Ouyahia veut arrimer le RND comme unique contradicteur des thèses du FLN à tout point de vue. Les deux partis de l'Alliance présidentielle s'installent, désormais dans une sorte de bipolarité dans le débat politique à venir. Ouyahia a pris une longueur d'avance en allant fouler le sol de l'Algérie profonde, avant même le coup de starter de la campagne des législatives. Il prêche la bonne parole et assène des coups au FLN. Il s'agit d'une vraie concurrence entre un parti et son «clone». Le FLN soupire avant de lâcher, avec la suffisance qui est la sienne, sa petite phrase: «Le RND veut soigner sa sombre image» qui a irrité au plus haut point Ouyahia et qui saisit au vol l'occasion que lui offre la radio pour revenir à la charge. Il met, cette fois-ci, le paquet. La révision de la Constitution est du ressort du président de la République. Le jumelage des élections n'est pas possible, inacceptable même. Le remaniement ministériel ne nous intéresse pas. Cela relève aussi des compétences du président. Il pousse l'offensive plus loin en critiquant la gestion de son successeur à la tête du gouvernement. Il détruit toutes les cartes maîtresses de son adversaire. Mais le FLN a plus d'un tour dans son sac. Il le laisse venir. Il lui donne le temps qu'il faut pour dire ce qu'il a sur le coeur. Le vieux parti s'installe dans la durée. Fort de son expérience, il sait que son contradicteur va s'essouffler avant l'heure de vérité. Alors, on le laisse faire comme si de rien n'était, pour le surprendre au moment où il s'attend le moins et sur les thèmes que l'ours aura choisi délibérément. C'est le genre de débat auquel on va assister, à l'orée de la campagne électorale des législatives. Un combat inégal, certes, entre un parti conquérant et un autre en déroute mais combat -tout de même- sur lequel se focalise l'attention des médias parce qu'il n'y a pas d'autre débat envisageable. La classe politique a donné ce qu'elle a pu; une soixantaine de partis uniques, à quelques exceptions, avec de vieux slogans et des discours à l'emporte-pièce, sans impact réel sur les électeurs. On ne sait d'ailleurs ce que peut apporter le PT ou le FFS au débat. On ne sait si leurs voix seront entendues, une fois la bipolarisation définitivement installée. Le schéma est classique. La compétition électorale s'ouvre sur ce duel «mortel» entre deux partis se revendiquant d'une même idéologie que l'acte de naissance pourtant différencie. L'un est né dans la tourmente, sous le colonialisme. Son acte de naissance était une déclaration de guerre à l'occupant. Au bout de 7 années de guerre violente, il a arraché l'indépendance du pays pour s'ériger en parti unique jusqu'à 1988. Il fait, en bon élève, l'apprentissage de la démocratie. Le second constitué essentiellement de «patriotes» a déclaré la guerre aux terroristes. Il est devenu ensuite réconciliateur au gré des circonstances. Le débat est biaisé dès le départ. Les préoccupations des électeurs sont ailleurs. «Il s'agit de prendre les mesures qui conviennent pour l'émergence d'élus représentatifs de la population, jouissant de l'autorité morale qui leur permet d'être à l'écoute des citoyens et de se faire entendre par eux et suffisamment compétents pour prendre en charge les missions de développement local», indique un Bouhara qu'on ne peut accuser de faire de la figuration. Mais personne n'a rien entendu. Après la corruption, le chômage, la pauvreté, la criminalité, la drogue, voilà venir le temps d'un phénomène nouveau. Il s'agit des «harraga». Comment empêcher les Algériens de fuir leur pays? Quel est le parti qui pourra les convaincre de rester? C'est la question à laquelle il faut répondre.