Le chef de l'Etat déplore le manque d'influence du Mouvement des pays non alignés sur la scène internationale. «Le Mouvement des pays non-alignés ne traduit pas l'importance de son poids numérique», a affirmé hier le président de la République, Abdelaziz Bouteflika dans une interview accordée à l'APS. Et de déplorer: «Cette présence se limite aux enceintes du système des Nations-unies où les membres du Mouvement, gagnés par l'érosion du champ des solidarités traditionnelles entre eux, arrivent à peine à dégager des positions minimales sur des questions internationales essentielles d'intérêt pourtant commun.» Evoquant le contexte international, marqué par l'exacerbation des tensions et des crises et par des changements structurels qui s'opèrent sous l'effet de la déferlante unilatéraliste qui envahit le monde, depuis les évènements du 11 septembre 2001, dans lequel s'est tenu le dernier sommet du Mouvement des pays non-alignés, le président de la République a qualifié, à juste titre, «le terrorisme international et la prolifération des armes de destruction massive sont de nouvelles menaces à la paix et à la sécurité internationales» et de préciser: «Il n'en demeure pas moins que l'usage abusif qui est fait de ces deux notions a eu pour effet de verrouiller le débat international et d'imposer une grille d'analyse et de lecture fortement réductrice.» Deux notions, selon Bouteflika, galvaudées et présentées comme alibi pour justifier la légitimation des interventions étrangères et des agressions les plus fragrantes, l'occupation étrangère, les atteintes à la souveraineté nationale et à l'intégrité territoriale des Etats et la remise en cause du droit des peuples à l'autodétermination et à la résistance contre l'occupation étrangère. Cet unilatéralisme se manifeste par le rejet de tout dialogue et de négociation, seuls moyens à même de régler tout problème politique, estime Bouteflika. S'en prenant aux Etats-Unis qui veulent imposer leur diktat, Bouteflika dira «au Moyen-Orient, la situation reste, à maints égards, explosive, alors que les Etats-Unis d'Amérique s'entêtent à vouloir imposer, contre vents et marées, leur projet du Nouveau Moyen-Orient». Sur ce point, Bouteflika se désole du manque de réaction des grandes puissances qui ont empêché le Conseil de sécurité d'assumer ses responsabilités et cela «en violation flagrant du droit international et de la 4e convention de Genève relative à la protection des civils en temps de guerre» cela en référence à l'agression israélienne au Liban. Sans vouloir être plus explicite, Bouteflika dira qu'Israël s'est livré à une agression contre le Liban «par procuration». Le même raisonnement est tenu par Bouteflika quant à la question palestinienne où le mouvement Hamas, pourtant démocratiquement élu, est la proie d'attaques israéliennes. «Là aussi, Israël semble trouver en l'Occident l'allié sûr pour remettre en cause le choix du peuple palestinien et se défaire d'un gouvernement qui fait obstacle à ses visées expansionnistes et annexionnistes», soutient le chef de l'Etat. Cet état de fait est cautionné par le Conseil de sécurité, laisse entendre Bouteflika. «Le Conseil de sécurité des Nations unies donnant, de plus en plus, la preuve, qu'il ne peut fonctionner autrement que par son instrumentalisation ou sur la base de la politique de deux poids, deux mesures. L'attitude du Conseil vis-à-vis de la situation au Moyen-Orient, comme ce fut le cas récemment pour le Liban et l'Iran, est, à cet égard, édifiante», réaffirme Bouteflika. Ce qui a provoqué, notamment chez les peuples arabes et musulmans, un sentiment d'hostilité vis-à-vis de l'Occident. Aussi, et pour y faire face, il est impératif, relève le Chef de l'Etat, que ces pays opprimés développent un besoin de solidarité et une cohésion pour résister aux pressions qu'exerce l'Occident «de manière individuelle sur certains pays membres du Mouvement». C'est dans ce contexte que l'Algérie tente de réhabiliter le Mouvement des pays non-alignés dans ses capacités à prendre en charge les préoccupations de ses pays membres, soutient Bouteflika. «L'efficacité du Mouvement dépend largement de la capacité de ses membres à transcender leurs propres divergences et à dépasser leurs contradictions d'intérêts», souligne, néanmoins, Bouteflika dans son intervention. Abordant le différend irano-américain, Bouteflika dira «le Mouvement devrait dénoncer la pratique discriminatoire en cours dans le domaine de la non-prolifération et du désarmement ainsi que la tendance de plus en plus marquée à privilégier le préjugé de culpabilité sur la présomption d'innocence quand il s'agit de pays en développement». Dans ce sens, Bouteflika n'a pas manqué de réitérer la position de l'Algérie: «La réforme du Conseil de sécurité constitue l'une des priorités du Mouvement des PNA aux Nations unies, tant le rôle joué par cet organe principal de l'ONU, en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, est important». En outre, le Mouvement «doit se mobiliser pour relever les défis que constituent le parachèvement de la décolonisation, le règlement pacifique des conflits, le terrorisme, le développement économique et social, le désarmement, le droit à l'accès sans entraves aux technologies à des fins pacifiques de développement, la dette, l'éradication de la pauvreté et les épidémies», conclut le chef de l'Etat.