«La relation médecin-malade est extraordinaire» a déclaré, hier, le professeur Djamel- Eddine Nibouche, lors d'un débat qu'il a animé à l'hôtel Sofitel d'Alger. Le cardiologue de renom a ainsi résumé une très intéressante conférence centrée sur une étude qu'il a lui-même pilotée, portant sur «le niveau de pression artérielle en consultation chez l'hypertendu algérien traité». Réalisée sur une période de trois mois, entre août et novembre 2021, Pact II a été réalisé sur une population de 2000 patients répartis sur le territoire national. Cette étude apporte bien plus d'information sur l'hypertension artérielle (HTA) que celle réalisée en 2007 et qui a conclu à 23,5% HTA équilibrée dans la population de malades soumise à l'étude. Pact II se justifie, selon le professeur Nibouche, par la nature des recommandations, plus précises. On retiendra dans l'allocution du professeur en cardiologie la mobilisation de 100 médecins pour les besoins de cette enquête, dont les résultats ont révélé un risque cardio-vasculaire très élevé sur 38,5% des malades consultés. D'autres chiffres parlants ont été communiqués par le professeur Nibouche qui témoigne d'un certain laxisme des Algériens vis-à-vis de la HTA, qualifiée à juste titre de tueur silencieux. L'absence de symptômes apparents chez les hypertendus complique le traitement de la maladie, en ce sens que «les patients découvrent généralement le mal une dizaine d'années, après la déclaration de la maladie». C'est l'une des conclusions à laquelle est parvenue l'équipe à l'initiative de Pact II. L'analyse des résultats fait dire au professeur Nibouche que pas mal de dégâts provoqués par la HTA au niveau des organes nobles auraient pu être évités. Si Pact II révèle que 33,2% des malades ont le coeur atteint, 22% vivent avec un rein peu efficace et 12% se retrouve avec une insuffisance rénale, c'est principalement en rapport avec un diagnostic tardif. À voir l'ampleur de maladies subséquentes à la HTA, le cardiologue conclut à un défaut de dépistage précoce. Aussi, préconise-t-il une autosurveillance au moyen d'un appareil de mesure de la tension artérielle homologué que tout citoyen peut acquérir dans n'importe quelle pharmacie. Au même titre d'ailleurs que le thermomètre et le glucomètre. Pour les deux «tueurs silencieux» que sont le diabète et la HTA, la prévention à travers une hygiène de vie stricte, accompagnée par l'autodépistage régulier, surtout dans le cas d'une prévalence de la maladie dans le milieu familial «le facteur génétique est fondamental», insiste le professeur Nibouche, qui retient également la nécessité de campagne de sensibilisation à travers les médias lourds. «Il est très possible de réduire les conséquences d'une HTA en intensifiant un travail en amont de la maladie ou tout au moins au tout début», insiste-il, non sans préciser que cette manière de procéder «rendra la HTA moins létale et économisera beaucoup d'argent public dans des traitements qui, au final, ne guérissent pas les malades». Le professeur Nibouche est catégorique: «En soignant la HTA aux premiers jours de son apparition et en appliquant la nécessaire bi-thérapie associée à une hygiène de vie, il est tout à fait clair que l'on peut préserver tous les organes nobles et éviter ainsi une aggravation de la maladie.» En fait Pact II n'a pas amené à cette conclusion que Djamel- Eddine Nibouche professe depuis des dizaines d'années, mais a clairement confirmé, chiffres à l'appui, une tendance plutôt inquiétante, même si l'autre conclusion du professeur tient du fait que l'Algérien est mieux soigné, mais pas encore bien soigné. Il reste, qu'en tout état de cause, le meilleur ami du malade n'est autre que son médecin. C'est là, une conviction du grand cardiologue.