L'alerte vient d'être donnée par un jeune ingénieur algérien qui se bat, depuis dix ans, en duel contre ce ravageur d'oliviers. Il ne manquait plus que ça. Après les incendies criminels qui ravagent chaque année les oliviers en Kabylie, voilà qu'une bestiole s'attaque à ce qui reste des oliveraies dans cette région. Il s'agit d'un insecte extrêmement ravageur qui s'attaque à l'olivier. Cette bestiole nouvelle dans tout le bassin méditerranéen a été identifiée par un jeune ingénieur d'application travaillant au niveau de la Direction des services agricoles (DSA) de Béjaïa, Hamlaoui Mohand Arezki. «Depuis dix ans, on assiste à l'installation d'un nouveau ravageur appelé xylophage sur la culture de l'olivier. Le prédateur a été observé, pour la première fois, le 11 juin 1995 quand un fellah s'est présenté à nos services, intrigué par ce qui arrivait à ses oliviers. Il nous a donc fait cas de son problème en vue de trouver une solution à ses oliviers dont les jeunes rameux se cassent sans raison apparente» a noté cet ingénieur dans un de ses rapports au début de ses travaux. En effet, depuis dix ans, ce chercheur «indépendant» et démuni mène une guerre sans merci contre ce parasite ravageur. Comment agit ce parasite? Il creuse des galeries au niveau des branches d'oliviers et il vide complètement le rameau qui se fragilise. L'ingénieur algérien a constaté qu'il se nourrit de bois qu'il transforme en cire. «Plus exactement, il se nourrit de sève qui comporte du glucose. C'est ce qui explique, dit-il, sa préférence pour les jeunes rameaux». Ainsi vidé de son contenu, le rameau se casse au moindre choc ou au moindre souffle de vent. Conséquence: les rameaux subissent un dépérissement et deviennent rabougris. Cet insecte devient actif au crépuscule et se couche avec la lumière du jour. Il ne résiste pas à l'humidité. Cependant, ce foreur d'oliviers constitue un problème grave dans les oliveraies de la wilaya de Béjaïa, plus précisément au niveau de la région de M'cina où les jeunes oliviers dépérissent ou subissent un retard de croissance. Il se présente sous forme de foyer d'infestation dans les vergers d'oliviers. On le rencontre dans la plupart des oliveraies de M'cina. Il s'attaque à toutes les variétés d'oliviers même l'oléastre. Ayant comme viatique la volonté, le jeune ingénieur a entamé d'abord des recherches bibliographiques pour situer et identifier le mal, seul, contre le ravage. Il s'agit d'un nouveau insecte mandibulate (qui porte des mandibules); xylophage (qui se nourrit de bois) son genre est nommé xylomesde. L'espèce n'est pas définie dans tout le bassin méditerranéen à ce jour. En effet, suite à ses recherches, M.Hamlaoui a abouti au résultat que ce genre n'est identifié qu'au niveau de Béjaïa. Il a été relevé l'absence de signalement de cette espèce dans tout le bassin méditerranéen. Ensuite, le chercheur algérien a pu isoler cette espèce, établir une cartographie d'infestation, cerner le cycle biologique et étudier les facteurs agissant sur le développement et la multiplication de ce parasite. «L'insecte s'attaque particulièrement aux jeunes oliviers de moins de vingt ans», note-t-il encore. Aucun moyen de lutte n'est actuellement disponible. Les méthodes chimiques sont inefficaces, reste, selon le chercheur, la méthode biologique mais qui n'est pas encore élaborée. La seule chose qui reste est la méthode prophylactique. Elle consiste à couper les rameaux infectés et les incinérer ensuite, mais cette dernière est loin d'être efficace. Le problème reste ainsi posé et le danger s'aggrave avec le laxisme des autorités en charge de la protection des espèces végétales. La wilaya de Béjaïa dispose actuellement d'un important potentiel oléicole estimé à environ cinq millions d'oliviers. Entre 1997 et 2007, plus de 2284 oliviers ont été attaqués. Au plan prévisionnel, 28% des oliviers seront infectés dans dix ans. Le pire est réellement à craindre. L'unanimisme des chercheurs le manque de moyens et de formation inquiètent au plus haut point le jeune chercheur algérien. «Si jusque-là, j'ai mené seul le combat contre ce parasite, c'est par amour d'abord pour mon pays, ensuite pour un patrimoine inestimable que représente pour moi ainsi que pour ma région, l'olivier», s'est-il plaint, espérant un geste de bonne volonté de la part des responsables et des autorités. «Je souhaite bénéficier d'un stage ou d'une formation dans un des Instituts à l'étranger qui sont prêts à m'accueillir». Des chercheurs de renommée mondiale dans le monde agricole et agronomique, ont salué la découverte du jeune ingénieur algérien. Yves Arambourg, éminent chercheur français, ex-directeur de l'Inra (Institut national des recherches agronomiques) à Paris, auteur du traité d'entomologie oléicole, édité en 1986 pour le conseil oléicole international de Madrid, a eu des propos très élogieux à l'endroit de M.Hamlaoui: «A ma connaissance, affirme M.Arambourg, c'est la première fois qu'on cite le xénomede sur l'olivier, et je ne - pense pas qu'il y ait de publications concernant ce xelophage. Votre travail est original et peut-être pouvez-vous l'adresser au conseil oléicole international à Madrid pour qu'il le publie dans sa revue» lui a-t-il écrit dans une correspondance. «Ce parasite n'est pas identifié en Italie, c'est la première fois qu'il est cité» a noté M.Ciorgio Nuzzaci, professeur à l'Institut d'entomologie agraire à l'université Igli à Bari (Italie). Le directeur de l'Institut tropical de l'olivier en Gréce, le Dr Nic Michelakis, a estimé que «c'est un travail original, cette espèce que vous venez d'identifier n'existe pas en Grèce». Pour sa part, Taïb Jardak, chercheur à l'Institut de l'olivier de Tunisie, a jugé que «cette espèce n'a jamais été signalée dans le bassin méditerranéen, je suis prêt à vous apporter toute mon aide dans ce travail».