Cinquante après, quel bilan peut-on tirer de la guerre d'octobre 1973? Ce que le monde occidental appelle le «conflit israélo-arabe» a souvent été caractérisé par de courtes périodes de violents affrontements suivis d'une longue période de latence, le front arabe se trouvant divisé entre pays progressistes proches de l'ex-URSS ou Non-alignés et Etats conservateurs, «alliés» des Etats-Unis. Déjà, à l'époque, le dossier palestinien était tantôt un objet de surenchère, tantôt un facteur de consensus selon le contexte géopolitique. Depuis la guerre de 1967 (5 au 10 juin) et la perte de plusieurs régions arabes (le Sinaï, le Golan) et palestiniennes (Cisjordanie, El Qods) dont l'entité sioniste s'est emparée avant de narguer haut et fort les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, des décennies durant. L'Egypte et la Jordanie étaient alors prêtes à une solution politique qui n'implique pas la «reconnaissance» de l'Etat hébreu tandis que la révolution palestinienne grandissait avec, à sa tête, Yasser Arafat, président de l'OLP depuis février 1969 et artisan de son entrée sur l'échiquier politique international. Décédé le 28 septembre 1970, le président égyptien Djamal Abdel Nasser avait laissé à son successeur Anouar al Sadate une série d'options. Face à une entité sioniste exigeant un traité de paix et des annexions territoriales, et compte tenu du fait que l'URSS ne voulait pas d'une nouvelle guerre considérée perdue d'avance, Sadate s'est peu à peu tourné vers les Etats-Unis où le président Nixon et son secrétaire d'Etat Henry Kissinger pensaient que plus la situation de ni guerre ni paix durera, plus les pays arabes finiront par rejoindre le camp occidental au détriment du rival soviétique. L'identité de Juif allemand de Kissinger et partisan inconditionnel de l'Etat hébreu, ont fait que le dossier palestinien devait rester insoluble au conflit. Chez Dear Henry, le «réalisme», c'est-à-dire l'intérêt américain avant tout, prime sur la morale et sur tous les dommages qu'engendre sa politique, témoin le coup d'Etat du 11 septembre 1973, au Chili. L'Egypte, rejointe par la Syrie de Hafedh al Assad, le 13 novembre 1970, a cru ressoudé le front de la fermeté auquel le président Houari Boumediène apportait un appui inconditionnel. Dès lors, la préparation de l'offensive d'octobre 1973 était en marche. 1972 était une année d'élections aux Etats-Unis et il ne fallait surtout pas irriter «les amis d'Israël». Cela n'empêchait pas Washington de faire savoir que le départ des Soviétiques d'Egypte serait apprécié. L'URSS expliquait à ses alliés que trois conditions sont préalables pour faire la guerre: des armes, de l'entraînement et la volonté de se battre. Or, elles pêchent par l'absence ou la mollesse de cette dernière condition. Infatigables propagandistes de la résolution 242, ils donnent 'impression de ne pas vouloir d'un nouveau conflit armé. C'est pourtant ce qui interviendra, faute d'une réelle ouverture de la part des Etats-Unis, malgré l'expulsion par Sadate de la plupart des conseillers soviétiques présents en Egypte. Les pays arabes, Egypte, Syrie et Algérie, pour l'essentiel, mettent au point le plan «Badr», presque à l'image de «Granite 2», prévoyant une traversée du canal de Suez avec une avancée de quinze à vingt kilomètres au-delà de la ligne Bar Lev. Idem pour la Syrie, avant que ne commence une guerre d'usure. Le reste fait partie de l'histoire. Cinquante ans après, l'entité sioniste fait montre d'arrogance et d'un expansionnisme qu'attise la volonté de certains Etats arabes à embrasser la normalisation sous de fallacieux prétextes. Et, surtout, l'impunité totale qui lui est accordée par la communauté internationale, nourrit sa politique d'apartheid et de racisme envers un peuple palestinien qui tente, au prix d'ultimes sacrifices, de préserver son droit légitime à la justice et à la souveraineté recouvrée.