Ils ont appelé à l'échange d'informations et à la coordination des efforts ainsi qu'à l'activation des expériences spécialisées dans ce domaine. La renaissance de l'union du Grand Maghreb passera-t-elle par l'«impasse» sécuritaire? Tout porte à le croire, depuis les derniers attentats terroristes d'Alger et de Casablanca. L'heure est à la vigilance et à la mobilisation. L'enjeu est majeur et tout relâchement sera fort préjudiciable à la stabilité de la région. D'autant plus que cette fois-ci, il ne s'agit pas d'une lutte classique contre le terrorisme, mais une nouvelle stratégie à trouver pour s'adapter et partant, combattre le nouveau phénomène des attentats kamikazes. A Alger, Rabat, Nouakchott, Tripoli et Tunis, c'est le branle-bas de combat. Les messages échangés entre les chefs d'Etat de la région, notamment les présidents algérien, Abdelaziz Bouteflika, et tunisien, Zine El Abidine Ben Ali, d'une part et Bouteflika et le souverain alaouite Mohammed VI, de l'autre, n'ont pas tardé à être suivis d'actions concrètes. La menace est réelle, elle concerne tous les pays de la région et, par conséquent, une riposte commune et concertée s'impose de fait. C'est dans cette optique que se tient, depuis lundi dernier, à Tripoli, une réunion des directeurs généraux de la Sûreté nationale des cinq pays de L'UMA. Une rencontre qui s'est assignée, comme principal objectif, de coordonner la lutte antiterroriste. Ali Tounsi (Algérie), Charki Draïss (Maroc), Abdessetar Bennour (Tunisie), Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed (Mauritanie) et le représentant du pays hôte de la rencontre, le secrétaire du Comité populaire général libyen de la Sûreté publique, Naser Al-Mabrouk Abdallah, sont unanimes: il faut à tout prix activer la coopération entre les services de sécurité des pays membres de l'UMA, en vue de combattre le terrorisme et le crime organisé «à travers l'élaboration de plans et de mécanismes de nature à consolider la sécurité et la stabilité dans ces pays». Ils ont appelé à l'échange d`informations et à la coordination des efforts ainsi qu'à l'activation des expériences spécialisées dans ce domaine. Un travail de fourmi a déjà été réalisé par les services spécialisés dans la lutte antiterroriste, depuis les premiers attentats terroristes de Casablanca et une importante base de données a été constituée, apprend-on de sources concordantes. Sur le terrain, les mesures de sécurité ont été renforcées, notamment au niveau des zones frontalières avec l'Algérie. Rien n'est laissé au hasard, et le moindre mouvement est détecté. Il convient de rappeler qu'à l'issue d'accrochages, fin décembre 2006 et début janvier 2007 dans la banlieue sud de Tunis, alors que la police, la Garde nationale (gendarmerie) et les forces spéciales avaient mis hors de combat 12 islamistes et arrêté une quinzaine d'autres qui tentaient de perpétrer des attentats, les services de sécurité tunisiens demeurent sur le qui-vive. Lors de son dernier discours, le président Ben Ali a mis en garde, dans un long discours public au palais présidentiel de Carthage, contre les risques de «tomber dans la dépendance par rapport à des parties étrangères, dont les objectifs et les prises de position ne sont pas forcément compatibles avec nos spécificités et nos constantes nationales». Pour sa part, le roi Mohammed VI a souhaité, dans un message au chef de l'Etat, au lendemain des attentats d'Alger, une coopération de tous les pays du Maghreb pour lutter contre le terrorisme. «Les actes terroristes n'ont pas atteint la seule Algérie, car nous estimons que votre deuxième pays, le Maroc, compte parmi les cibles visées», a-t-il lancé. Avant d'ajouter: «Nous sommes prêts à travailler avec tous les dirigeants des cinq Etats du Maghreb pour assurer la protection de nos peuples et de nos pays et les prémunir des risques et des périls de les voir se muer en base de terrorisme hideux et exécrable.» Cependant, la menace terroriste n'est pas circonscrite à la rive sud de la Méditerranée, mais plane aussi sur l'Europe, où des attentats sont à craindre dans les prochains jours, indiquent les experts en matière de lutte antiterroriste. Là aussi, une coordination entre les services de renseignements des pays du Bassin méditerranéen a eu lieu, tout récemment, dans la capitale française, en vue d'évaluer cette menace. Selon les spécialistes très au fait des activités d'Al Qaîda dans la région, aucun pays n'est épargné. D'ailleurs, les services secrets espagnols ont fait part au gouvernement de leurs inquiétudes sur l'activité d'Al Qaîda en Espagne et en France après les attaques de mars et avril à Casablanca (Maroc) et Alger. «Ils ont signalé au gouvernement que les kamikazes d'Al Qaîda au Maghreb représentent le risque le plus important pour l'Espagne», indique le journal El Pais dans l'une de ses dernières livraisons. Pour faire face à cette menace, la police espagnole a renforcé sa collaboration avec l'Algérie et augmenté les contrôles maritimes dans le détroit de Gibraltar, indique la même source. Il est clair qu'après une longue période de passivité, voire même de compromission avec les groupes terroristes les pays européens savent, désormais, que le péril est à leur porte et que leur sécurité dépend de celle de leurs voisins maghrébins.