Tamazight sera enseignée dans les écoles algériennes, «partout où la demande s'exprime», précise un communiqué du gouvernement. Adoptée mardi dernier, l'ordonnance amende et complète celle du 16 avril 1976 portant organisation de l'éducation et de la formation. Par cet avant-projet d'ordonnance, le gouvernement précise que «l'enseignement de tamazight, en tant que discipline du système éducatif, sera garanti par l'Etat, qui s'engage à garantir l'effectivité de l'enseignement de tamazight par la mobilisation de l'ensemble des moyens nécessaires». Comme il est visé dans cet avant-projet «la prise en charge de la dimension culturelle» ainsi que sa présence effective «dans les programmes des sciences sociales à tous les niveaux du système éducatif...». Sur la table des discussions nationales depuis au moins les années 70, pour ne prendre en compte que les années post-Indépendance, tamazight a connu une présolution avec le HCA et un début de solution avec cet avant-projet d'ordonnance. Même s'il est vrai qu'«il ne s'agit là que d'un tout premier pas», selon des anciens animateurs du MCB. Portée par plusieurs formations politiques et le grand mouvement dit du «printemps berbère», tamazight a connu de grandes avancées, y compris chez ceux qui continuent, cependant, à mettre cette première langue du pays dans la case du patrimoine national. Pas plus tard qu'hier, en recevant les partis politiques, le chef de l'Etat n'a pas manqué d'évoquer la prochaine constitutionnalisation de tamazight en tant que langue nationale. Contactés, certains partis politiques et personnalités ont bien voulu analyser à chaud cette décision du gouvernement. Ainsi, pour le PT de Louisa Hanoune, c'est M.Groucène Abdelkader qui, en tant que membre de la direction nationale de ce parti, trouve que «tout ce qui va dans le sens du règlement du problème est un pas qu'il faut saluer». Même si pour le PT «ce n'est pas encore suffisant, cette institutionnalisation est un pas en avant». Pour Ennahda, c'est le responsable à la communication qui précise que «tamazight est déjà enseignée en Kabylie» en soulignant que «cette question est évoquée par la Constitution». Pour lui, «tamazight est le patrimoine de tous. Mais il y a lieu de préserver tout ce qui peut toucher aux constantes de la nation». Et de conclure: «Toute solution à un problème national venant de nationaux est un pas.» M.Chorfi, porte-parole du RND, estime, pour sa part, que cette décision du gouvernement annonce les prémices d'un règlement de la question. D'autant plus que «le chef de l'Etat s'est engagé à résoudre ce problème national...». S'exprimant en tant que citoyen ayant longtemps travaillé et travaillant toujours pour cette langue, M.Mohand-Arezki Ferrad, député, rappellera d'abord «(son calvaire d'universitaire)», «exclu pour la seule raison que je faisais quelques recherches liées à tamazight». Il évoque «l'étape du HCA» qui, selon lui, «n'a rien apporté à la question» et applaudit au fait qu'«enfin, un Chef du gouvernement s'exprime par des décisions, certes, de moindre envergure, sur tamazight». Cette langue, conclut-il, gagnerait à être sérieusement prise en charge par les scientifiques. Du côté des anciens militants du MCB, «l'analyse à chaud n'est pas une analyse solide». Toutefois, l'un d'eux rappelle «la longue marche du mouvement», salue les avancées de tamazight et souhaite sa réelle prise en charge par l'Etat pour en faire une «véritable langue nationale et officielle...». Mais encore, faut-il pour cela, continue l'un d'eux, que «la volonté soit réelle et non électoraliste». Les ârchs, pour leur part, du moins selon plusieurs délégués, «soupçonnent cette démarche électoraliste» et affirment que «la seule place de tamazight est celle de langue nationale et officielle...».