Le rassemblement annuel des dirigeants africains s'est focalisé, hier, sur le conflit du Darfour où Khartoum est incriminée. Le huitième sommet ordinaire de l'Union africaine s'est ouvert hier à Addis-Abeba en présence du nouveau secrétaire général de l'ONU, le Sud-Coréen Ban Ki-moon, qui étrenne, ainsi, officiellement, son mandat à la tête de l'organisation internationale. Mais, d'emblée, le président de la Commission africaine, Alpha Oumar Konaré, entre dans le vif du sujet en abordant l'un des casse-tête du continent africain le conflit du Darfour et les retombées négatives qu'il a induites jusqu'ici. M.Konaré a, dans cette optique, appelé hier Khartoum à «arrêter les bombardements» au Darfour, région du Soudan en guerre civile depuis 2003, et évoqué un «chaos» possible en Somalie, si rien n'est fait pour aider les autorités transitoires somaliennes, lors de l'ouverture du sommet de l'UA. Usant d'un langage cru, Alpha Oumar Konaré a demandé au Soudan «d'arrêter les massacres et les bombardements» au Darfour. Le président de la Commission africaine a indiqué, par ailleurs, qu'«il y a eu des avancées ces derniers mois au Darfour. Un accord est en gestation entre l'UA, les Nations unies et le Soudan. Il s'agit de l'appliquer sans tarder et de le respecter» et d'ajouter: «La paix au Soudan, c'est la paix au Tchad et en République centrafricaine.» Un autre problème, monté en épingle ces derniers jours, est celui de la présidence tournante de l'UA, qui a accaparé les esprits, le Tchad menaçant de «suspendre sa participation à l'UA» si la présidence de l'organisation échoit au Soudan. Le président tchadien, Idriss Deby Itno, affirmait d'ailleurs, hier, à Addis-Abeba, que «confier la présidence de l'UA au Soudan, ça ne va pas arriver». Le problème s'est déjà posé l'an dernier lorsque finalement, après moult tractations, le Congo a été chargé d'assurer la présidence tournante. Sur cette question, le président soudanais, Omar El-Bechir, a affirmé que ce ne serait «pas un problème» si la présidence de l'Union africaine (UA) ne lui revenait pas lors du sommet de l'UA en cours. «S'ils ne nous l'accordent pas, ce n'est pas un problème», a-t-il dit répondant à la question d'une agence de presse. Une réunion à huis clos s'est tenue, hier, pour trouver une solution à ce problème, plus protocolaire que réellement politique. Toutefois, il faut relever que le conflit du Darfour qui a éclaté en 2003, loin de voir le bout du tunnel, donne l'impression d'empirer chaque semaine, chaque mois un peu plus. Intervenant dans le débat, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a, de son côté, appelé hier à Addis-Abeba, «à construire un consensus pour le déploiement urgent d'une force ONU-UA» au Darfour. Il faut «construire un consensus pour le déploiement urgent» d'une force conjointe au Darfour, a-t-il déclaré dans un discours, le premier, devant l'UA, depuis sa prise de fonction le 1er janvier. «Nous devons travailler ensemble pour mettre fin à la violence et aux politiques de la terre brûlée par plusieurs parties, dont les milices, ainsi qu'aux bombardements», a-t-il ajouté, à l'adresse des pays africains. «Le nombre de victimes de cette crise est inacceptable (...). Nous devons nous attaquer à la dimension régionale de la crise», a-t-il encore dit. Le second point qui mobilise l'attention du sommet est celui ayant trait à la situation en Somalie aussi chaotique qu'incertaine. Ce qui a fait dire au président de la Commission africaine que le pays serait plongé dans le «chaos si les troupes africaines n'y sont pas déployées rapidement (en Somalie)». «Je me réjouis que les troupes éthiopiennes aient commencé à partir de la Somalie. Mais si les troupes africaines ne sont pas mises en place rapidement, ce sera le chaos», a averti M. Konaré. «J'en appelle à une mobilisation des troupes africaines. Mais nous avons besoin de 8000 soldats. Aujourd'hui, à peine 4000 sont prêts à être déployés», a-t-il expliqué, précisant que le Nigeria, l'Ouganda, le Malawi et le Ghana avaient accepté d'envoyer des troupes en Somalie. «Nous avons besoin de moyens» a encore dit Alpha Oumar Konaré, notamment de moyens de transport. Sur ce plan, l'Algérie, par l'intermédiaire du président Abdelaziz Bouteflika, a proposé d'assurer le transport aérien des forces de paix que l'UA compte déployer en Somalie. A ce propos, M.Konaré a rendu hommage à l'Algérie en déclarant que «le président de l'Algérie, M.Abdelaziz Bouteflika, nous a annoncé que son pays était prêt à mettre à la disposition de l'UA, dès aujourd'hui, (hier), cinq Iliouchine-76 et sept Hercule C-130 pour le transport des contingents rwandais et ougandais vers la Somalie» et M.Konaré d'ajouter: «Que l'Algérie en soit remerciée». Le président de la Commission africaine a également affirmé que l'Afrique «ne peut pas toujours attendre de l'étranger qu'il finance nos opérations de paix» appelant les autres pays africains «à suivre l'exemple de l'Algérie» à participer à garantir la paix dans le continent par des moyens africains. Notons, par ailleurs, que les Etats-Unis ont également fait des offres de transport de troupes pour la Somalie. «Nous sommes prêts à transporter par avion et à louer des avions pour la force de paix africaine en Somalie. Nous en avons déjà discuté avec l'Ouganda, et j'en ai parlé avec le président (de la Commission africaine) Alpha Oumar Konaré», a indiqué Mme Frazer, sous-secrétaire d'Etat américaine aux Affaires africaines.