Le courrier express, arrivé ces deux derniers jours à Alger, contient des lettres pas comme les autres. Il ne s'agit heureusement pas de lettres comportant de la poudre de la bactérie du charbon, mais trois enveloppes timbrées qui renferment des messages d'Algériens détenus à Guantanamo et destinés à leur famille. Bouteflika lui-même avait, avant-hier, annoncé lors d'une interview accordée à la chaîne LBC, l'arrivée de ces lettres par voie postale. Très difficile de suivre le cheminement de ces lettres pour arriver aux familles destinataires. Les familles des trois jeunes détenus d'Al-Qaîda qui, tout en voulant s'organiser pour prendre contact avec les autorités algériennes, sont confrontées à la nécessité de l'anonymat. Des sources affirment, à ce propos, que certaines de ces familles n'ont pu être mises au courant de la détention de leurs fils que par ces lettres arrivées avant-hier. Avec des regrets à peine voilés, les expéditeurs de ces lettres ont décrit les conditions d'arrestation et de détention qui ont marqué le voyage interminable entre le «djihad» en Afghanistan et Guantanamo Bay au sud de Cuba. «Nous avons été transférés vers Guantanamo sous l'effet du Valium, les marins ne se sont pas contentés de cela, pour s'assurer qu'aucun des détenus ne peut fuir, ils nous ont aussi ligotés, bandé les yeux et bouché les oreilles (...) c'était un voyage vers l'inconnu», explique une de ces lettres. Arrivés à la base militaire américaine à Cuba, «c'est le début d'un long interrogatoire lassant. Les Américains ont tout prévu même les traducteurs, nul ne peut supporter les questions qui se répètent à longueur de journée, on ne pouvait tenir que grâce aux prières (...) Je me porte bien et votre image ne m'a jamais quitté. Je vous prie de me pardonner et de me bénir, chers parents», conclut la même lettre d'un détenu. En parallèle des actions menées par les autorités algériennes en vue d'obtenir l'extradition des détenus jugés innocents, la mobilisation des familles commence à prendre forme. Les familles des six Algéro-Bosniaques semblent, à ce propos, prendre de l'avance par rapport aux familles qui résident en Algérie. Celle-ci est le fait du handicap et du souci de rester dans l'ombre pour ne pas attirer l'attention. Ce qui explique déjà que rares sont ceux qui connaissent les wilayas où résident ces familles de terroristes d'Al-Qaîda. Revenant sur les six Algéro-Bosniaques, leurs épouses sont très optimistes à leur sujet. Leur extradition vers l'Algérie est en voie d'être réglée grâce à l'intervention des émissaires du ministère des Affaires étrangères qui ont séjourné aux USA pendant près de trois semaines. Information non confirmée de source officielle. Presque convaincu de leur innocence, Washington est prêt à les livrer à leur pays d'origine. «Nous soutiendrons les détenus dont nous sommes convaincus de l'innocence», avait déclaré le Président de la République. Cette déclaration sonne comme un engagement de la part des autorités algériennes à oeuvrer pour intervenir en faveur de ces citoyens. Cela indique aussi un appel à la mobilisation. Une chance pour les familles des trois détenus à Guantanamo d'avancer les preuves de l'innocence de leurs proches aux autorités algériennes, afin qu'elles puissent entreprendre les démarches nécessaires pour l'obtention de leur extradition. En outre, Bouteflika s'est dit indifférent sur le sort de ceux dont l'implication dans des actions terroristes dans le monde est avérée. «Ceux qui sont réellement impliqués avec les terroristes, qu'ils soient extradés ou pas, peu importe», avait-il assuré.