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Les cultures et la mondialisation
ENTRE VALEURS ANCIENNES ET MODERNITE
Publié dans L'Expression le 17 - 05 - 2007

Ce ne sont plus des références morales qui gouvernent le monde.
Que faire pour conjuguer culture et modernité, logique et sens, unité et pluralité? Les valeurs anciennes et le progrès, de prime abord, aujourd'hui, ce couple de mots semble étonnant. L'Europe par exemple est la région du monde la plus sécularisée, et une seule culture, celle du marché, semble vouloir dominer; même si s'y côtoient nombre de pratiques culturelles. La sécularisation est une des dimensions fondatrices et non négociables de sa modernité. Pour une certaine Europe, le sens et la culture ne peuvent se trouver en dehors du monde, mais dans l'émancipation sans condition de la raison. Cela peut être compréhensible à trois conditions: que la pratique se fasse sans mépris des valeurs de l'autre, que l'on évite de calquer sur les autres cultures le parcours des uns et des autres et que l'on garde ouvertes les possibilités du débat, notamment sur le concept de culture. Car être moderne et vouloir vivre en conformité à ses racines reste légitime. Par-delà la situation dominante de l'imposition d'une seule culture à sens unique, caractère du monde moderne, il est encore possible, dans le contexte de la modernité, de tenter de vivre culturellement, ou de faire de la culture d'origine le principe de l'unification entre le coeur et la raison, entre modernité et culture spécifique, le principe d'une unité globale de son comportement, de son éthique, de sa règle de vie, sans pour autant en faire un système de règles, imposables aux autres. Tout être ouvert et objectif sait que rien dans ses références propres n'interdit que la sphère publique soit séparée de cette globalité de l'existence humaine intime. L'attention portée à une certaine totalité de l'existence, une globalité de soi-même, la possibilité de vivre dans le monde sans se diluer en lui, ni hors de lui, n'implique pas un totalitarisme de cette existence comme modèle. Ce n'est pas faire concession à l'air du temps que de dire cela, c'est par fidélité et respect pour la culture spécifique. Mais la mondialisation ne devrait pas supposer opposer les différentes dimensions, ni aboutir à un reniement de la culture ancestrale. Cela dit, il faut reconnaître que les valeurs culturelles spécifiques orientent de moins en moins les visions et pratiques de la majorité des citoyens modernes, faute de créativité. La mondialisation, la raison hyper critique, la perte de sens ou simplement de sens moral, et la marginalisation des relations humaines dominent, sans alternative crédible. Les fruits du travail de la raison, de l'art ou de la science, n'ont pas vraiment comblé le vide et répondu pleinement aux interrogations fondamentales. Ce n'est pas la fin du monde, mais la fin d'un monde auquel il nous faut apprendre à faire face, sans chercher à opérer des retours utopiques ou crispés qui aggravent la situation du sens.
Le retour des revendications
Le fait culturel spécifique est trop souvent perçu comme un phénomène fondé sur le mythe, la fiction et la subjectivité, voire comme une source d'aliénation, à tout le moins perçu comme non conforme au progrès et à la fonction logique. En même temps, on assiste à ce que certains appellent un retour des revendications, ou des délires de besoins passéistes, qui prétendent combler le désert de sens et de vérité qui encercle le monde moderne. Ce retour a suivi l'effondrement des empires, des colonies, des totalitarismes, la déception au regard des attentes escomptées par le «progrès», les promesses politiques non tenues et les dérives de la modernité. Le retour est comme une valeur-refuge qui remet en scène la nostalgie du passé, ce qui ne signifie pas la renaissance et l'influence créatrices sur le cours de la vie historique. Tout en restant marqué par des contradictions, la dimension moderne sécularisée va de plus en plus dominer, malgré toutes les formes de réactions et de pseudo-retours. Que dire et que faire pour faire reculer les oppositions, les ignorances et les confusions à ce sujet? En somme, comment apprendre à vivre ensemble de par le monde dans ce contexte de ruptures de tous les côtés?
Alors que les citoyens de cultures anciennes ont besoin de la critique raisonnée, du regard objectif de l'autre et d'un travail de la déconstruction des réalités, des traditions et non du dénigrement et du rejet systématique, les tenants du choc, de la polémique, du jugement hâtif, de l'amalgame et de l'irréflexion face à la culture différente et son apparent retour, choisissent de jouer sur la peur et l'orgueil. Même si une partie notable de l'opinion publique n'est pas dupe, et que des politiques, des intellectuels, des artistes et des journalistes essayent de travailler selon leur conscience et l'éthique, les termes, les mots creux utilisés, pour parler de la culture de l'autre, les vacarmes de l'actualité et le matraquage permanent d'images caricaturales sont sources de brouillage, de diversion et de paralysie du raisonnement.
Quels sont les défis, les risques et les opportunités sur le fond que l'époque fait peser sur notre avenir commun? Sur le plan du sens de la vie, le premier point inquiétant est d'ordre culturel. La modernité, telle qu'elle se pratique, marginalise le champ de la vie culturelle authentique. Il y a de moins en moins de liens possibles entre la conception du sujet moderne et le sens de la vie auquel les peuples sont attachés. La mondialisation de cette modernité produit un déséquilibre outrancier. La morale, la pratique de la culture et les valeurs anciennes sont remises en cause. Ce ne sont plus des références morales qui gouvernent le monde, comme l'a fait, durant des siècles, le monothéisme, mais une rationalité coupée du sens. Dans cette ambiance d'épuisement, sans racines, des groupes rétrogrades et identitaires prolifèrent, s'efforcent de s'exprimer en conformité avec la science et, éventuellement, influencent l'idéologie dominante néolibérale: mais tout cela se fait dans une sorte de vide, et au détriment de la morale, du spirituel authentique et de l'humanisme. La distinction entre les différents secteurs de la vie, temporel/spirituel, public/privé, nature/culture est un passage obligé, une opportunité réelle de se libérer, une conduite compatible avec les valeurs spirituelles; en revanche, la séparation radicale, la rupture définitive, la marginalisation des valeurs culturelles propres, l'opposition entre la logique de la raison et le sens créent un déséquilibre qui conduit à la déshumanisation, à la désorientation. L'attachement à la compréhension de la vie, fondé sur l'idée de liens et de croisements, et non de ruptures et d'exclusions, permet, par exemple, de résister à cette perte d'équilibre, à cette remise en cause des fondements de la civilisation humaine. La démarche moderne d'allure faustienne, les êtres attachés à leur culture la perçoivent comme ambivalente à l'image de Janus, libératrice d'un côté et aliénante de l'autre. La sécularisation comme mouvement positif est incontournable, mais la désignification du monde et de la vie posent des problèmes de fond. La difficulté s'aggrave quand, par inculture et réaction, par peur du changement et par crainte d'une activité illimitée de la raison, certains, tentés par la fermeture, confondent les deux niveaux de la logique et du sens et tentent de remettre en cause les acquis de l'autonomie de l'individu. Cette forme de résistance est vouée à l'échec.
Sur le plan politique, la dérive de la modernité, c'est le fait que le corps social est essentiellement perçu comme un corps productif, soumis aux intérêts des détenteurs de capitaux. Cette dépolitisation de la vie est sans précédent: elle remet en cause la possibilité de faire l'histoire, d'être un peuple responsable au sens noble du mot, c'est-à-dire capable de décider, de résister au nom de la liberté, d'avoir ses raisons et d'avoir raison, de donner force et réalité à un projet de société choisi après débat. Dans le monde développé, en effet, en dépit des acquis exemplaires, des débats démocratiques, de la légitimité des institutions, de la prédominance des droits de l'homme, de la libre entreprise, de la prolifération des normes juridiques, la possibilité d'exister en tant que peuples et citoyens responsables et libres, participant à la recherche collective et publique du juste, du beau et du vrai, semble de plus en plus hypothéquée et problématique. L'avenir dépend de moins en moins de la décision de chaque citoyen, et toujours davantage des systèmes du marché. Plus encore des situations d'injustices, de faits coloniaux brutaux et de politiques des deux poids et deux mesures, qui s'inventent de nouveaux ennemis et remettent en cause les acquis de la prééminence du droit dans les relations internationales, suscitent le désordre dans le monde et poussent certains aux désespoirs et aux suicides.
Sur le plan du savoir et de la connaissance, malgré la floraison des arts et de la culture, ces joyaux de la modernité, le troisième aspect inquiétant de notre époque est le fait qu'est remise en cause la possibilité de penser et de penser autrement. La mondialisation qui se définit par son caractère techniciste vise à maîtriser toutes les choses de la vie par l'exploitation des résultats des sciences exactes, appréhendées comme les seules qui soient pertinentes pour la logique du développement. Déculturation, dépolitisation, déraison, trois figures d'un monde sans horizon qui se profile. Un être sensé ne peut se passer de la justification fondamentale, du raisonnement et du rapport à l'universel. Si l'on veut contribuer à rouvrir l'horizon, il faut tout d'abord être créatif et exercer l'autocritique et la déconstruction, déconstruire signifie démonter pour analyser et pour reconstruire autrement. Ainsi, déconstruire la manière dont on reçoit et on comprend nos textes fondateurs et la représentation de nos pratiques, notre vision des autres et du monde.
Les cultures sclérosées sont en partie responsables de la déformation et de la désinformation au sujet de leurs valeurs. Exaspérés par les comportements irrationnels, des citoyens modernes refusent le droit à la différence et appellent à marginaliser la culture de l'autre, sans discernement. Ils proposent l'exclusion de l'altérité, à tout le moins, sa dévitalisation.
Les questions du sens, de la démocratie et du vivre ensemble sont centrales partout dans le monde, pas seulement s'enfermer dans le dilemme droit à la différence revendiqué par les uns et intégration exigée par les autres. Parfois, le monde dominant s'emploie à détruire lui-même ses propres protections, en jetant de l'huile sur le feu, vu la crise générale, en donnant la parole sciemment à des pyromanes et en cherchant à fragiliser ceux qui résistent réellement à l'extrémisme et à la déshumanisation. Des discours s'adonnent à la stigmatisation, en cherchant à produire la honte d'être différent. Au lieu de dialoguer et de rechercher ensemble comment faire face aux défis communs et retrouver une nouvelle civilisation universelle qui fait tant défaut, les discours dominants prétendent détenir le seul modèle valable, autour du triptyque: laïcisme, capitalisme et techno-science, refuse le droit à la différence et même l'étude du fait culturel des autres.
L'urgence d'un dialogue
Les citoyens de culture différente que celle de l'ordre dominant dans le monde, malgré leurs faiblesses et paradoxes, peuvent contribuer à l'oeuvre du vivre ensemble. Cela signifie que, sans eux, il sera difficile de sauvegarder la pluralité, l'hétérogénéité et la diversité salutaires du monde. Il est urgent d'engager un vrai dialogue et une déconstruction de la vision européenne courante au sujet des cultures des autres, et de la vision des citoyens du Sud au sujet de l'Occident. Le dialogue est la voie incontournable.
Le dialogue entre les deux mondes, pris dans un seul mouvement et marqué par des inégalités, est impératif. Le devenir est commun. En traitant de la question du dialogue avec l'autre, il ne s'agit pas de chanter les vertus de l'altruisme, d'imaginer un angélisme politique, mais de garder les yeux ouverts sur l'avenir qui se dérobe, pour tenter de penser et de vivre notre destin commun. Et c'est le troisième élément de réponse, la méconnaissance étant une des sources principales du problème, nous mettre d'accord en Méditerranée sur un faisceau commun de modules d'enseignements du fait culturel pour tous les cycles et niveaux. Il n'est pas trop tard pour dialoguer en vérité et enseigner en objectivité, pour être à la hauteur de l'exigence: réapprendre à vivre ensemble sur la base de l'interconnaissance culturelle.
www.mustapha-cherif.com


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