En mission pour la paix, le brillant ministre des Affaires étrangères trouve la mort, le 3 mai 1982, dans un crash d'avion. Né à Jijel en janvier 1932, il entame sa scolarité à Sétif, pendant quatre années. Il rejoint l'ex-lycée Bugeaud à Alger, l'actuel Emir Abbdelkader. Il parachève ses études supérieures à l'université d'Alger. Sanctionnées par une licence en droit en 1953. Il a tout juste 21 ans. C'est dans l'étude de Me Bouzida qu'il fait ses premiers pas d'avocat. Il sera le lien entre le mouvement estudiantin naissant et les étudiants algériens emprisonnés. Il fera partie de cette génération d'Algériennes et d'Algériens exceptionnels. «Mohamed Seddik Benyahia, c'est ce que l'Algérie a enfanté de plus beau, de plus généreux. Au même titre que Abane Ramdane, Ben M'hidi et tant d'autres», nous déclarera Abderrezak Bouhara, un de ses compagnons, dans un témoignage poignant. C'est tout un pan du mouvement étudiant lié à la guerre de Libération nationale qui s'est déroulé à l'occasion de l'hommage rendu à Mohamed Seddik Benyahia. Les pensionnaires du lycée de Koléa qui porte son nom se sont déplacés au centre de presse d'El Moudjahid, hier, pour assister à l'événement. Des personnalités étaient présentes. Elles ont répondu à l'invitation de l'association «Machaâl chahid». Elles ont témoigné. Aucune des interventions ne s'est, cependant, attardée sur les circonstances du tragique accident qui l'a emporté. Le mystère demeure entier. Tous ont mis en valeur la personnalité de l'homme. Exceptionnelle. Layachi Yaker, ancien ministre et ambassadeur, Antar Daoud, journaliste et diplomate, Abderrezak Bouhara, Salah Benkobi, ancien ambassadeur et Mme Chaulet, la sémillante enseignante à l'université d'Alger, sociologue de son état. De la création de l'Ugema, avec ses amis Lamine Khan et Taleb Ibrahimi à la conférence afro-asiatique des étudiants à Bandoeng. C'est tout le parcours d'un homme qui s'est mis au service de sa patrie qui est évoqué. De Melun à Evian où il sera appelé à jouer un rôle moteur dans les négociations qui conduiront l'Algérie à l'indépendance. Benyahia et l'Algérie se télescopent. L'homme et la patrie ne font qu'un. Il aura marqué tous ceux qui l'auront approché dans les différents départements ministériels qu'il aura occupés. Infatigable, il engage des réformes. L'Information et la Culture, l'Enseignement supérieur, les Affaires étrangères, tous ces ministères subiront son empreinte. Le témoignage le plus lucide a été sans conteste celui de Mme Chaulet. «Nous avons hérité d'une méthode de travail que nous devons à Mohamed Benyahia». Réformer, innover, moderniser, voilà quelques ingrédients de la méthode Benyahia. La clé de la réussite au service de la construction de l'Etat. Un Etat moderne qui a produit des élites que nous convoitent les grandes puissances. Certains en ont fait leur bonheur. Benyahia a cru en l'implication de ces élites pour la construction d'une révolution éminemment populaire. «C'est une des chevilles ouvrières de la construction de l'Etat», a déclaré Layachi Yaker. «C'est une fierté pour notre génération, il faut mettre en oeuvre une initiative nationale pour lui donner la place qu'il mérite», a-t-il poursuivi avec une voix qui trahissait mal l'émotion. Benyahia et quatorze autres membres de sa délégation trouveront la mort le 3 mai 1982. Un crash d'avion à la frontière entre l'Irak et la Turquie. En mission pour la paix.