cup�rer les armes en circulation et de lutter contre leur prolif�ration (44), de construire des infrastructures publiques pour le r�tablissement de l�autorit� de l�Etat et la s�curisation des populations (la police, la gendarmerie, la garde nationale et l�arm�e). Le d�senclavement des r�gions du nord � travers la construction de routes (notamment la Transsaharienne), dans le cadre d�une coop�ration r�gionale et internationale, font �galement partie du programme. Toutes ces mesures devraient permettre de gagner les populations et de les soustraire � l�emprise des groupes terroristes. A l��vidence, aucun pays de la r�gion sah�lo- saharienne et notamment le Mali ne peut lutter seul contre ces menaces et, en cons�quence, il doit donc inscrire sa d�marche dans le cadre d�une strat�gie globale et concert�e entre les Etats de la r�gion. L�initiative alg�rienne d�organiser � Bamako une conf�rence sur la paix, la s�curit� et le d�veloppement dans la r�gion sah�lo-saharienne entre dans le cadre de cette d�marche. Elle permet aux �tats concern�s de la r�gion d�arr�ter une strat�gie commune pour r�unir les conditions objectives, sine qua non, d�un retour � la s�curit� et � la stabilit�, indispensable au d�veloppement �conomique, social, culturel et cultuel de la r�gion. La d�composition du r�gime libyen, apr�s la mort de M. Kadhafi et de son clan, est venue compliquer la situation de ce pays d�muni qui, par sa situation territoriale, est devenu un �no man�s land� o� l�AQMI s�est implant�e durablement. En effet, la circulation de stocks d�armes de toutes natures, r�cup�r�es en Libye, et le retour des Touaregs, ayant servi dans les rangs des diff�rentes l�gions libyennes, font craindre un renforcement des revendications touaregs au Mali, au Niger et en Alg�rie, qui trouveront dans l�islamisme politique le prolongement id�ologique � leur activisme et donc une esp�ce de �sous-franchisation � � Al-Qa�da � travers l�AQMI qui est pr�dispos�e � cette alliance, pour des raisons logistiques et financi�res (les ran�ons). Le dernier rapt d�humanitaires europ�ens (45) au c�ur des camps sahraouis, situ�s � Rabouni, dans la r�gion de Tindouf, est une d�monstration spectaculaire de l�efficacit� de l�AQMI � notre fronti�re sud-ouest (Sahara occidental, Mauritanie, Mali). En m�me temps, il accr�dite la th�se franco-marocaine sur le danger de cr�ation d�un micro-Etat (la RASD) non viable (46) mais �galement la possible �collusion� terroriste entre le F. Polisario et l�AQMI, ce qui devrait se traduire par la classification de la RASD parmi les organisations terroristes, � �liminer dans la r�gion. La r�cente visite officielle � Alger du pr�sident malien Amadou Toumani Tour� a d� �tre certainement n�goci�e avec des moyens �conomiques et financiers (par exemple pour terminer le tron�on malien de la Transsaharienne, et payer les soldes de l�arm�e) mais surtout sur le plan politique et s�curitaire (47), avec une coop�ration militaire adapt�e (livraison de moyens de transport), doubl�e d�une m�diation pressante de l�Alg�rie pour que la r�bellion touareg du Nord Mali (MNLA), accepte de consolider l�unit� nationale du pays (48). Toute autre gesticulation para�t folklorique. La fronti�re alg�ro-nig�rienne s��tire sur quelque 900 km, entre le Tassili Ouan-Ahaggar et l�A�r, au sud-ouest, et le plateau de Mangueni au nord du d�sert du T�n�r�, aux confins des fronti�res alg�ro-libo-nig�riennes (49). Cette r�gion est �galement en proie � des tensions ethniques puisque la minorit� touareg du pays est � l�origine d�une r�bellion qui date depuis 1990, au nord du pays, autour de la r�gion d'Agadez. En fait, �les d�terminants de la d�stabilisation du Niger sont l��ethnicisation � politique de la r�bellion touareg et la politisation ethnique de celle-ci (50)�. En effet, la r�bellion touareg au Niger constitue un vieux probl�me qui survient d�s la d�claration d�ind�pendance, puisque la r�pression de la r�bellion de 1963 va provoquer le premier courant migratoire des populations touaregs vers l'Alg�rie. Le choc �conomique et social provoqu� par les s�cheresses des ann�es 69-74 et 81-85, associ� aux probl�mes s�curitaires li�s au retour, � leur pays d�origine, des �l�ments de l�ex-�l�gion islamique �, l�aide alimentaire insuffisante mobilis�e par l�Etat, la pratique syst�matique de la corruption et du d�tournement de cette aide vont augmenter les frustrations des tribus touaregs, contraintes � prendre de nouveau le chemin de l�exil en direction de l�Alg�rie et de la Libye. Les revendications du mouvement touareg et notamment le FLAA (Front de lib�ration de l�A�r et de l�Azawad) vont se radicaliser, en octobre 1991, puisqu�elles exigent l�instauration d�un �f�d�ralisme int�gral�, bas� sur la r�f�rence � une �nation touareg unifi�e � entre l�Azawad et le Nord Niger. En r�action, le Sud va constituer un front uni contre la cause touareg, rejetant l�objectif s�paratiste du FLAA. L�attaque d�un poste administratif � In Gall, � 80 km d�Agadez (plusieurs morts) et les massacres de Tin-Tabar Aden, qui seront consid�r�s comme un �g�nocide du peuple touareg�, marquent le d�but des hostilit�s. Si la signature de �l�Accord de paix d�finitive� d�avril 1995 consacre l�abandon durable des revendications autonomistes touaregs au Niger, elle ne met pas fin � la crise, puisque la r�bellion touareg estime que le gouvernement nig�rien a viol� les clauses de cet accord, continuant ainsi sa politique de marginalisation (51) et notamment par le partage in�quitable des richesses, ce qui risque d�entra�ner une guerre interethnique, voire civile. La r�bellion touareg a pris une nouvelle acuit� avec les enjeux miniers (le Niger est le troisi�me producteur d�uranium au monde (52) apr�s l�Australie et le Canada) et p�troliers (53). L�exploitation des mines d�uranium (Ar�va) soul�ve des questions sur le volet �conomique et environnemental. La r�bellion d�clare qu��apr�s 40 ans de pr�sence et 100 000 tonnes d'uranium extraites, les habitants de la r�gion d'Arlit puisent encore l'eau aux puits� en plus, elle est contamin�e ou compl�tement pollu�e� (54). Seul le gouvernement du Niger (1/3 du capital) profite (55) du permis d�exploitation d�Imouraven, en pleine zone touareg, sign� en janvier 2009, o� Ar�va (2/3 du capital) a investi 1,2 milliard d�euros, pour exporter 5 000 t/an d�uranium sur 35 ans. La France, dont l��lectricit� d�origine nucl�aire repr�sente 78% de sa production �lectrique, exige une s�curit� de ses approvisionnements en minerai d�uranium et consid�re comme vitale, pour son ind�pendance �nerg�tique, l�exploitation des mines du Niger, sur les vingt prochaines ann�es. Elle esp�re �galement vendre des r�acteurs nucl�aires de troisi�me g�n�ration (EPR) aux pays arabes dont l�Alg�rie et �galement pallier le d�ficit en �nergie �lectrique de l�Allemagne, apr�s sa d�cision de fermer ses centrales nucl�aires, � l�horizon 2030. En outre, la France et la Libye comptent bien d�fendre leurs int�r�ts au Niger, chacun pour ses raisons propres. La Libye (56), en apportant un soutien ind�fectible aux Touaregs du Niger, avait entretenu le conflit, avec des arri�re- pens�es territoriales sur une partie de la r�gion d�Agadez. En m�me temps, elle jetait les bases d�une politique r�gionale, bas�e sur l�ethnicit�, ce qui va �fonder les relations entre ce qui deviendra, plus tard, les divers groupes politico-militairest touaregs, durant les trois d�cennies suivantes (57)�. Une nouvelle �tape est franchie, actuellement, par l�internationalisation de ce conflit r�gional, puisque les activit�s militaires touaregs, tant au Mali qu�au Niger et m�me au Tchad (58), sont d�sormais parfaitement coordonn�es dans le cadre de l�Alliance Touareg NigerMali (ATNN), tandis que la r�gion devient �minemment sensible, aux yeux des Etats-Unis et de l�UE, la France (59) en particulier, du fait de la nouvelle donne s�curitaire, � savoir la pr�sence active de l�AQMI, ce qui implique directement un pays central dans la r�gion : l�Alg�rie. L�AQMI, organisation terroriste djihadiste structur�e comme une soci�t� �franchis�e�, utilisant la franchise �Al-Qa�da �, en fonction des opportunit�s, du moment et du terrain, a pour objectif strat�gique, l�unification de tous les mouvements islamistes implos�s d�Afrique du Nord (60) et du Sahel. C�est � partir de janvier 2007 qu�A. Droukdal, (61), introduisant le concept de �glocale�, d�cide de sa �franchisation� � Al- Qa�da (62) et va transformer le GSPC (63) en �organisation d�Al- Qa�da aux pays du Maghreb islamique � AQMI (64). Mais c�est Al- Zawahiri, lui-m�me (n�1, aujourd�hui d�Al-Qa�da) qui annoncera la r�cup�ration du GSPC, lors de sa d�claration du 11 septembre 2006, confirm�e dans son message du 3 novembre 2007 (65), en imposant le concept d��ennemi proche-ennemi lointain�, pour inciter les USA et ses alli�s de l�UE � intervenir (66), les mena�ant (surtout la France), d�attentats spectaculaires. Ainsi, l���mirat du Sahel� est n� et va s��tendre au Mali, au Niger, � la Libye, la Mauritanie, au Tchad, au Nigeria et au Burkina-Faso. L�autofinancement de ses op�rations et la m�diatisation inesp�r�e de ses attaques vont lui permettre de s�imposer comme l�unique interlocuteur dans la r�gion et accro�tre sa cr�dibilit� vis-�-vis d�Al-Qa�da-m�re. Son implantation active (67) se soldera par de solides protections aupr�s des chefs de tribus touaregs de la r�gion sah�lo-saharienne (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Alg�rie). La g�n�ralisation de tous les trafics (armes (68), migrants, drogues, cigarettes) et les autres activit�s criminelles, rapts (69) et enl�vements avec demande de ran�on (70) vont permettre � l�AQMI de se constituer un �tr�sor de guerre� (71). La r�gion sah�lo-saharienne (72) devient, d�s lors, le nouveau �front Ouest du terrorisme� et Al- Qa�da au Y�men celui de l�Est, tant pour des raisons strat�giques que tactiques, suppl�ant ainsi la r�gion de l�Extr�me-Orient (Afghanistan, Pakistan) soumise � une intense pression militaire et aux succ�s timides des �approches politiques�. En outre, l�AQMI va accro�tre la d�t�rioration du climat s�curitaire, apr�s la conclusion de nouvelles alliances entre elle et le cartel des narcotrafiquants latino-am�ricains (73), qui l�oblige � r�organiser ses structures dans le Sahel, en partageant les t�ches en mati�re de transport de la coca�ne puisque l��mir Abou-Zeid (alias Mohamed Ghedir) pr�l�ve un �imp�t de passage � et le groupe de Mokhtar Belmokhtar se charge de la s�curit� des convois qui transitent par l�Egypte ou/ et le Maroc(74). Pour r�pondre � cette menace, les USA mettront en �uvre un dispositif et des man�uvres conjointes (Flintlock 2005 et 2007), qui associeront, pour la premi�re fois, les neuf pays sah�liens dans des exercices d�entra�nement et de simulation, avec les USA (75). Force est de constater qu�apr�s des ann�es d�existence, l�initiative am�ricaine (76) n�a pas r�duit substantiellement le terrorisme dans la r�gion du Sahel. Mieux, le coordonnateur de la lutte anti-terroriste au d�partement d�Etat, D. Benjamin, affirmait en juillet 2010 que �les USA �cartent, pour le moment, toute �ventualit� de s�impliquer directement dans la lutte contre le terrorisme dans la r�gion du Sahel� (77). Il ajoute que son pays �poursuivait trois objectifs vitaux dans la r�gion, l��radication des cellules terroristes, l�exploitation des gisements de minerais et la s�curisation des voies maritimes (78)�. Pour lui, seules les institutions multilat�rales comme la BIRD, le FMI, la FAO, la BAD, la BID, la Cnuced, l�Unesco devaient s�occuper du d�veloppement des populations locales. Or, l�effondrement programm� par l�OTAN de la Libye va pr�cipiter les �v�nements et bousculer les strat�gies des uns et des autres dans la r�gion, puisqu�� l�instar des cas de l�Irak et de l�Afghanistan, leurs strat�ges ont planifi� la guerre mais oubli� de pr�parer la paix concomitamment. Comprenant, enfin, la gravit� de la situation de la r�gion sah�losaharienne (79) et confront�s � des probl�mes d�ordre budg�taire (financement des op�rations militaires et aux �lections pr�sidentielles), les USA vont changer de �fusil d��paule� et envoyer R. Maxwell, sous-secr�taire d�Etat, charg� du Maghreb, donner leurs instructions. Leur �feuille de route� affirme deux principes : �la stabilit� dans la r�gion� (80) et, surtout, �que les voisins de la Libye aident � la r�ussite du processus � qu�ils ont fix�, pour ce pays, via l�OTAN et le bin�me franco-britannique ! S�agissant des probl�mes folkloriques alg�ro-alg�riens et notamment des �r�formes politiques�, sa r�ponse est limpide : �Nous attendons la concr�tisation de ces r�formes�� D�cod�, cela signifie, ce n�est pas une priorit� pour nous (81) ! Leur objectif strat�gique, non affich�, est le maintien de la r�gion sous leur contr�le et sous leur influence, de mani�re � maintenir intact le rapport de force qui favorise les int�r�ts des puissances de la coalition. L�Alg�rie, compl�tement tenue � l��cart du dispositif des alli�s en Libye, est, cette fois, clairement identifi�e comme le �suppl�tif� de l�OTAN dans la r�gion, apr�s que cette derni�re eut achev� sa partition, sous mandat onusien. Disposant de ressources financi�res (82) pour acheter des armes �made in USA� (83), notre pays est le seul dans la r�gion � poss�der un potentiel de lutte contre le terrorisme mais, ayant perdu ses capacit�s d�anticipation et agissant � partir des turpitudes romantiques pr�sidentielles, il a perdu l�initiative dans le dossier libyen et, partant, dans les bouleversements graves qui s�op�rent � nos fronti�res, sous nos yeux mais sans nous ! Pour rattraper le �train en marche�, l�Alg�rie va afficher, une nouvelle fois, son refus de toute intervention de puissances �trang�res � la r�gion (84), qui va r�duire l�ind�pendance des d�cisions souveraines des pays, ceci n�excluant pas la coop�ration (85). Elle fera pr�valoir que toute intervention directe �trang�re cr�era un rejet des populations et des opinions publiques, ce qui donnera � l'AQMI un argument inesp�r� pour consolider son implantation dans la r�gion. Prenant acte de son chaos diplomatique et de son absence totale de vision strat�gique (86), notre pays va r�unir les chefs d��tat-major (la Mauritanie, le Mali et le Niger) � Tamanrasset en mars et septembre 2010, puis en avril 2011 � Bamako et cr�er un Centre de coordination des op�rations de lutte contre les r�seaux terroristes, � travers un �tat-major conjoint (87). En outre, des r�unions de responsables du renseignement des pays de la r�gion vont se tenir � Alger en avril et septembre 2010, avec l�installation d�un Centre de renseignement commun � Alger et la mise en place d�une unit� de fusion et de liaison pour l�anti-terrorisme et la coop�ration (UFC). Personne ne doit perdre de vue que l�enjeu fondamental d�une guerre asym�trique et subversive demeure l�attitude et la posture des populations et des opinions publiques (si elles existent) et l�action militaire, proprement dite, n�est que l�accompagnatrice d�un processus global. Le succ�s ou l��chec de cette guerre d�pendra donc de la capacit� de chacun des pays � faire basculer la population et l�opinion publique dans son camp. C�est le seul objectif strat�gique � d�fendre et � n�gocier avec nos partenaires r�gionaux et extrar�gionaux pour le moment, afin d��viter les �checs pass�s. Sans sous-�valuer ni sur�valuer le ph�nom�ne terroriste � nos fronti�res, il est clair que son importance et sa gravit� se sont amplifi�es avec la n�buleuse libyenne qui a �chapp� compl�tement � l�influence de notre pays, de par notre passivit�. S�agissant d�un ph�nom�ne transfrontalier, la riposte ne peut �tre que transnationale d'o� la n�cessit� de construire une coop�ration durable avec les pays de la r�gion, directement concern�s, pour mener en commun la lutte contre le terrorisme franchis� et mutant vers des autres formes de trafics, notamment les drogues venues d�Am�rique latine (Colombie). Il faut, donc, n�gocier avec les puissances concern�es, �trang�res � la r�gion, comme des partenaires et non comme subordonn�s, ce qui implique que nous introduisons les int�r�ts objectifs de notre pays dans la r�gion et dans nos profondeurs strat�giques dans le dispositif qu�ils ont arr�t�s, le soutien financier et logistique (89) n��tant qu�un volet et pas le plus essentiel. Le probl�me, cependant, et il faut bien se l�avouer, c�est que le statut de �partenaire� que nous devrions revendiquer ne s�attribue pas avec �rachwa� ou par �piston �� il se m�rite et il se m�rite d�abord par la relation �tablie par le pouvoir et son ancrage dans le �front int�rieur�, donc dans la soci�t� de son propre pays� et l�, c�est une toute autre histoire ! M. G. (*) L�Association des universitaires alg�riens pour la promotion des �tudes de s�curit� nationale.
(39) La coexistence des Maures, Harratines arabophones et des N�gro-africains francophones lui donne une vocation � mener une diplomatie d��quilibre et de compromis. (40) La position du pr�sident H. Boumedi�ne est d�concertante de na�vet�. Comment pouvait-il croire qu�en h�bergeant, huit mois par an, M. Ould-Dada et sa famille, � Club-des-Pins, il pouvait faire de lui un alli� reconnaissant, dans la r�gion ? Lorsque son v�ritable donneur d�ordre l�a somm� de signer les accords de Madrid, il n�a pas h�sit� � changer de r�sidence. (41) L�assassinat de 4 touristes fran�ais � Aleg, le 24 d�cembre 2007, l�attaque meurtri�re (12 morts) de Tourin en septembre 2008, tuant 12 personnes, l�assassinat d�un Am�ricain � Nouakchott le 23 juin 2009, l�attentat-suicide contre l�ambassade de France � Nouakchott le 8 ao�t 2009, l�enl�vement de 3 Espagnols sur la route Nouakchott-Nouadhibou le 29 novembre et de 2 Italiens le 19 d�cembre 2009, l�enl�vement et l�ex�cution d�un Fran�ais, apr�s une attaque commando, franco-mauritanienne, en ao�t 2010. (42) D�origine berb�re, ils sont environ 700 000 au Mali, un million au Niger, 50 000 au Burkina Faso, 20 000 en Alg�rie et 10 000 en Libye. (43) Marie Simon : Le Mali, maillon faible de la lutte contre AQMI?, L'Express du 22/09/2010. (44) Le Programme pour la r�duction de l�ins�curit� et la lutte contre le terrorisme dans le Nord Mali (Pirin) devrait permettre de r�duire les causes de l�ins�curit� dans la r�gion, par l�occupation de l�espace en services administratifs, par plus de mobilit� des forces d�intervention et une mobilisation sociale massive pour r�duire l�influence des sectes religieuses et du terrorisme. (45) Deux Espagnoles et un Italien ont �t� enlev�s, ces derniers jours, par des pr�sum�s terroristes islamistes, qui proviendraient du Mali et retourneraient dans la m�me r�gion. (46) J. C. Mallet, F. Delon D�fense et S�curit� nationale : le Livre Blanc. Ed. Odile-Jacob, La documentation fran�aise, Paris, 2008, p. 38. (47) La cr�ation d�une septi�me r�gion militaire alg�rienne, dans la r�gion d�Adrar ou de Reggane, pourrait �tre une r�ponse � la menace dans ce triangle constitu� du Sahara occidental, de la Mauritanie et du Mali. (48) Le retour des combattants touaregs de Libye peut relancer l�opposition arm�e au Nord Mali, avec � leur t�te Hama ag Sidahmed, apr�s l��trange assassinat de leur chef Brahim ag Bahanga, il y a quelques semaines. (49) La ville de In-Guezzam est situ�e � moins de 250 km de la ville mini�re (uranium) d�Arlit et � quelque 500 km d�Agadez, consid�r�e comme capitale du Nord du Niger. (50) Hassane Souley : L�Uranium, l�islam et la nouvelle r�bellion touareg : �l�ments pour une lecture g�opolitique de la situation dans le Nord du Niger, p. 02. (51) L�accord de Ouagadougou du 15 avril 1995, conclu entre la r�sistance touareg et l�Etat du Niger, visait � �tablir une paix d�finitive entre les deux protagonistes et �uvrer pour un d�veloppement �conomique, social et culturel. �Texte des accords d�finitifs entre la r�sistance touareg et l�Etat du Niger�, in : www.temoust.org, le 23 mai 2009, p. 01. (52) Les r�serves d�uranium au sud de l�Alg�rie sont �valu�es � 29 000 tonnes selon l�ancien ministre de l�Energie. (53) D�couverte r�cemment de p�trole � Chinguetti (au sud de la Mauritanie) et d�importantes r�serves p�troli�res au Tchad et dans le golfe de Guin�e. La Chine a investi 5 milliards de US $ pour les droits de prospection des champs p�trolif�res d�Agaden, au nord du Niger. (54) Depuis plus de quarante ans, la firme fran�aise Ar�va exploite l'uranium de la r�gion d'Arlit, alt�rant l��cosyst�me fragile de la r�gion. L�ONG Greenpeace a r�v�l� des taux anormaux d'uranium dans le sol et de radon (gaz radioactif) dans l'air et la pr�sence d'objets radioactifs recycl�s dans un march� d�Arlit. In Ecolorama-association, Greenpeace, Niger : La d�pendance �nerg�tique fran�aise in, www.ecolorama.fr/ du 21 septembre 2010, p. 01. (55) Philipe Hugon : Une Afrique emport�e par la crise mondiale, in : L�Ann�e strat�gique, Paris, 2010, p. 353. (56) M. Kadhafi avait ouvert des camps d�entra�nement militaires pour la formation de rebelles touaregs alg�riens, maliens et nig�riens, accentuant ainsi la d�stabilisation des pays de la r�gion. (57) Dida Badi : Le Maghreb dans son environnement r�gional et international : Les relations des Touareg aux Etats, le cas de l�Alg�rie et de la Libye. Notes de l�IFRI, inwww.ifri.org, 2010, p. 19. (58) La Libye a longtemps revendiqu� la bande d�Aozou dans le Tibesti tchadien, riche en uranium. (59) Ce pays compte, � l�heure actuelle, une douzaine d�otages (civils et militaires) qu�il tente de racheter. (60) En mars 2007, Abou El-Baraa, marocain originaire de T�touan, a int�gr� le Conseil consultatif d�AQMI (Madjlis el-choura), compos� de 16 membres. (61) Avec ses deux chefs de katibates, Abou Zeid et M. Belmokhtar, ils comptent quelque 200 et 300 hommes, ont pris leurs quartiers autour de villes comme Tombouctou, Gao, Kidal o� ils jouissent de grandes facilit�s relationnelles avec les plus hautes autorit�s de ces pays mais �galement avec les chefs de tribus touaregs, avec lesquels ils ont fond� des relations familiales (mariages polygamiques), cr�ant ainsi de confiantes solidarit�s. (62) Jean Michel Demetz et Dominique Lagarde : Sahel 10 questions sur les terroristes islamistesin : L�Express, 28 juillet 2010, p. 16. (63) Le GSPC (Groupement salafiste pour la pr�dication et le combat) est n� sur les ruines des anciens GIA (Groupes islamiques arm�s). (64) Jean Fran�ois Daguzan : Al-Qa�da au Maghreb islamique : une menace strat�gique ? in Internet : 30 juillet 2010, p. 1. (65) Mathieu Guid�re : La tentation internationale d�Al-Qa�da au Maghreb, In : www.IFRI.fr, Focus strat�gique n�12, d�cembre 2008. (66) Philipe Hugon, Op. Cit. p. 353. (67) La g�n�ralisation des mariages polygames des membres de l�AQMI, avec les filles des chefs de tribus touaregs, va permettre de conclure de solides protections. (68) Avant la guerre civile en Libye, quelque 3 millions d�armes l�g�res circulaient dans la r�gion. Aujourd�hui, les arsenaux libyens ont d�vers� encore plus d�armes destructrices et sophistiqu�es (missiles, roquettes, armes de pr�cision, chimiques, �lectroniques�). (69) Marcel Bekolo : Al-Qa�da et le business des otages occidentaux au Sahel, in ww.afrik.com., 16 d�cembre 2009. (70) La r�solution onusienne de refus du paiement des ran�ons, pour la lib�ration des otages, tient son explication � cet endroit. Force est de constater que cette derni�re n�est appliqu�e par personne. (71) Cette aisance financi�re va acc�l�rer la consolidation d�Al-Qa�da dans la r�gion. (72) La corruption a atteint les plus hautes sph�res des Etats et participe � la mobilit� des organisations terroristes et � leurs alliances mafieuses. (73) De 50 � 60 tonnes de coca�ne sont achemin�es de l�Am�rique du Sud en Europe � travers le Sahel. Cas du Boeing 727 au nord du Mali en novembre 2009 (Rapport Unodoc in El- Pais, 15/03/2010). (74) M. Guid�re, Op. Cit, p. 18. (75) Mehdi Taje, S�curit� et stabilit� dans le Sahel africain,Ed. Nato, Rome, d�cembre 2006, p. 72. (76) 2003, les USA ont initi� �Pan-Sahel Initiative� (PSI) pour la formation des troupes et la fourniture d��quipements militaires afin de consolider les capacit�s d�intervention du Mali, Tchad, Mauritanie et du Niger. En 2005, PSI devient le Trans-Sahara Counter-Terrorism Partnership (TS CTP) qui regroupe les six Etats du Sahel et l�Alg�rie, le Maroc et la Tunisie. (77) Cheherazad Lamrik�ne, Lutte antiterroriste : Les Etats-Unis excluent toute intervention directe au Sahel, in : www.dna-algerie.com/politique/ 42-interieure/283 du 26 juillet 2010. (78) La piraterie moderne devient une menace des plus s�rieuses, comme nous venons de le vivre en Alg�rie. (79) Apr�s la conf�rence internationale �sur la s�curit� et le d�veloppement�, tenue en septembre � Alger, les USA vont voir des cons�quences de leur politique en Libye, via l�OTAN et sur la s�curit� de lar�gion sah�lo-saharienne. (80) C�est un dictat pour l�Alg�rie, de mani�re � ce qu�elle rentre dans le rang comme ses voisins imm�diats, le Maroc, la Mauritanie, la Libye, le Niger ou le Mali. (81) Dans la hi�rarchie des int�r�ts strat�giques am�ricains, la �d�mocratisation� du pouvoir, en Alg�rie, n�est pas la priorit� du moment. (Voir notre article, �Quels int�r�ts strat�giques d�fendent les pays occidentaux dans les pays arabo-musulmans ? El-Watan, octobre, 2011). (82) Les 175 milliards de dollars de r�serves, transform�s, pour partie, en bons du Tr�sor am�ricain et que le gouverneur de la BA passe son temps � exhiber, int�ressent les USA. (83) A quelques jours d�intervalle, une offre de vente d�armes britannique, suivie de celle am�ricaine, ont d�barqu� � Dar El Be�da ! (84) Mahamadou Issoufou, pr�sident du Niger, vient de r�affirmer, � partir de l�Afrique du Sud, il y a quelques jours, les principes de la non-intervention de troupes �trang�res et celui de la coop�ration militaire. (85) Pascal Boniface, L'environnement de s�curit� et le processus de construction de la paix en Afrique de l'Ouest, in : www.un.org/unowa, mars 2007, p. 1. (86) Pr A. Adimi, interview � El-Watan, du 10.11.11. (87) Le Cemoc mobilise une force de 25 � 70 000 hommes. (89) Il est essentiel que notre pays s�interdise de financer les op�rations du maintien de la s�curit� de la r�gion pour le compte des puissances �trang�res.