«Nos arrière-petits-neveux ne doivent pas dire qu'on ne leur a laissé que honte et désespoir», dit-il. Ahmed Mahsas a invoqué «la raison d'Etat et de la Révolution» pour éviter de parler de certaines vérités historiques qui ne sont pas agréables à entendre. Cette réponse a été donnée, hier, lors de l'émission Fi el oudjiha que diffuse la Radio Chaîne I chaque dimanche. Placée sous le titre générique de Génération novembre et les défis de la continuité, l'émission d'hier se voulait être un pont entre les acteurs de la guerre de Libération et les générations futures. L'invité de l'émission considère que les manuels d'histoire présentent des «raccourcis», des «confusions», un «manque d'objectivité»; «le nationalisme existe mais il n'est pas approfondi». Ce constat suppose une réadaptation des manuels scolaires parce que «l'histoire doit être une matière primordiale dans la formation de l'enfant», indique Mahsas. L'esprit de Novembre est toujours valable; «ce fut une décision stratégique et elle doit inspirer tout Algérien lorsqu'il rencontre des difficultés». C'est le cas de le dire aujourd'hui, dans l'ère de la mondialisation, qui «n'a aucune consistance philosophique», répond-il. «Nos arrière-petits-neveux ne doivent pas dire qu'on leur a laissé honte et désespoir», en faisant la sourde oreille sur certains principes élémentaires. Il pense à la loi du 23 février, votée par le Parlement français et qui a provoqué une grande polémique à Alger. Mahsas ne leur demande même de présenter des excuses. Car la réalité est tangible. «Nous avons libéré notre pays. Lorsque la France est sortie, elle a laissé plus de 90% d'analphabètes; les richesses étaient entre les mains d'une poignée d'Européens, etc. Si c'est cela le côté positif de la colonisation...». Aux origines du 1er Novembre 1954, «nous voulions décentraliser le centre de décision, c'était une stratégie, comme on ne voulait pas que la direction soit concentrée dans un même lieu». Après la crise du PPA-Mtld, «il y avait un petit noyau qui est à l'origine du 1er Novembre 1954». Les Aurès ont beaucoup souffert des représailles pendant la première année. C'est ce qui a motivé Zighoud Youcef à provoquer les événements du Nord Constantinois pour briser l'étau. Puis il y a eu le congrès de la Soummam. Là, Mahsas a un autre point de vue qui diffère totalement de ce qui est admis. «Ce ne sont que cinq personnes qui ont tenu le congrès», dit-il. Les questions fusent de partout sur le congrès de 1956. Mahsas lève les bras. «Je ne veux pas en parler parce que vous allez me conduire à dire des choses que je ne veux pas évoquer». Il y a un problème d'ordre sémantique. «Le congrés américain est en train d'analyser La bataille d'Alger pour combattre le terrorisme; alors qu'il s'agissait d' une guerre de Libération; on a tendance à mélanger les concepts», relève-t-il, «il faut appeler les choses par leur nom.» En somme, on a trouvé un Mahsas fatigué, qui ne voulait pas répondre à toutes les questions, préférant étudier le thème proposé avec les outils d'un sociologue. Mais les journalistes voulaient des faits, des témoignages. L'émission s'est terminée en queue de poisson.