On célébrait la Journée national du chahid hier. Au carré des martyrs où moudjahidine, fils de chouhada et coordinations s'étaient rassemblés, hier matin, au lever du jour, l'heure était au recueillement et aux souvenirs. L'âme de plus de 600 martyrs dont les noms, les dates de naissance et de décès sont gravés dans le marbre noir, devait être ravivée en cette matinée d'entendre que leur sacrifice suprême n'a pas été vain: l'Algérie, algérienne, comme ils le criaient haut et fort de leur vivant, se porte bien. La gerbe de fleurs déposée au pied de la stèle, l'hymne national entonné et le drapeau déployé dans un ciel que les rayons du soleil nuançaient d'un bleu intense, il fallait quitter ces lieux de repos et de mémoire pour la Maison de la culture, à une centaine de mètres d'ici... Ce qui frappait ce jour-là, c'est une exposition de livres sur la révolution et de photos représentant les plus grandes figures de cette révolution ainsi que de quelques martyrs de la première heure. Les portraits et les livres nous renvoient aux heures les plus glorieuses de notre histoire, car si le soulèvement populaire et l'insurrection n'ont cessé de marquer cette longue période d'occupation française, c'est entre 1954 et 1962 que la révolte a connu son apogée. Et cela n'a pu être possible que par la conjugaison d'idées révolutionnaires et la volonté d'en découdre. Quand on contemple les photographies de ces héros, l'on s'étonne de deux choses: l'extrême jeunesse de ces figures où pas un seul cheveu blanc ne se remarque sur la tête et la détermination qui se lit sur leurs traits juvéniles. L'on se dit ce qu'il leur a fallu comme courage pour aller au combat qu'ils livraient en laissant derrière eux père, mère, femmes, enfants et amis, certains qu'ils y laisseraient la vie, et ce qu'il leur a fallu comme force de caractère pour en sortir, à la fin, victorieux. D'autres photos représentent des martyrs de la région. Certains comme Chabane Ben Arab (1933-1958), Saïd Mokrani (1934-1955), Belkacem Hadiouche (1920-1955) et d'autres, à peine plus âgés, mais tous fauchés en plein combat par les balles ennemies. Aucun parmi la dizaine de photos qui les immortalisent n'ont pu aller plus loin que l'année 1959. Tous étaient très jeunes et si nombre d'entre eux étaient habillés en civils, les autres arboraient fièrement le calot, mitraillette aux poings.