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«La repentance n'a pas d'échéance»
AHMED OUYAHIA DEVANT LES CADRES DU RND
Publié dans L'Expression le 02 - 09 - 2006

Les portes de la réconciliation doivent rester grandes ouvertes.
Le secrétaire général du Rassemblement national démocratique, M.Ahmed Ouyahia, ne voit aucun inconvénient à la prorogation des délais d'application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Ouyahia a choisi le jeudi, 31 août, date qui correspond à l'expiration dudit délai pour se prononcer sur cette question. Il est, de ce fait, la dernière personnalité de l'Alliance présidentielle à s'exprimer sur la question.
A partir de Tipaza, où il a animé un meeting populaire, le premier depuis son départ de la chefferie du gouvernement, Ouyahia a exprimé son opinion, sans détour aucun: «La réconciliation nationale a fait un parcours réussi depuis le référendum du 29 septembre, mais le chemin reste long, d'autres étapes doivent être franchies avant d'arriver à la paix totale». Pour lui, la repentance n'a pas d'échéance. «Il faut laisser les portes de la rahma ouvertes. On ne peut pas, ajoute-t-il, rejeter la repentance d'un terroriste qui rend ses armes au mois d'octobre ou même en décembre sous prétexte que le délai de six mois a expiré».
Ouyahia rallie donc la tendance générale qu'a pris le débat autour de la réconciliation nationale, ces dernières semaines.
Juristes et hommes politiques ont convenu de la nécessité de prolonger le délai de six mois, initialement arrêté par le président de la République aux terroristes pour descendre des maquis.
La décision ultime revient au chef de l'Etat, en vertu de l'article 47 de l'ordonnance portant les mesures d'application de la Charte. «Le RND ne fuit pas ses responsabilités. Mais il faut admettre que M.Abdelaziz Bouteflika est le seul habilité à prendre des mesures additives», note l'orateur. Il prend pour exemple la loi sur la concorde civile qui est restée en vigueur, au delà du 12 janvier 2000.
Les Algériens ont besoin de plus de paix et de stabilité, «personne ne désire vivre dans la terreur ni les victimes de la tragédie nationale, ni les familles des terroristes». Pour cela, Ouyahia propose de laisser de côté les «appréciations politiciennes et d'oeuvrer à concrétiser l'esprit de la Charte qui a pour but la réconciliation entre les Algériens».
Pas de place pour le FIS dissous
La réconciliation nationale «n'est pas une affaire de salon», mais de débat politique. Sur ce plan, le RND se «distingue des partis qui font de cette question un fonds de commerce et de ceux qui aspirent récupérer les dividendes de la paix». L'ex-chef du gouvernement ne cite pas de nom ni ne fait allusion à un courant précis, mais semble, à travers cette déclaration, vouloir justifier, le silence affiché par son parti jusqu'à cette date.
D'ailleurs, il n' a pas manqué de rappeler que le RND a vu le jour au coeur de la période de crise ; qu'il a toujours condamné le terrorisme, soutenant toute démarche visant à l'établissement de la paix, en 1999 avec la Concorde civile et en 2005 à travers la Charte pour la paix.
Contrairement à certains observateurs, l'orateur rejette les lectures qui mettent en évidence «le retard» affiché par l'administration dans le traitement des dossiers des personnes concernées par les mesures de la Charte. «Plus de 3000 dossiers de disparus ont été traités juridiquement. Le projet a pris en charge les victimes de la tragédie nationale. Alors que ces dossiers demandaient, dans le passé, plus de quatre ans. Il serait injuste de renier les acquis», insiste Ouyahia qui estime que la lutte armée contre le terrorisme ne doit pas s'arrêter, idem pour les condamnations des actes barbares.
Le secrétaire général du RND persiste et signe quant au fait qu'il n'y a pas de place sur la scène politique nationale pour les responsables de la tragédie nationale.
La prorogation des délais de la Charte dans la conception du RND ne doit pas remettre en cause les principes inaliénables approuvés par le peuple. L'interdiction de toute activité politique aux dirigeants du FIS dissous en est une.
Ouyahia, coupant court à tout éventuel amalgame, n'est pas allé par quatre chemins pour exprimer cette opinion, au moment où d'autres discours laissent une brèche pour le retour du FIS dissous sur la scène nationale.
Le refus sec de l'ex-chef du gouvernement intervient, faut-il le rappeler, au lendemain des sorties politico-médiatiques de Anouar Haddam et Madani Mezrag qui, profitant du débat actuellement en cours concernant les délais d'application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, ont tenté de remettre au goût du jour leur revendication en rapport avec la réhabilitation de l'ex-FIS. Par sa «précision», Ahmed Ouyahia semble vouloir se démarquer du discours qui, sous prétexte de réconciliation nationale, cherche à «forcer la main» à l'Etat pour aller plus loin que les desiderata de la société. Celle-ci, comme le soutient le n°1 du RND, aspire à la paix et non pas à replonger dans les horreurs d'une guerre qui a fait plus de 100.000 victimes.
Soutien inaliénable à Bouteflika
La révision de la Constitution est l'autre question phare abordée par le secrétaire général du RND dans son discours. Après avoir affirmé que le texte fondamental est au-dessus des partis politiques, sachant qu'il concerne toute la nation, et en reconnaissant que «chacun est libre de ses positions», il souligne que «le parti affichera ses positions le jour où le président de la République lèvera le voile sur ses propositions». Mais, d'ores et déjà, il rassure qu'«(il) sera d'accord avec les décisions que prendra le président de la République sur le projet de la révision de la Constitution et appuiera sa démarche». Ouyahia s'est montré peu prolixe sur ce chapitre, mais l'on devine, aisément, une ferme intention de sa part de ne pas commenter le «brouillon» de la nouvelle Constitution rendu public par le FLN. Il a d'ailleurs refusé de réagir au débat qui secoue la classe politique sur cette question, notamment après les sorties régulières de plusieurs acteurs politiques au sujet de l'amendement de la loi fondamentale du pays. Egal à lui-même dans son soutien «sans condition» à la démarche présidentielle, le secrétaire général du RND évacue le sujet, préférant attendre la position du chef de l'Etat.
M.Ouyahia a souligné, par ailleurs, que «l'Algérie se porte bien» sur le plan économique. Il en veut pour preuve, le remboursement anticipé de la dette, la baisse du chômage et les programmes de 100 milliards de dollars consacrés au développement national. «Il faut rendre à César ce qui lui appartient. La situation a beaucoup évolué entre 1996 et 2006. Au RND, nous sommes honnêtes. Quand les choses vont bien dans le pays, il ne faut pas le nier». Il a souhaité, dans sa lancée, que le dialogue entre le gouvernement et les partenaires sociaux aboutisse à des résultats positifs au profit des travailleurs.
Ce satisfecit témoigne du fait que le départ d'Ouyahia de la tête du gouvernement n'a pas versé le RND dans l'opposition. Ce dernier le crie haut et fort à l'occasion de ses sorties médiatiques, la dernière en date a été celle de jeudi. «Nous avons soutenu, dans le passé, le président Bouteflika et nous continuerons à le faire parce que nous croyons à son projet».
Ouyahia a ainsi réitéré ses positions devant les cadres du parti, dans une séance à huis clos avec les membres du conseil de wilaya élargi aux élus. Evoquant la situation au sein du RND, il a souligné que son parti «doit aller de l'avant, redonner espoir au peuple, rétablir la paix et la stabilité».
A l'image des autres partis politiques, le RND se prépare aux échéances électorales de 2007. «Nous avons préparé un programme très riche», a-t-il déclaré. Il sera ficelé durant la deuxième semaine de septembre en conseil national. Mais l'on sait, d'ores et déjà, qu'une série de sorties sur le terrain est programmée à travers les wilayas du pays.
Le RND ambitionne de rattraper le retard enregistré en 2002. Il y va, selon les observateurs, de son avenir.


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