Plus d'un tiers seulement a été réalisé à 20 mois de l'échéance. L'Algérie souffre depuis des dizaines d'années de la crise récurrente du logement, aggravée par l'exode rural du fait du chômage dans les campagnes, la destruction du vieux bâti menaçant ruine et les catastrophes naturelles de ces dernières années. L'ambitieux programme présidentiel d'un million de logements d'ici à 2009 semble bien compromis. C'est l'angoissante attente pour les postulants à un logement aussi bien pour ceux déjà inscrits sur les programmes que ceux pour les programmes futurs de la fameuse Aadl, qui trône comme une fée (malfaisante?) sur les dossiers. Le directeur de la gestion immobilière vient d'annoncer, selon la presse, que la livraison de la dernière tranche inscrite au programme... 2001 (il y a 6 ans!!) est repoussée à 2009! Les délais fixés par l'Aadl seraient-ils élastiques ou fallacieux à ce point? Il y a lieu de le croire. Le nouveau ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, Noureddine Moussa, n'a pas caché l'amère vérité (pour beaucoup) en révélant que «seuls 393.341 logements ont été réalisés au 30 juin 2007», soit un taux avoisinant les 40% du programme, et ce, à 20 mois à peine de l'échéance du programme initié en 2001 par le président Abdelaziz Bouteflika. Cette réalité divulguée au grand jour met à nu les déclarations «officielles» faites auparavant et indiquant que le programme avançait de façon «satisfaisante»; elles sont qualifiées de «fausses» tout simplement. L'ancien patron du département de l'habitat, Mohamed Nadir H'mimid, avait même déclaré à la presse que «le programme d'un million de logements avait atteint, au début de l'année en cours, un taux d'exécution de 65% et que les engagements pris allaient être respectés...» Il avait même annoncé un programme additif qui permettrait de livrer plus de 1,2 million d'unités en 2009.La précision édictée par le nouveau ministre met fin à la «cacophonie» des chiffres avancés par les différents opérateurs publics qui confondent trop souvent entre un logement «réalisé» et celui «livré» au bénéficiaire. La différence est de taille. Des milliers de logements sont achevés, mais ne peuvent être affectés à leurs bénéficiaires en l'absence de viabilisation, de raccordement aux réseaux de VRD, ou souvent du minimum de conditions vitales comme le gaz et l'électricité. Le ton est aujourd'hui donné. Noureddine Moussa opte pour la vérité des chiffres, même si elle fait mal. Hélas, l'ambitieux programme du président de la République, qui aspire à ramener le TOL (taux d'occupation du logement) de 7,82 à cinq personnes par logement en 2009, ne semble pas (plus?) être du possible. Rien n'y concourt réellement. La réalisation du programme a laissé espérer la suppression rapide et définitive des cités de transit et autres habitations précaires. Le programme est réparti comme suit: 240.000 logements, toutes catégories confondues, déjà programmés en 2001, auxquels s'ajoutent les 55.000 logements de la formule location-vente gérée par l'Aadl, ainsi que la réalisation et la cession directe de 80.000 logements par la Cnep. Viennent en complément, 215.000 logements sociaux participatifs (LSP), 120.000 logements sociaux et 275.000 ruraux, à réaliser par les Opgi et les communes, avec le financement définitif du Trésor public. Les banques et autres institutions financières interviennent, pour leur part dans la réalisation de 15.000 logements promotionnels. Mais voilà que quelques mois après le lancement du programme, sont apparus les premiers signes d'essoufflement. Nombre d'entreprises publiques, souvent sous-équipées, se sont trouvées dans l'incapacité matérielle de réaliser les projets de l'Aadl. Celles-ci ont vite «jeté l'éponge». Le colossal programme, rappelons-le, devrait loger décemment un million de familles de taille moyenne, ou cinq millions d'âmes tout au moins. L'Aadl a même procédé à la résiliation de contrats avec des entreprises étrangères «défaillantes». Avec le cumul des retards enregistrés sur la majorité des sites, à l'échéance 2009, on continuera à comptabiliser les RAR (reste à réaliser), comme au temps des plans quinquennaux et les 100.000 logements/an inscrits. Dans les conditions actuelles, la réalisation d'un million de logements relève de «l'impossible», estiment les professionnels, ceci face à l'insuffisance et à la faiblesse des entreprises publiques non préparées, tant en moyens humains que matériels, pour réaliser et livrer des lots de plus de 2000 logements en 18 mois. Bien que le pays jouisse de réserves financières suffisantes pour la réalisation du programme, il ne dispose pas de tous les moyens (techniques, organisationnels, et autres..) adéquats, le tout conjugué aux incohérences des décideurs locaux, incapables de résoudre les problèmes rencontrés sur le terrain. L'appel de l'Aadl à des sociétés étrangères, pour pallier le déficit en qualification, a montré ses limites: à 28.000 DA le mètre carré, l'on est loin des résultats escomptés. Quant aux rares entreprises publiques à avoir réussi à livrer leur premier programme contractuel, elles se sont abstenues de s'engager dans de nouveaux marchés, abandonnant ainsi aux entreprises turques, portugaises, tunisiennes, égyptiennes, libanaises, chinoises, cubaines, brésiliennes... le soin et «l'honneur» d'achever le programme présidentiel... à une date indéterminée!