Jamais un haut responsable de l'Etat n'a sollicité les citoyens pour qu'ils donnent des explications sur leur abstention. La fracture des élections législatives est-elle vraiment ressoudée? Décidément, non, mais elle a certainement laissé des traces. Apparemment, les autorités concernées n'arrivent toujours pas à digérer le fort taux d'abstention enregistré, (65%), lors du scrutin législatif du 17 mai. Le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales continue ses «investigations» sur le pourquoi de cette défection de l'électorat. Toutes les pistes sont envisageables. Il reste encore celle des électeurs. Aux yeux du département de Zerhouni, la réponse se trouve dans la rue. Avant-hier, le ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, a invité les citoyens à expliquer «les causes et les motifs à l'origine de cette abstention» en envoyant un message aux quatre millions d'abstentionnistes. Une première en vérité: un haut responsable de l'Etat qui demande aux citoyens de s'expliquer sur leur abstention. La question qui mérite d'être soulevée dans ce sens, est pourquoi et qui a incité le ministre à réagir de la sorte? Les réponses aux lettres envoyées aux citoyens peuvent-elles à elles seules expliquer une telle débâcle électorale? D'abord, les citoyens concernés vont-ils répondre favorablement à la sollicitation de M.Zerhouni? Le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, a demandé, de plus, aux électeurs défaillants de «faire preuve de civisme», d'afficher une bonne volonté, un peu de compréhension et qu'ils collaborent pour éviter une autre débâcle, lors des prochaines échéances électorales. Un appel à la raison? M.Zerhouni avertit, toutefois, qu'en cas d'absence de réponse, «ils seront rayés des listes électorales». Les observateurs s'interrogent. Le vote est, certes, un devoir et un droit, mais est-ce une obligation? Il est évident que cela est discutable d'autant plus qu'un tel mécanisme (le vote citoyen) est loin d'être automatique dans un pays où souvent la fraude a suppléé une opinion politique en bonne et due forme. Le droit au vote est garanti par la Constitution, outre le fait que c'est un devoir citoyen. Il faut donc chercher la raison ailleurs. D'autre part, le vote devient une obligation du moment que M.Zerhouni accompagne ses lettres aux abstentionnistes de la menace d'être «biffés» des listes. Le ministre évoque, à ce propos, les changements de résidence des citoyens qui n'ont pas éprouvé la nécessité de s'inscrire ou se réinscrire sur les listes électorales de leur nouvelle circonscription. M.Zerhouni a, par ailleurs, indiqué que ces citoyens disposent du temps nécessaire pour régulariser leur situation administrative en prévision des prochaines élections. Tant d'explications ont été données au regard du camouflet du 17 mai. Les partis politiques, les pouvoirs publics et les connaisseurs de la scène politique nationale ont donné diverses explications au phénomène de l'absentéisme. A chacun sa version. A chacun sa manière de voir les choses. Au lendemain des élections, le ministre de l'Intérieur avait endossé la défection des électeurs vis-à-vis des partis politiques. Pour lui, la classe politique n'a pas su répondre aux aspirations du peuple, ni sur le plan du discours ni au niveau des actions menées sur le terrain. Lors de la campagne électorale, les partis politiques ayant pris part à cette bataille, avaient été accusés de manquer de sincérité et de séduction dans leurs discours politiques. Cette accusation avait été rejetée dans toutes ses formes par les responsables des partis politiques. Malgré le fait qu'il n'ait pas pris part à cette échéance, le FFS (Front des forces socialistes), avait invité les pouvoirs publics à trouver les véritables raisons de «ce gâchis» électoral. Pour le parti d'Aït Ahmed, l'échec n'est pas celui des partis, mais c'est l'échec du pouvoir, de sa politique et de sa manière de gérer le pays. Cette débâcle a débouché sur la révision de la loi électorale, souhaitée également par la classe politique. Le premier à avoir exprimé son sentiment sur cette question a été M.Zerhouni. Celui-ci a souhaité, par la même occasion, que la loi régissant les partis politiques soit également révisée. Ainsi, de nouvelles lois ont été proposées et rapidement adoptées par la législature. Donc, un nouveau Code électoral, désormais, régit les partis politiques. On constate, à la lumière de ces données, que toutes les explications possibles semblent avoir été données à la fracture du 17 mai. Toutes?