«L'exécution illustre, jusqu'à la nausée, l'échec de la reconstruction d'un Etat national irakien», écrit Le Figaro. «Non à la peine de mort», écrit l'éditorialiste du Monde. Aussitôt, il oublie son idée première pour faire le procès d'une dépouille. Même Berlusconi qu'on ne peut accuser d'être pro-arabe n'a pas omis de dénoncer la pendaison de Saddam. «Nous continuons de penser que la peine de mort ne doit pas être appliquée», s'insurge l'italien Romano Prodi. Puis l'espagnol Zapatero: «Je ne défendrai jamais le principe de la peine de mort, même pour le pire des politiciens». Mais, en même temps, «tous les dictateurs doivent répondre de leurs actions, tous». L'Allemagne officielle rejette également la peine de mort. Le rappel est utile en pareille circonstance. «L'exécution illustre jusqu'à la nausée l'échec de la reconstruction d'un état national irakien et son naufrage dans une violence endémique», écrit l'éditorialiste du Figaro et souligne que «devant la potence, jusqu'à l'ultime moment», l'ex-président irakien «a fait preuve de dignité au milieu du ballet désordonné de ses bourreaux en cagoule noire». Libération qui consacre toute sa première page à la mort de Saddam, sur un fond entièrement noir, écrit que «la pendaison expéditive» de Saddam Hussein «est plus un acte de guerre civile qu'une décision de justice». «Saddam Hussein est mort sans ciller. Il a subi son sort avec la dignité d'un chef d'Etat» et «il a réussi, une dernière fois, à inspirer le respect», lit-on dans un autre article. Selon le journal «le meurtre de Saddam approfondit encore le désordre et discrédite un peu plus ces troupes américaines occupantes». Ce journal a aussi mis l'accent sur le «procès bâclé et la mise à mort expéditive de l'ancien président» irakien qui «ont suscités le malaise en Europe et dans le monde arabe, tout comme les vidéos de son exécution». Libération a évoqué une série de réactions dont celle du commissaire européen belge, Louis Michel, qui a qualifié cette exécution d'acte «barbare», de la candidate socialiste à la présidentielle française 2007, Ségolène Royal qui a exprimé son «dégoût», et de François Bayrou, président de l'UDF (centre-droit) son «trouble». Le président d'honneur de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (Fidh), Patrick Baudouin, qui a affirmé ressentir «de la répulsion face à des images d'un voyeurisme extrêmement malsain». Les ONG, y compris américaines, ont été conséquentes avec leur principe élémentaire de défense des droits de l'Homme, pour le cas Saddam. Elles ont unanimement condamné l'exécution, pendant que les médias se sont réjouis, dans leur ensemble, de la pendaison de Saddam. Les sociétés arabes ont été touchées dans leur dignité. Toutes les chaînes de télévision arabes ont souligné la maladresse américaine qui aura des répercutions néfastes à long et moyen termes dans les rapports avec le monde arabo-musulman. Saddam qui n'attirait que peu de sympathie arabe, vendredi soir, est devenu le martyr de la nation samedi matin, le jour du sacrifice. Pour les Arabes, il n'y a pas d'autres explications; les «nouveaux évangélistes» qui ont envahi la Maison-Blanche, depuis l'avènement de W.Bush, ont des penchants belligérants envers le monde arabo-musulman. L'invasion de Baghdad, capitale des Abassides qui renvoie à l'âge d'or de la civilisation musulmane- et la pendaison d'un président arabe, le jour sacré de l'Aïd, constituent deux facteurs d'hostilité caractérisée envers le monde musulman.