L'Expression: On a tendance à comparer l'offensive du Hamas en Israël aux attaques du 11 septembre 2001 qui ont ciblé les tours jumelles de New York, aux Etats-Unis. Peut-on réellement faire ce parallèle où, y a -t-il des différences fondamentales que certains en Israël et en Occident veulent garder sous silence? Arslan Chikhaoui: Comparaison n'est pas raison! À mon sens ce narratif est construit pour justifier toutes les actions et opérations dans le futur immédiat d'Israël sur les théâtres physiques et cybernétiques et également pour justifier une coalition de ses alliés stratégiques de l'OTAN. Toutes les opérations hybrides vont certainement toucher le Liban, la Syrie et l'Iran et l'accroissement exponentielle des attaques cybernétiques qui cibleront d'autres pays. La répression israélienne contre la bande de Ghaza s'annonce féroce. Pensez-vous que cela suffise pour garantir la tranquillité d'Israël sur plusieurs années? Je pense que les répressions seront dans une logique de représailles donc des plus violentes qu'elless aient pu exister et cela est très inquiétant car à travers cela, Israël compte recouvrer surtout la confiance de la société israélienne. Du point de vue de l'analyse, l'attaque surprise lancée par le Hamas palestinien contre l'entité sioniste marque une nouvelle tangente dans le conflit qui perdure depuis trois quarts de siècle. Cette attaque surprise se démarque des précédents affrontements. Tout d'abord, celle-ci survient 50 ans et un jour après le déclenchement de la guerre du Kippour, en 1973, au cours de laquelle une coalition formée de l'Egypte et de la Syrie avait lancé une offensive, elle aussi inattendue, qui avait permis une avancée dans la péninsule du Sinaï et qui rappelons-le avait ébranlé l'entité sioniste, menant notamment à la démission du Premier ministre de l'epoque, Golda Meir. De la même façon, l'attaque récente du Hamas a pris les forces israéliennes par surprise. Ensuite, l'ampleur des moyens utilisés par le Hamas dépasse largement les armes et méthodes utilisées lors des précédents affrontements: non seulement les militants du groupe ont-ils réussi à franchir, en plusieurs endroits, la barrière de sécurité érigée par Israël avant de s'en prendre à des villes et des bases militaires israéliennes. Par conséquent la tranquillité de la société israélienne a été secouée, voire ébranlée.À mon sens elle sera compliquée à recouvrer. Comment peut-on qualifier l'attitude ostensiblement pro-istraélienne dont a fait montre l'Occident, au contraire du reste du monde qui se veut plus objectif et met en évidence aussi la politique d'Apartheid de l'Etat Hebreu? En fait, cette situation se résume par le principe de la politique du double standard et de l'approche dominant/dominé avec tous ses corollaires. Le succès évident de l'offensive de la résistance palestinienne remet en cause le mythe de l'invincibilité d'Israël. Cela aura-t-il des conséquences politiques dans le dossier palestiniens? Merci de cette question pertinente. Sur le plan de l'analyse, il me semble que ce sera encore le statu quo qui sera observé comme conséquence immédiate. Mais cette situation va interpeller la communauté internationale sur le rôle des Nations unies et surtout sur la réforme institutionnelle de cette organisation et de son adaptation au nouveau contexte géopolitique qui prend un nouvel axe. Du point de vue de l'analyse, l'offensive de la résistance palestinienne survient au moment où la société israélienne est plus divisée que jamais. Redevenu Premier ministre après avoir brièvement perdu son poste, menacé par des poursuites, Nétanyahou, déjà à droite de l'échiquier politique, a besoin des députés de la droite dure pour assurer que son gouvernement dispose d'une majorité d'élus et renforcer son positionnement. Dès son retour, il a entamé une réforme vivement controversée du système judiciaire. La réforme vise à accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats. Le gouvernement israélien estime qu'elle est nécessaire pour assurer un meilleur équilibre des pouvoirs, mais ses détracteurs craignent qu'elle ouvre la voie à une dérive autoritaire. Toutefois, ce conflit pourrait éventuellement être utilisé comme un facteur de réunification de la population israélienne, comme cela s'est déjà produit par le passé. De l'autre côté, Israël avec le soutien de ses alliés stratégiques de l'OTAN qui a entamé le processus dit «Abraham 2» concernant la poursuite de ses démarches pour normaliser ses relations diplomatiques avec d'autres pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord se trouve miné, voire compromis. Ce processus, qui concerne présentement l'Arabie saoudite pourrait être suspendu en raison de la reprise des tensions de très forte intensité et du fait que le Premier ministre israélien a déjà annoncé la couleur en affirmant que cette guerre prendra du temps.