Le FFS a fêté, hier, ses 60 ans d'existence. Le parti a été fondé le 29 septembre 1963, soit juste une année après l'indépendance. Le parcours du Front des forces socialistes se confond avec celui de son fondateur décédé le 23 décembre 2015. Huit ans depuis la disparition de Hocine Ait Ahmed, son nom et son image planent toujours sur la vie du parti. Ses mots, ses phrases, ses déclarations sont constamment repris dans les cellules du parti. Et bien au-delà. La culture politique qu'il a semée au sein du parti demeure fertile. Les actions qu'il a menées depuis la naissance du parti sont constamment convoquées. Les réponses qu'il a eu à apporter, en contexte de routine comme dans les circonstances de troubles et d'intrigues, sont des leçons inusables. À telle enseigne que ce n'est point une usurpation de parler de l'héritage politique de Hocine Ait Ahmed. Cette place que continue d'occuper Ait Ahmed auprès des Algériens n'est pas le fruit du hasard. C'est plutôt le résultat de la permanence de l'action politique sur plus d'un demi-siècle de lutte. Pour le recouvrement de l'indépendance, d'abord, et pour l'instauration d'un Etat de droit, ensuite. Il était engagé précocement dans le combat pour l'Indépendance nationale. À peine 15 ans qu'il frappa aux portes du Parti du peuple algérien (PPA), cette école du militantisme et du nationalisme. Il était le deuxième chef de l'Organisation spéciale (OS), dont il assurera la direction à l'âge de 22 ans. Il succéda à Mohamed Belouizdad à la tête de l'OS, une organisation dont il fut l'organisateur par excellence. Il fut à l'origine du prospectus de formation militaire distribué à l'ensemble des activistes de cette organisation paramilitaire. Son accession à ce niveau de responsabilité en temps de lutte n'est pas un hasard ou une nomination alibi. Le jeune Ait Ahmed s'est fait remarquer lors de la réunion du Comité central du PPA-MTLD, en 1948, à Zeddine (près d'Aïn Defla) avec sa contribution écrite, fruit d'une réflexion mûre sur la stratégie de lutte que devait emprunter le PPA-MTLD. Depuis ce rapport, il s'est imposé comme une des valeurs sûres du combat de l'Algérie pour son indépendance. «Je sais qu'il a milité très jeune au PPA et qu'il a été parmi ceux qui ont répandu en Kabylie l'idée d'indépendance et la notion d'organisation, deux principes chers au parti (PPA-MTLD) dans les années difficiles de 1945 et 1946. Il n'a pas hésité à sacrifier ses études dans la lutte et vivre la vie dangereuse de maquisard», avait écrit Benyoucef Benkhedda dans son ouvrage: Aux origines du 1er novembre 1954. Feu Ait Ahmed s'est distingué par sa capacité à allier le côté théorique des luttes et l'action pratique. Sentant, vraisemblablement avant ses pairs, la nécessité de porter la cause algérienne à l'échelle internationale, il entama la mobilisation parmi les Africains et les Asiatiques. C'est ainsi qu'il lança en 1953 le périple asiatique pour créer des comités de soutien à l'autodétermination de l'Algérie. Il prit part à la première conférence des partis socialistes asiatiques à Rangoon en Birmanie. Avant de placer la cause algérienne à la Conférence de Bandung où il a conduit la délégation avec M'hamed Yazid. Trois ans plus tard, il fut l'inspiration de la création du GPRA. Des faits qui feront dire à Mouloud Hamrouche, admiratif, que le leader historique était un «fin stratège, au parcours et au combat exceptionnel, multidimensionnel, pour un même idéal, l`indépendance et les libertés pour son pays et ses concitoyens». Pour l'ancien chef du gouvernement, Si El Hocine se révélera «fin diplomate» et expert «hors pair» des enjeux mondiaux, relevant qu'Ait Ahmed conseillait toujours de «transcender les clivages de chapelles et les dissensions pour l'intérêt de l`Algérie». Au lendemain de l'indépendance, Ait Ahmed s'est opposé au système du parti unique. Il a contesté les choix et orientations du régime en place. Et c'est dans ce contexte qu'il créa, avec d'autres militants, le FFS, cet espace politique et de lutte pour la démocratie et la justice sociale. De l'engagement patriotique pour l'indépendance de l'Algérie à l'opposition démocratique, toujours pour une Algérie meilleure, le combat d'Ait Ahmed forçait le respect. Y compris pour ceux qui divergeaient avec ses thèses. Car au-delà de ce qu'il peut constituer des sujets de divergence avec lui, il faisait de l'Algérie et de la dignité de ses enfants un sacerdoce.