L'ancien ministre libanais revient sur les derniers événements qui ont secoué le pays du Cèdre. Dans une conférence de presse tenue à Paris, l'ancien ministre libanais des Finances, Georges Corm, a présenté les axes d'une possible sortie de crise du Liban. Selon lui, un consensus international sur une solution à la crise serait une bonne voie, sauf qu'il se dit persuadé qu'Israël n'acceptera jamais un accord international impliquant toutes les parties. Autre proposition, selon M.Corm, la nécessité d'une restauration véritable de la souveraineté nationale libanaise. Pour cela, il faut sortir du système communautaire car les communautés servent de canaux aux ingérences étrangères. Dans cet esprit, l'élection au suffrage universel d'un président au Liban est incontournable, avec suppression des sous-quotas communautaires. On pourrait, à la rigueur, conserver les grands quotas (par exemple pour les chrétiens et les musulmans). En fait, il s'agira d'une véritable reconstruction politique qui corrigera les erreurs passées dont, entre autres points, la reconnaissance de droits civiques aux Palestiniens du Liban. «Ne perdons pas le bénéfice du succès militaire du Hezbollah qui a fait reculer l'armée israélienne. Ne confondons pas l'agressé et l'agresseur.» A propos justement du Hezbollah, Georges Corm réfute tous les clichés véhiculés par les médias occidentaux. «Ce n'est plus le Hezbollah des années 80, il est libanais, c'est le parti des enfants du Sud-Liban». Il dira qu'il faut cesser de qualifier ce mouvement national d'instrument de l'Iran, pour preuve le discours «très politique et pragmatique de son leader Nasrallah». Le Hezbollah pourrait intégrer l'armée nationale libanaise à condition, bien sûr, qu'il n'ait pas «le sentiment de trahir sa cause». Si des élections sont organisées rapidement, pas sous la houlette des Américains comme celles de 2005, si un gouvernement d'union nationale représentant toutes les forces pour une souveraineté complète, alors le Hezbollah trouvera sa place dans l'armée nationale. Corm estime que le document d'entente entre le général Aoun et le Hezbollah serait une excellente plate-forme de discussions et de dialogue. Revenant, à plusieurs reprises sur la nécessité de souveraineté nationale, le conférencier expliquera que celle-ci ne signifie pas «indépendantisme» au détriment d'une politique extérieure au niveau international. Et s'il fallait être indépendant de la Syrie, il faut aussi et surtout l'être à l'égard de l'axe US-Israël. Pourtant, l'ancien ministre qualifiera «d'absurdité» le fait de comparer la Syrie à Israël. «Avec la Syrie, nous avons des relations très anciennes et profondes» et de toute façon «il n'est pas question pour le Liban d'être avec l'Occident. Sa place est avec l'axe arabe contre toute hégémonie occidentale». Néanmoins, il reconnaîtra: «notre neutralité est difficile à faire admettre par les Arabes mais surtout par les Occidentaux qui ne sont pas prêts à donner des garanties de sécurité à cause d'Israël». Israël ne cesse de tenter de faire émerger des micro-Etats dans la région pour ne pas être le seul Etat communautaire. Le Liban gêne ce projet car il est un Etat pluriel, ouvert et donc contraste fortement avec Israël. Quant à la reconstruction économique, elle doit aussi être bâtie sur une nouvelle vision. Le Liban doit se doter d'une véritable économie de production avec un large volet d'exportation agroalimentaire et de services. Le temps où le Liban servait d'intermédiaire d'affaires aux pays arabes est révolu dira Corm, «Les pays du Golfe ont, à présent, le même niveau d'infrastructures que les USA et les Européens». Enfin sur l'actualité, il considère que l'embargo imposé par Israël est «criminel». A la question de savoir si le gouvernement libanais a mal géré la crise, il répondra qu'il a été comme la Ligue arabe, d'abord une gestion contre-productive puis une meilleure réaction face au succès militaire du Hezbollah.