«Au coeur des signes rupestres, les ombres se confrontent pour dissimuler une lumière rayonnante comme si le prochain coucher de soleil sombrait dans un nouveau silence aussi mystérieux que les pierres du Sefar.» Une invitation pour séjourner durant quinze jours à Djanet, à laquelle on répond favorablement et voilà comment on succombe au charme majestueux de cette ville, en l'immortalisant d'abord en images photographiques puis picturales en veillant à mettre en avant ses traditions, dévoilant aussi certains de «ses endroits bien entretenus et d'autres qui ne sont pas encore en état de fertilité». Puis c'est le côté plastique qui prend le pas et cela constitue une superbe exposition qui se tient actuellement à l'hôtel Sofitel, sous le titre générique: «Tassili, Espace et Lumière». Cette expo de Morad Foughali, dont le vernissage a eu lieu samedi dernier, regroupe une vingtaine de tableaux réalisés en différentes techniques: encre, pastel, technique mixte (encre et pastel, gouache, pastel, encre), encre de chine... L'artiste-peintre s'est servi de photos comme documents de certains lieux qu'il a visités puis immortalisés afin de «se repérer et se situer par rapport au sujet». C'est donc à partir de ces photos qu'il a réalisé ses peintures. Pour les illustrer, l'artiste a choisi de les accompagner de textes à forte consonance poétique. Dans la plupart de ses oeuvres, M.Foghali retrace ce voyage qui l'a mené de la palmeraie de Djanet, en passant par les ksours et son minaret du 16e siècle, à la guelta d'Issendilene, les colonnes de grès de Tamrit et enfin à la sublime guelta de Sefar. Aussi, c'est dans un style semi-figuratif qu'il a su reproduire la vie «pas forcément monotone» de Djanet décrivant ses traditions, ce legs ancestral, sa Casbah séculaire et ses autres monuments historiques. Aussi, les couleurs qui prédominent dans cette exposition sont incontestablement le bleu de cette eau qui coule miraculeuse, source d'espoir et d'énergie, que l'on retrouve notamment dans la guelta de Sefar qui gît «entre les massifs gréseux, la verdure introduisant le ruissellement d'une ondée serpentant roche millénaire et pierre précieuse». Aussi, on y aperçoit ce vert éclatant de «ce jardin aux palmeraies, ombrage ensablé et bordures en bambou accueillant passants et visiteurs pour que tout mouvement naturel résonne tel un fruit de sagesse», n'oublions pas ces terres agricoles qui tendent à se généraliser à Djanet et c'est tant mieux. Omniprésent aussi est, bien évidemment, le rouge ocre des pierres des ksours, notamment d'Adjahil datant du 15 ou 16e siècle et d'El Mihane. C'est en tout cas avec un réel plaisir et spontanéité que l'artiste a su matérialiser l'authenticité de ces paysages. Homme discret, méditatif, Morad Foghali aime, quand vient le coucher de soleil, pour envelopper la nature du Tassili par ce manteau de lumière et de dorure chatoyante, en attendant de revoir le soleil encore plus éclatant le lendemain, comme en témoigne le titre de ce tableau Quand le jour se lève. «Les souvenirs, dit l'artiste, sont emportés par le passé, seules les pierres refusent de sombrer dans l'oubli afin que la terre retrouve un nouveau jour.» Le passé mis à nu symbolise ici notre mémoire collective que le peintre souhaite perpétuer. Sauvegarder notre patrimoine, tel semble être son souci principal pour mieux évoluer avec notre temps. Le seuil du passé, Réminiscence, Longévité, sont autant de titres qui évoquent ce désir de sauvegarder les traces de notre passé, comme ces gravures, ces dessins rupestres et «la roche qui demeure l'unique rescapé du temps millénaire». Outre ces paysages enchanteurs de Djanet, il est également question à travers cette exposition de l'hospitalité des gens de Djanet, de ces familles du Tassili peint dans le style figuratif, ces êtres qui préservent leurs us et coutumes dans la plus grande discrétion, à l'image de «ce forgeron dont le regard est noirci par la braise d'un passé indélébile dans son atelier où seules ses mains expriment sa présence...» Cette exposition de l'artiste Morad Foghali, qui en compte plusieurs d'ordre individuel et une collective, est une invitation au dépaysement. Une expo réussie qui est résumée par cette phase lancée par une visiteuse: «Je retrouve là Djanet!» A découvrir.