Sous l'effet de la menace d'une intervention étrangère au Niger pour y «rétablir» l'ordre constitutionnel et rendre au président déchu Mohamed Bazoum ses prérogatives, les trois pays sahéliens que sont le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont conclu une Alliance des Etats du Sahel a priori destinée à faire face aux objectifs de...la Cedeao. Plongés tous trois dans un contexte sécuritaire et politique agité, ils scellent un accord militaire de soutien mutuel, sur la base d'une Charte du Liptako-Gurma (la région des Trois-frontières qui leur est commune, ndlr), par lequel ils escomptent «établir une architecture de défense collective et d'assistance mutuelle au bénéfice des populations» de toute la région. Ouverte à l'adhésion de tout autre pays qui se sentirait concerné, cette Alliance a au moins le mérite de mettre un frein immédiat aux velléités d'intervention militaire qui planaient sur Niamey, depuis que le Conseil national de sauvegarde de la patrie (CNSP) a écarté Bazoum et poussé au départ l'ambassadeur de France ainsi que le contingent de Barkhane encore basé dans la capitale. Sans doute, l'insécurité n'a pas disparu pour autant, dans l'ensemble de la région tant les groupes terroristes ont bénéficié pendant des années d'une atmosphère propice à leurs activités criminelles. À cela s'ajoute une rivalité féroce qui oppose les factions terroristes aux mouvements séparatistes ainsi qu'aux bandes qui prospèrent grâce à des trafics en tous genres. Cela est particulièrement vrai au nord du Mali où, ces dernières semaines, des attaques récurrentes ont visé des cantonnements de l'armée, notamment ceux qui ont été désertés par la force onusienne Minusma, poussée elle aussi vers la sortie au plus tard en décembre prochain. Est-ce en raison de ce climat particulièrement tendu que les trois pays sahéliens ont convenu de s'unir? Sans doute que non, la seule et vraie raison de leur initiative découlant de la menace pendante que la Cedeao maintient depuis le coup d'Etat au Niger sur ce dernier pays. Ce faisant, ils envoient à l'organisation régionale ouest-africaine un avertissement sans frais qui n'en constitue pas moins un signal fort en ce qui concerne le devenir d'une autre alliance, longtemps dominée par l'ancienne puissance coloniale, le G5 Sahel dont tout indique qu'elle est, à son tour, périmée. À en juger par le document dévoilé par le média Burkina 24, l'Alliance se fonde sur 17 points dont le principal concerne la défense militaire commune contre toute agression extérieure visant «la souveraineté et l'intégrité du territoire d'une ou plusieurs parties contractantes». En découle un devoir d'assistance immédiate pour rétablir «la sécurité». D'où l'argumentaire des trois pays qui disent vouloir agir contre le terrorisme, tout en posant une énorme pierre dans le jardin de la Cedeao.