Chacun perçoit l'Histoire à sa façon. Certains se contentent de l'écrire avec un petit «h», au minuscule, tandis que d'autres préfèrent aller plus loin. Ils vouent un respect sans borne à la majuscule. Insatiables, ils estiment qu'en histoire, rien n'égale un «H» bien debout sur ses deux pieds; car, au demeurant, et en terme de mémoire, le temps hâtif et furtif n'offre sa miséricorde qu'à ceux qui idolâtrent la grandeur. Bien qu'il fut d'une simplicité sans égale, comme en témoignent ceux qui l'ont connu, Mahfoud Kaddache appartient tout de même à la trempe de ceux qui ne se sont pas contentés de faire l'Histoire, mais encore de l'écrire. Il était à la fois acteur et observateur. Si la tâche n'est pas aisée, elle n'est tout de même pas impossible. «Je savais, dès les premiers jours de la Révolution, qu'il était un homme digne de confiance» témoigne Abdelhamid Mehri, avant-hier, à la Bibliothèque nationale d'Algérie, sise à El Hamma, Alger, lors de l'hommage appuyé qui a été rendu à l'historien et militant de la cause nationale, Mahfoud Kaddache. Organisé à l'occasion du quarantième jour de sa disparition, survenue au début du mois de juillet dernier, cet hommage a drainé nombre de personnalités politiques, artistiques et autres. «Il était un compatriote sans appartenance» ajoute M.Mehri. Le président de la Fondation 8 Mai 1945, Mohamed Corso, a souligné, dans son intervention, l'importance du travail de recherche réalisé par Mahfoud Kaddache, estimant que «ses livres restent une référence pour les chercheurs aussi bien algériens qu'étrangers». M.Corso, qui a également relaté le parcours patriotique du Pr.Kaddache, a émis le voeu de voir la totalité de ses livres traduits en langue arabe car, a-t-il dit, «c'est un patrimoine pour l'histoire et pour l'humanité». De son côté, M.Saâd El Kenz a retracé le parcours du défunt historien tout en rappelant ses «nombreuses qualités et vertus», notamment son «humilité quasi mystique» et sa rigueur. «Il était d'une grande vivacité et avait le sens de l'écoute», a affirmé l'orateur. Pour rappel, Mahfoud Kaddache est né en 1921 à la Casbah d'Alger. Orphelin de père à l'âge de 6 ans, il a exercé différents métiers, dont celui de marchand de légumes et vendeur de produits de beauté. Féru d'histoire, le professeur Kaddache était l'un des piliers des Scouts musulmans algériens (Sma). Il y a occupé plusieurs postes, dont celui de commissaire local, chef du groupe El Kotb, à Alger, avec lequel il participe aux manifestations du 8 Mai 1945. Après le déclenchement de la guerre de Libération nationale, Mahfoud Kaddache a dû subir plusieurs arrestations et détentions tout en faisant l'objet de plusieurs tentatives d'assassinat par l'Organisation de l'armée secrète (OAS). De ses oeuvres, on cite L'Emir Abd El Kader, Récits de feu, Histoire du nationalisme algérien. Question nationale et politique algérienne (1919-1951) Tome I et II. L'Algérie des Algériens, de la Préhistoire à 1954.