Après l'Egypte, l'Irak ou la Syrie, une enquête judiciaire confirme que des islamistes français d'origine algérienne ont séjourné et se sont entraînés au nord du Liban. Après les «Algériens afghans», les filières tchétchènes et les djihadistes en Irak, voilà que des «Algériens français» font l'actualité. Selon une étude publiée récemment par Le Figaro, les services antiterroristes français ont suivi le parcours d'islamistes ayant gagné des pays comme l'Arabie Saoudite, l'Egypte, la Syrie, le Yémen depuis le début de la guerre en Irak à partir de l'Hexagone pour participer au djihad irakien. Le Liban s'ajoute aujourd'hui à la liste. Depuis quelques semaines, les policiers enquêtant depuis plus d'un an sur le groupe islamiste de l'Algérien Safé Bourada, démantelé par la DST en septembre 2005, ont la confirmation que des extrémistes se sont rendus, l'an dernier, au Liban pour s'y entraîner sous la houlette d'islamistes locaux et de membres d'Al Qaîda, au maniement des armes et à la confection d'explosifs. Selon l'accusation, cette cellule radicale était en lien avec le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc) algérien et avec la filiale irakienne d'Al Qaîda. Selon Le Figaro, la DST savait déjà qu'un des membres du groupe Bourada, désigné sous le terme d'Ansar El-Fath (Partisans de la victoire), s'était bien rendu au Liban. Un voyage motivé, selon l'intéressé, par des raisons d'ordre familial et touristique. De source proche de l'enquête, au moins deux autres membres du groupe devaient, également, se rendre au Liban et l'ensemble des islamistes étaient «programmés à court terme» pour le pays du Cèdre. Pendant des mois, Paris a tenté d'en savoir plus sur cette expédition libanaise. Mais la situation tendue au Liban et en Syrie rendait la chose plutôt difficile. De nouveaux témoignages, recueillis, notamment auprès d'Algériens, membres du groupe Bourada, permettent d'y voir plus clair. Début 2005, cite toujours le journal français, un islamiste quitte son logement de Trappes (Yvelines) à destination de la région de Tripoli, au nord du Liban. La destination n'est guère étonnante: Tripoli et ses environs sont connus pour abriter des groupes islamistes radicaux palestiniens et libanais. En 2000, à Sir Ed-Danniyé, une localité située à l'est de Tripoli, un groupe d'extrémistes locaux s'en étaient même pris à l'armée libanaise avec des morts et des prisonniers à la clé. La guerre en Irak, le chaos qui s'en est suivi et la proximité de la Syrie ont encore compliqué les choses. Arrivé à Tripoli, le djihadiste français a été pris en charge par une cellule dirigée par un Libanais, mais animée par des instructeurs saoudiens et égyptiens liés à Al Qaîda. En guise de camp d'entraînement, les cours ont été donnés dans quelques maisons discrètes des alentours. En quelques mois, l'habitant de Trappes a été initié au maniement des armes mais surtout à la confection d'explosifs et à la fabrication de systèmes de mise à feu à l'aide de téléphones portables. Les terroristes se préparaient, visiblement, à l'utilisation d'engins explosifs classiques et non chimiques comme l'avaient craint les enquêteurs français dans un premier temps. Plutôt que participer au djihad irakien, la mission des djihadistes formés à Tripoli était, en effet, de revenir en Europe pour y perpétrer des attentats. Un vaste coup de filet, qui avait concerné une cinquantaine de jeunes «qui s'apprêtaient à rejoindre l'Irak via la Syrie ou la Jordanie», a été opéré à Alger, en mars 2006, selon une source policière contactée à Alger. Les brigades Recherches et intervention de la police, sur des indications fournies par les services spéciaux, avaient opéré subrepticement des descentes ciblant des jeunes, dont la moyenne d'âge ne dépasse pas les 25 ans. Selon les chefs d'inculpation retenus contre ces jeunes, leur intention était de s'enrôler dans la résistance irakienne.