Smaïl Mira déclare être prêt à renoncer à son immunité parlementaire «si la justice le demande». Une première en Algérie. Le ministère de la Justice vient de demander officiellement, au président de l'APN la levée de l'immunité parlementaire du député Smaïl Mira. C'est ce qu'a affirmé, hier, M.Tayeb Belaïz au centre de rééducation d'El Harrach. Une déclaration qui intervient au moment où l'ex-président de l'APC de Tazmalt, impliqué, le 13 juillet en cours, dans une affaire d'homicide du jeune Kamel Saâdi, sort de sa réserve. Il déclare être prêt à renoncer à son immunité parlementaire «si la justice le demande». Dans les colonnes du quotidien Al Khabar, il souligne: «Je suis prêt à renoncer à mon immunité parlementaire, avant même que l'APN n'approuve cette décision.» En effet, dans son article 110, la Constitution est claire: «Les poursuites ne peuvent être engagées contre un député ou un membre du Conseil de la nation, pour crime ou délit, que sur renonciation expresse de l'intéressé ou sur autorisation, selon le cas, de l'Assemblée populaire nationale ou du Conseil de la nation, qui décide, à la majorité de ses membres, la levée de son immunité.» Or, manifestement, Smaïl Mira veut anticiper sur le «verdict» de la chambre basse du Parlement. Le patriote, qui se défend d'être en ce jour fatidique, en mission commandée à Yakouren, dans le cadre de la lutte antiterroriste, est donc prêt à être jugé et se tient disponible à toute sollicitation. C'est-à-dire au même titre que tout citoyen justiciable, quel que soit son statut. Nous avons tenté, hier, vainement de prendre attache avec M.Mira. Sans doute harcelé par la presse, il a préféré éteindre son téléphone. Information prise, il aurait quitté son village et serait à Alger. Qu'est-ce qui aurait, donc, motivé le geste de M.Mira? Dans ses dernières déclarations, il revient sur les circonstances de l'«incident regrettable». D'après lui, c'est lors d'un contrôle d'identité sur la route d'Aït M'likèche, au niveau du lieu-dit Azrou N'thor, que l'irréparable arriva. Résumons les faits relatés par M.Mira: de retour de Yakouren où il était en mission dans le cadre de la lutte antiterroriste et au moment où il descendait de son véhicule pour le contrôle de l'identité d'un jeune suspect, ce dernier aurait tenté de se saisir de son arme de poing. «En essayant de me dégager, j'ai tiré une balle, l'atteignant dans le bassin.» Mira tente d'invoquer implicitement une situation de légitime défense. L'autre argument, et non des moindres, brandi par le député pour attester de sa bonne foi, c'est le fait qu'il ait porté assistance au jeune Saâdi et a même «appelé des secours en vue de le transférer à l'hôpital militaire de Aïn Naâdja.» Des faits sur lesquels ses deux accompagnateurs ont, sans doute, été interrogés dans le cadre de l'enquête des services de sécurité. Cependant, une question s'impose: Mira a-t-il agi par légitime défense? La jeune victime représentait-elle réellement un danger, nécessitant le recours à l'arme à feu? Seule l'enquête en cours peut déterminer les circonstances exactes. De son côté, le RPR, le parti qui a parrainé la candidature de M.Mira, condamne l'assassinat du jeune Saâdi. Toutefois, le parti considère, par la voix de son président, M.Abdelkader Merbah, qu'il «ne lâchera pas son député si les enquêtes en cours concluent à un acte de légitime défense». Dans une déclaration au quotidien Asharq Al Awsat, M.Merbah s'interroge pourquoi le député incriminé n'a pas pris attache avec le parti après l'incident du 13 juillet. Par ailleurs, lors d'une conférence de presse animée samedi dernier au siège du Front des forces socialistes, M.Karim Tabbou avait souligné que son parti exige que toute la lumière soit faite sur l'assassinat du jeune Saâdi. Même son de cloche du côté de la population de la région, unanime à demander que justice soit faite. Par ailleurs, nous apprenons de sources sûres que la famille du jeune Saâdi n'a pas déposé plainte, et refuse que l'on donne à cette affaire une tournure politique. Elle considère que seule la justice est à même de faire éclater la vérité. A noter que Smaïl Mira, fils du commandant Abderrahmane Mira, chef de la Wilaya III historique, est chef patriote, depuis le début du terrorisme. Il a été élu dans sa circonscription lors des dernières législatives sous les couleurs du Rassemblement pour la République (RPR).